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Tensions sur les prix : ces jeunes Allemands contraints de se disputer les logements les moins chers avec des migrants
©Reuters

Crise du logement

Auparavant relativement stables, les prix de l'immobilier ont augmenté au cours des quatre dernières années en Allemagne de l'ouest. Dans ce contexte, l'arrivée massive de réfugiés a créé une tension supplémentaire sur le coût et la disponibilité des logements.

Guillaume Duval

Guillaume Duval

Guillaume Duval est rédacteur en chef du mensuel Alternatives économiques, auteur de La France ne sera plus jamais une grande puissance ? Tant mieux ! aux éditions La Découverte (2015) et de Made in Germanyle modèle allemand au-delà des mythes aux éditions du Seuil et de Marre de cette Europe-là ? Moi aussi... Conversations avec Régis Meyrand, Éditions Textuel, 2015.

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Atlantico : "L'immobilier dans les villes allemandes est surévalué", a déclaré le lundi 15 février la Bundesbank. Dans quelle mesure l'arrivée massive de réfugiés en Allemagne a-t-elle contribué à cette tension sur les prix et l'accès au logement ? Avec qui ces réfugiés entrent-ils en "concurrence"? Avec quelles conséquences ?

Guillaume Duval : Il faut revenir un peu arrière. La France est un pays où les prix de l'immobilier ont été multipliés par 2,5 en 20 ans. En Allemagne, jusqu'à il y a 3-4 ans, les prix n'avaient pas bougé. Sur les 3-4 dernières années, les prix ont donc fortement augmenté. Cette hausse des prix a eu plus particulièrement lieu dans certaines métropoles de l'ouest (Munich, Francfort). Par ailleurs, il est difficile de construire en Allemagne de l'ouest du fait de règles assez strictes et de la faiblesse des réserves foncières. 

Dans ce contexte, l'arrivée massive de réfugiés a créé une tension supplémentaire sur le prix et la disponibilité des logements en Allemagne. Les réfugiés sont en concurrence avec les jeunes et les étudiants qui cherchent un petit logement pas cher pour démarrer dans la vie. 

Cette crise du logement peut accroitre les tensions politiques et sociales en Allemagne. De nombreuses régions allemandes de l'est ont des logements libres mais dans la mesure où ces régions n'offrent aucune perspective en termes d'emploi, les réfugiés ne veulent pas y aller (même si le système de répartition en Allemagne est assez strict et ne permet pas aux réfugiés d'aller où ils veulent). 

Quelles sont les autres causes de cette hausse du prix du logement en Allemagne ? Quelles sont les villes les plus touchées ?

La cause principale est la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Au cours des dix premières années de la zone euro, l'Allemagne était le pays européen qui avait les taux d'intérêt réels les plus élevés en Europe. Cela était lié au fait que l'Allemagne avait à peu près les mêmes taux d'intérêt que les autres pays de la zone mais présentait une inflation supérieure. Cela explique aussi pourquoi il n'y a pas eu de hausse des prix de l'immobilier au cours de cette période. Aujourd'hui, c'est en Allemagne que les taux d'intérêt réels sont les plus faibles en Europe : l'inflation est un peu plus élevée qu'ailleurs mais les taux d'intérêt sont les plus bas d'Europe. Ainsi, pour la première fois, les Allemands se mettent eux aussi à spéculer sur l'immobilier.

Les villes les plus touchées sont les grandes métropoles de l'ouest, c’est-à-dire celles où il y a de l'activité et qui sont attirantes. A l'est, et en particulier dans les campagnes, la situation est dramatique, y compris sur le plan immobilier : les gens partent, les logements sont libres etc. 

Face à cette crise du logement,  quelles sont les mesures envisagées par les autorités allemandes ? A quelles difficultés sont-elles confrontées dans la mise en œuvre de solutions ?

Il existe en Allemagne des mécanismes analogues à ceux de la loi Alur (et qui l'ont précédée) pour éviter les hausses des loyers (ce que l'on appelle le "miroir des loyers"). Dans les grandes villes, il y a des règles très strictes sur l'évolution du prix des loyers, le calcul des loyers. Il existe par ailleurs une forte vigilance de la société civile et des associations de locataires. 

Deuxièmement, les autorités allemandes veulent accélérer la construction de logements sociaux pour accueillir les réfugiés mais comme je vous l'ai dit précédemment, ce n'est pas évident car il y a des règles d'urbanisme assez strictes et peu de réserves foncières dans les zones très peuplées de l'ouest… 

Les principales difficultés sont budgétaires : l'Allemagne veut faire face à l'accueil des réfugiés (et notamment à la question du logement des réfugiés) tout en maintenant l'équilibre budgétaire, ce qui est difficile. En outre, de nombreux aspects reposent sur les politiques menées par les collectivités locales, or, d'une part, elles sont souvent et depuis longtemps dans une situation financière difficile (elles n'ont pas beaucoup de capacités de financement) et d'autre part, elles sont soumises à des pressions (à l'instar des collectivités locales en France) pour éviter d'avoir trop de logements sociaux, trop de densité etc. 

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