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Rébellion Mélenchon : la justice française abuse-t-elle de l’intimidation pour mener à bien ses enquêtes ?
©ERIC FEFERBERG / AFP

"Agression politique"

Les révélations de Mediapart sur la relation entre Chikirou et Mélenchon ont, au-delà de l'enquête, montré la capacité d'intimidation de la justice lors d'une enquête. Mélenchon s'est ainsi plaint de voir ses photos personnelles saisies.

Rodolphe Bosselut

Rodolphe Bosselut

Rodolphe Bosselut est avocat à la cour. Il intervient régulièrement dans les médias.

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Atlantico : La justice a-t-elle une fâcheuse tendance en France à utiliser dans certains cas de cette capacité d'intimidation ? 

Rodolphe Bosselut :Je ne parlerai pas d’intimidation stricto sensu.

Ce qui est certain, pour une personne mise en cause c’est qu’elle ressent le déploiement de force de l’institution judiciaire, pour prendre une image parlante, comme un train lancé à toute vitesse sur les seuls rails tracés par l’accusation..

Cette impression est renforcée lorsque l’enquête menée se manifeste avec un zèle particulier dans sa mise en œuvre.

De ce point de vue, si l’on s’en tient aux enquêtes ouvertes contre des partis français (MODEM, LFI et RN) sur l’emploi des assistants parlementaires européens, la palme de l’enquête la plus zélée revient à celle ouverte contre le Rassemblement National : qui a fait l'objet de deux perquisition l’une en 2016 et l’autre au moment de la campagne présidentielle, outre de nombreuses perquisition au domicile des assistants parlementaires, de certains députés, voire dans les bureaux de certains au Parlement européen sans oublier une commission rogatoire internationale en Belgique….

Disons qu’il y a un zèle géométrie variable dans la poursuite des enquêtes.

Ce "zèle à dimension variable" pourrait-il selon vous être plus contrôlé ?

Vaste sujet….

À mon niveau modeste d’avocat je ne vois qu’une seule solution pour enrayer de telles logiques, c’est de faire appliquer le droit.

Je regrette que par ses gesticulations et ses postures excessives, Monsieur Jean-Luc Mélenchon ait en définitive obscurci le vrai sujet qui est à mon sens essentiel.

Selon moi ces  procédures violent le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs. L’accusation prétend que les assistants parlementaires européens auraient été davantage utilisé au bénéfice du parti dont sont issus les députés qui les emploient, que pour une mission strictement définie auprès du parlement européen. Autrement dit il n’est pas reproché une fictivité du travail, mais le fait  que le  travail politique des assistants ne serait pas conforme aux exigences du règlement intérieur du parlement européen, que les juges français ont décidé d’infractionnaliser….

Étant précisé que ces règles internes sont déjà sanctionnées par une procédure de remboursement quasi automatique, lorsque le parlement considère que les sommes payées aux assistants parlementaires serait indues. Le député se voit ponctionner du montant desdites sommes sur sa rémunération.

À suivre la logique de l’accusation, le juge pénal devra s’ériger en arbitre du contenu et de la nature même du travail parlementaire. Bref il appartiendrait  aux juges judiciaires de dicter la nature du travail du législateur.

Montesquieu doit se retourner dans sa tombe !

La capacité qu'a la justice à intimider n'est-elle pas surtout problématique quand elle est appuyée par une forte médiatisation ? N'est-ce pas dans ce lien entre médiatisation et intimidation que réside le malaise actuel qu'exprime par exemple Jean-Luc Mélenchon devant l'enquête menée par Médiapart sur sa vie privée ?

Il est certain la médiatisation intense des affaires tend à substituer à la présomption d’innocence, logiquement protégée par le secret de l’enquête ou de l’instruction, une nouvelle présomption de culpabilité.

Surtout lorsque le calendrier judiciaire est calqué, par pure coïncidence bien sûr, sur l’agenda politique.

Je note cependant que dans le cas des perquisitions de LFI, Monsieur Jean-Luc Mélenchon s’est chargé tout seul de la médiatisation de l’affaire ou a minima de l’amplifier.

Mais là encore il y a deux poids deux mesures. Je prends comme exemple plutôt topique celui de l’affaire dite des Tweets dans laquelle Marine le Pen a communiqué sur sa convocation en vue d’une expertise psychiatrique.Pour s’en scandaliser et dénoncer un choix étrange de poursuites.

Immédiatement le parquet a ouvert une enquête considérant que la publication sur les réseaux sociaux de l’ordonnance de désignation de l’expert violait l’interdiction de publier des actes de l’instruction.

Alors que quelque temps auparavant Marine Le Pen avait poursuivi des journaux qui avaient publié durant la campagne présidentielle des extraits in extenso des procès-verbaux d’enquête concernant l’affaire des assistants parlementaires, enquête à laquelle elle n’avait nullement accès.

Or le parquet a classé sa plainte considérant que le secret des sources des journalistes et les nécessités de l’information justifiaient de telles violations.

En revanche lorsqu’il s’agit de communiquer sur sa propre mise en examen et d’assurer ainsi les droits de La défense les plus élémentaires, le parquet a manifestement une appréciation plus intransigeante et plus zélée…

On peut des lors s’interroger sur certains traitement de défaveur, sans pour autant sombrer dans le complotisme.

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