Tensions sur les chaînes d’approvisionnement : et si les solutions étaient à trouver du côté de la 1ère guerre mondiale ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Volontaires de l'armée britannique en août 1914
Volontaires de l'armée britannique en août 1914
©

Retenir l'histoire

C'est en approchant de la famine que les pays de l'Entente ont décidé de s'allier pour organiser leur ravitaillement ensemble.

Paul Poast

Paul Poast

Paul Poast est professeur associé au département de sciences politiques de l'université de Chicago. Ses recherches sur les relations internationales et la méthodologie quantitative ont été financées par la National Science Foundation et ont été publiées dans l'American Journal of Political Science, International Organization, World Politics, Journal of Conflict Resolution et Political Analysis, entre autres. Paul est titulaire d'un doctorat de l'université du Michigan (où sa thèse a remporté le prix Walter Isard de la Peace Science Society), d'une maîtrise de la London School of Economics and Political Science et d'une licence de l'université de Miami. Avant de rejoindre Chicago, Paul était professeur adjoint au département de sciences politiques de l'université Rutgers et, avant de commencer son doctorat, il a enseigné au département d'économie de l'université d'État de l'Ohio.

Voir la bio »

Atlantico : Les chaînes d'approvisionnement mondiales sont aujourd'hui dans la tourmente et, depuis plus d'un an, elles sont mises à mal par la crise sanitaire. Une situation qui n'est pas unique puisque ces mêmes chaînes d'approvisionnement mondiales ont été secouées par la Première Guerre mondiale. Quels secteurs ont été touchés par le conflit ? Comment les nations de l'époque ont-elles réagi et se sont-elles organisées ? 

Paul Poast : Presque tous les secteurs de l'économie ont été touchés, mais les problèmes les plus urgents concernaient les denrées alimentaires, en particulier le blé.  La France, la Grande-Bretagne ou l'Italie s'inquiètent toutes des denrées disponibles pour leurs civils et de leurs soldats notamment sur le blé. La Grande-Bretagne a toujours été dépendante des importations, mais la France l'est devenue davantage en raison des combats qui se sont déroulés sur son propre territoire. 

Au début, les nations se sont débrouillées toutes seules et ont cherché à acquérir du blé sur les marchés étrangers, notamment en Russie et en Amérique. Finalement, elles se sont rendues comptes que seuls les marchés américains étaient fiables. Alors les alliés ont été confrontés au problème de la sécurité du passage (notamment à cause des sous-marins allemands), de la capacité des navires (même s'ils ne risquent pas d'être coulés), puis des maladies des cultures en Amérique du Nord (rouille des racines en 1916). En somme, en 1916, les alliés étaient confrontés à une "tempête parfaite" pour impacter leur approvisionnement en blé.

Face à cette tempête parfaite, les alliés ont été prêts à "expérimenter" de nouvelles façons d'organiser les marchés mondiaux du blé. Plus précisément, grâce au travail d'Etienne Clémentel et de Jean Monnet (pour les Français) et de Walter Runciman et Arthur Salter (pour les Britanniques), les puissances alliées ont décidé de faire l'essai d'organisations supranationales, sous la forme de l'Exécutif du blé, la Commission internationale de ravitaillement (que je décris dans mon fil twitter).   

À Lire Aussi

Pénuries de main-d'œuvre à tous les étages : sommes-nous entrés dans un nouveau monde sans nous en rendre compte ?

Alors que nous connaissons ces mêmes difficultés aujourd'hui, les organisations de coopération mondiale sont-elles les seuls piliers pour éviter les situations de pénurie ? 

Les organisations mondiales ne sont pas le seul pilier, mais elles sont peut-être le meilleur espoir que nous ayons.  Les États-nations sont jaloux de leur souveraineté (prenons exemple du Brexit), mais ils sont généralement prêts à en sacrifier une partie au nom de l'efficacité, du moins dans un domaine limité.  La complexité croissante de l'économie mondiale crée des fragilités qui appellent des solutions coordonnées au-delà des frontières. La création d'une organisation internationale visant à coordonner la distribution des marchandises à l'entrée et à la sortie des ports semble être un domaine dans lequel les États-nations pourraient se coordonner.

Aujourd'hui encore, pouvons-nous travailler avec nos alliés pour assurer la stabilité des chaînes d'approvisionnement sans être entravés par des problèmes géopolitiques ? 

La géopolitique, en particulier la concurrence entre les États-Unis et la Chine, complique considérablement une telle coordination.  Comme beaucoup des plus grands problèmes auxquels le monde est confronté aujourd'hui, la solution ultime passe par la coopération de ces deux nations.  En l'absence d'une telle coopération, les nations peuvent prendre des mesures limitées, comme ce qui a été récemment annoncé par les États-Unis et le Japon.

Quel type d'organisation de coopération mondiale pourrait et devrait émerger après le COVID afin de faire face aux pénuries actuelles ?

De plus, après l'initiative COVID, il est nécessaire de renforcer à la fois l'OMS et l'OMC. L'OMS doit permettre aux pays de coordonner et de partager les informations relatives aux sources potentielles de pandémies.   L'OMC, pour se concentrer moins sur l'élimination des barrières commerciales et le traitement des différends commerciaux, et davantage sur la coordination et le partage des informations sur la logistique commerciale. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !