Revenir sur les 35 heures ? Pourquoi c'est devenu une fausse bonne idée<!-- --> | Atlantico.fr
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Le nouveau ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a évoqué la possibilité de revenir sur les 35 heures.
Le nouveau ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a évoqué la possibilité de revenir sur les 35 heures.
©Reuters

Contre-intuitif

A peine arrivé à Bercy, le nouveau ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, crée déjà la polémique en émettant dans un entretien au Point la possibilité de revenir sur les 35 heures. Au vu du contexte socio-économique, revenir sur cette mesure ne semble pourtant plus être la priorité.

Il n'avait pas encore endossé le costume de ministre de l'Economie qu'Emmanuel Macron faisait part lundi 25 août à l'hebdomadaire Le Point de la possibilité de revenir sur les 35 heures. "Nous pourrions autoriser, les entreprises et les branches, dans le cadre d'accords majoritaires, à déroger aux règles de temps de travail et de rémunération", déclarait l'ancien banquier d'affaires alors qu'on ne savait pas encore qu'il deviendrait le lendemain le nouveau locataire de Bercy.

Plus de dix ans après l'entrée en vigueur des lois Aubry, l'économie française y gagnerait-elle réellement ? Car revenir sur les 35 heures, cela reviendrait d'abord à diminuer du pouvoir d'achat.

Une diminution du pouvoir d'achat

Depuis le 1er janvier 2002, date d'application des lois Aubry, la durée légale du travail en France est de 35 heures par semaine dans toutes les entreprises. Comme le rappelait Henri Rouilleault, administrateur de l'Insee, dans nos colonnes en 2011, "la durée légale n'est ni une durée minimale (les salariés à temps partiel travaillent moins), ni une durée maximale".

En effet, selon le ministère du Travail, en 2011, les salariés à temps complet ont déclaré travailler 39,5 heures par semaine et pour les cadres la moyenne hebdomadaire était d'environ 44 heures. En clair, les 35 heures correspondent aujourd'hui au seul de déclenchement des heures supplémentaires, mieux rémunérées. Revenir sur la durée légale aurait ainsi bien un impact sur le pouvoir d'achat comme l'explique Henri Rouilleault :

"Aujourd'hui, un salarié qui travaille 39 heures, travaille 35 heures normales plus 4 heures supplémentaires. Si on supprime la durée légale, l'entreprise pourra décider que le compteur d'heures supplémentaires commence à 39 ou 40 heures, c'est une perte de pouvoir d'achat pour les salariés concernés. Des heures qui étaient payées en heures sup, à 125 %, deviennent des heures payées 100 %. C'est une perte de quatre fois 0,25 heures, soit une heure, soit 2,5 % de pouvoir d'achat."

La plupart des entreprises se sont adaptées

Par ailleurs, la plupart des grandes entreprises se sont adaptées à cette nouvelle organisation qui ne pose plus les problèmes soulevés en 2002. "Cette réduction du temps de travail a nécessité de nouvelles organisations, et d’âpres  négociations. Elle a également eu un coût de près de 22 milliards d’euros au titre des allègements de charges. La mise en place des 35 heures a redéfini la notion de travail pour les entreprises mais a également eu pour effet de modifier le rapport au travail par un renforcement de la frontière vie privée / vie professionnelle",estime Etienne de Villepin, avocat spécialiste en droit social. Il est vrai que les RTT apparaissent aujourd'hui aux yeux des salariés comme un réel progrès social, dont il serait difficilement envisageable de les priver.

Par ailleurs, si en 2008 le Conseil constitutionnel n'avait pas que l'Etat oblige toutes les entreprises à renégocier, elles peuvent les renégocier. Néanmoins, peu en ont fait la demande. 

Ce qu'ont coûté les 35 heures, ce que cela coûterait d'en sortir

Au moment de l'entrée en vigueur des 35 heures, la loi prévoyait des allègements de charges de 15 à 20 milliards. Mais ces allégements de cotisation sont depuis liés au niveau de salaire et non sur la durée de travail. "Pour inciter les entreprises à anticiper le passage aux 35 heures, Martine Aubry avait en effet créé en 1998 des allégements de charges spécifiques qui, en 2002, se montaient à une quinzaine de milliards d'euros. […] Sauf que Jean-Pierre Raffarin les a déconnectés en 2002 de toute référence à la durée du travail et attribués à toutes les entreprises, de manière inconditionnelle, pour les centrer sur les bas salaires", explique Marc Landré, journaliste au Figaro.

Aussi supprimer ces exonérations, reviendrait à augmenter le coût du travail faiblement qualifié, ce qui pourrait entrainer la destruction de 800 000 emplois à moyen terme, toujours selon Marc Landré.

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