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Trop de sexe tue le sexe :
y a-t-il une épidémie d'asexualité ?
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Pas envie

Plusieurs experts ont affirmé que près d'1 % de la population ne ressentirait pas de besoin sexuel. Dans une société où le sexe est plus que jamais présent, certaines personnes voudraient voir l'asexualité reconnue comme une orientation sexuelle à part entière.

Gérard Leleu

Gérard Leleu

Gérard Leleu est médecin et sexologue. Il est également écrivain et conférencier, auteur de nombreux ouvrages sur le couple et le plaisir.

 

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Atlantico : Des experts ont révélé que près de 70 millions de personnes à travers le monde, c’est-à-dire 1% de la population mondiale, seraient asexuels. L’hypersexualisation de la société contribue-t-elle à tuer le désir sexuel ?

Gérard Leleu : Tout d’abord, il est compliqué d’évaluer le nombre d’asexuels dans le monde. C’est un chiffre qui me semble contestable. Cependant, il est évident que de trop parler de sexualité et de la montrer sans arrêt, surtout d’une manière assez « trash » et dégradante pour la femme, peut finir par dégouter certaines personnes du sexe. L’excès provoque inévitablement la saturation et le dégoût chez certains sujets. De plus, ce que l’on montre de la sexualité, ce sont des pratiques extrêmes et parfois même dévalorisantes. Il y a de quoi rendre les personnes accros au sexe autant que de les rendre asexuels.

Existe-t-il plus d’asexuels aujourd’hui qu’auparavant ?

Il y en a toujours eu. Tout d’abord, il existe beaucoup de populations au sein desquelles les couples ne se forment pas. Cela peut s'expliquer par une surreprésentation du genre masculin ou inversement du genre féminin. Si le célibat peut être imposé par un contexte démographique, il peut aussi être un choix dû, par exemple, à la religion.

Ce qui est nouveau, c’est le refus de la sexualité par écœurement et par saturation. La sexualité qui nous est présentée aujourd’hui peut ne pas convenir à tout le monde. Celle qui n’a pas de sens, qui n’a pas de sacré, qui est décadente et irrespectueuse, notamment vis-à-vis de la femme. La volonté de ne pas vivre cette sexualité-là peut bien évidemment se comprendre.

Plus particulièrement, quelles sont les conséquences de cette hyper sexualisation chez les femmes ?

La pornographie est omniprésente. Et celle-ci présente les femmes comme étant un objet d’assouvissement par l’homme. Les caresses, le respect et la poésie n’y sont pas représentés. La plupart des femmes ont du mal à se positionner dans ce genre de rapport avec la sexualité. Selon moi, la proportion de femmes parmi les asexués est assez forte de ce fait.

La pornographie n’exercerait-elle pas une pression trop forte sur les hommes qui pourrait finir par les brimer et en rendre certains asexuels ?

Il est certain que la pression de la pornographie peut avoir des conséquences sur la sexualité des hommes.

Il y a quelques années, la mode était à la chasteté. Aujourd’hui, avec l’asexualité, le terme a seulement changé mais il recouvre une même réalité.

Ce qui peut aussi éloigner les hommes du sexe c’est le fait que la femme devienne libérée et, par conséquent, plus exigeante. L’homme doit donc savoir s’y prendre et être à la hauteur, dépasser sa nature première qui consisterait plutôt à « tirer son coup », tel un coq. L’amour tel que la femme en rêve peut faire très peur à l’homme.

En parallèle de ce phénomène aujourd’hui, de plus en plus de personnes sont accros au sexe et à la pornographie. Ces deux constats sont-ils liés ? Quels sont concrètement les risques de l’hypersexualisation de la société ?

Il y a un véritable effet de balancier. La sexualité était auparavant un véritable tabou. On est aujourd’hui passé du tout au tout, avec un véritable engouement pour le tout sexuel. Le frein mis par les asexuels laisse peut-être présager un retour à l’équilibre.

Les personnes renoncent aujourd’hui au sexe car ils n’y trouvent que de la déception. Il faut que les asexuels retrouvent un sens au sexe et à l’amour, ne serait-ce que spirituel ou simplement humain.

L’asexualité doit-elle être reconnue comme une orientation sexuelle à part entière ?

L’absence de sexualité peut correspondre à une phase de la vie mais ne peut pas être vécu comme quelque chose de définitif. Cela peut être dû à des circonstances physiques ou à un état mental ponctuel, dépression ou mal être. Mais cela ne peut pas être un statut à part entière.

Nous vivons dans une société où le sexe est omniprésent. Dans ce contexte, comment s’intégrer socialement lorsqu’on est asexuel ?

Il est vrai que la société est malade de sexualité. Elle est réellement obsédée par le sexe. Cela fait partie des problèmes actuels qui se posent dans la société. Il paraît donc difficile dans ce contexte d’avoir une vie sociale normale lorsqu’on refuse cette sexualité.

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