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L'encadrement des médias, 
un vaste chantier... politique ?
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Télé-surveillance

"Internet, n'a pas de limites, la télévision fait peur"...Les avis de mise en garde contre les médias de l'ère numérique font légion, et soulèvent des interrogations majeures quant à leur encadrement par les pouvoirs publics. Est-il efficace et suffisant ?

Jean-Noël Dibie pour Culture-Tops

Jean-Noël Dibie pour Culture-Tops

Docteur en droit, Jean-Noël Dibie a une très longue expérience de l'audiovisuel et des médias : directeur de la SFP (Société française de production), responsable des affaires européennes à France Télévision, conseiller du directeur général de l'UER (Union européenne de radio-télévision). 

Aujourd’hui consultant, il s’investit dans les activités de recherche, notamment au sein d’EUROVISIONI, et d’enseignement (président du conseil pédagogique de l’EICAR, l’Ecole des métiers du cinéma de l’audiovisuel et des nouveaux médias, et chargé de cours à l’EDHEC).

Jean-Noël Dibie est l'auteur d'un A-book en six parties paru en 2014 sur Atlantico éditions : Communication politique, le plus vieux métier du monde

 

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La propension du pouvoir politique à contrôler les techniques et les pratiques de communication, qui est constante dans l’histoire des sociétés humaines, s’est accentuée avec le développement des médias. Le parallélisme observé entre le progrès des idéaux républicains et la liberté de la presse, montre que le niveau d’intervention du politique sur les médias est inversement proportionnel à celui de la démocratie.

En Europe, l’extension du monopole du télégraphe aux télécommunications puis aux médias audiovisuels, installe la tutelle de l’administration qui, le plus fréquemment, confie la radiL'enco à des opérateurs publics en situation de monopole. Dans l’Europe en reconstruction de l’après guerre, le développement de la télévision est confié aux radiodiffuseurs publics, forts de leur maîtrise de la radiodiffusion. Les britanniques sont les premiers à mettre fin, en 1954, au monopole de la BBC sur la télévision en installant l’Independent Television Autority, instance de régulation de la télévision commerciale. Pour ce faire, ils ont substitué au critère structurel du service public, qui fait qu’une mission de service public est confiée à un opérateur public, le critère fonctionnel, qui privilégie la satisfaction de la mission de service public.

Aux Etats-Unis, en vertu du premier amendement de la Constitution instituant la liberté d’informer, la radiodiffusion relève de l’initiative privée. Les autorités fédérales, conscientes des besoins d’harmonisation techniques de la radiodiffusion, comme des télécommunications, en confient la tutelle a une instance de régulation ad-hoc, la Federal Commission for Communication –FCC. Créée en 1934, cette agence fédérale intègre les attributions de la Radio Federal Comission -RFC- installée en 1927.

En France, où le monopole d’opérateurs publics sur la radio et la télévision perdure jusqu’en 1982, les soubresauts qui accompagnent l’installation de l’instance de régulation de l’audiovisuel soulignent les difficultés qu’il y a à effacer la tutelle du politique sur la radiodiffusion : La Haute Autorité de l’Audiovisuel, créée en 1982, fait place en 1986 à la CNCL, remplacée en 1989 par le CSA. Dans le secteur des télécommunications où la technique prime, aucun mouvement d’opinion n’a accompagné l’installation, en 2009, de l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes - ARCEP.

25 des 36 pays membres du Conseil de l’Europe ont déjà installé un régulateur commun aux médias audiovisuel et aux communications électroniques, mais en Francela dimension politique de la radiodiffusion entrave la fusion du CSA et de l’ARCEP.

L'encadrement des médias, un terrain encore en friche

Le vaste chantier législatif du droit de la communication, lancé à la fin des années 80 par les instances de l’Union Européenne a donné, à l’Europe le cadre réglementaire commun nécessaire au bon fonctionnement des télécommunications. Cela n’est pas sans implications sur les médias audiovisuels, notamment, au regard de la distribution au public de «services contenus», question à aborder du double point de vue des fournisseurs de ces services et de leurs utilisateurs. Déjà, la Directive sur les Services de Médias audiovisuels - Directive SMAV- a mis en place un dispositif juridique qui réglemente les principaux aspects liées aux contenus des services de médias audiovisuels, au-delà de la télévision linéaire. Toutefois les dispositions de cet instrument se révèlent insuffisantes dés lors que «le service de contenus» implique des communications électroniques qui recourent à des infrastructures en réseaux.

La complexité de ces problématiques justifie la fusion des instances de régulation des télécommunications et des médias audiovisuels. En Allemagne, une telle fusion n’est pas possible du fait du partage de compétences entre le gouvernement fédéral et les états : les télécommunications relèvent du Bund et la radiodiffusion des länder. Arbitrée par la Cour Constitutionnelle, cette dualité limite les possibilités qu’ont les télévisions allemandes de se développer dans l’univers de l’Internet.

Les internautes n’ont plus le monopole de l’accès à Internet et l’arrivée annoncée de la «télévision connectée» ouvre aux téléspectateurs le monde du Web. Pour autant la télévision, média collectif qui, depuis un demi-siècle, a plus fait que la famille et l’école dans la conduite des mutations sociales, ne sera pas effacée par l’Internet. Télévision et Internet n’ont pas vocation à se combattre mais à s’enrichir mutuellement. Cette coexistence ne peut se satisfaire d’un cadre juridique conçu pour organiser la rareté dans l’univers de la technologie analogique.

Pour que nos écrans ne deviennent pas des zones de non droit, il faut donner aux secteurs de l’audiovisuel et des médias électroniques un cadre adapté aux progrès constants de la convergence. Déjà, les régulateurs tentent de concilier les dynamiques globales et nationales des Technologies de l’Information et des Communications, en privilégiant la co-régulation : le régulateur fixe les principes dont l’application revient aux opérateurs dans une démarche d’autorégulation.

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