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Qui doit supporter la charge des indemnités journalières en cas d’arrêt maladie ?
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Mauvaise idée

Le gouvernement voudrait faire payer les entreprises pour les arrêts maladie de leurs employés. Une possible mesure qui, certes, allégerait le budget de l'Assurance maladie mais ne trouve guère de soutien auprès du patronat.

Jacques Bichot

Jacques Bichot

Jacques Bichot est Professeur émérite d’économie de l’Université Jean Moulin (Lyon 3), et membre honoraire du Conseil économique et social.

Ses derniers ouvrages parus sont : Le Labyrinthe aux éditions des Belles Lettres en 2015, Retraites : le dictionnaire de la réforme. L’Harmattan, 2010, Les enjeux 2012 de A à Z. L’Harmattan, 2012, et La retraite en liberté, au Cherche-midi, en janvier 2017.

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Depuis quelques jours, le bruit court que « le gouvernement veut faire payer les entreprises » en ce qui concerne les arrêts maladie. En fait, il s’agirait de mettre à la charge de l’entreprise 4 jours d’indemnisation pour les arrêts de moins de huit jours. La charge supplémentaire pour les entreprises a été évaluée à 900 millions d’euros par an. Les trois principales organisations patronales ont émis un avis très défavorable, comme chaque fois que les pouvoirs publics veulent reporter sur elles des tâches ou des frais qui incombaient aux administrations publiques (Etat ou sécurité sociale).

Dans ce cas, c’est le budget de l’Assurance maladie (dont la composante destinée aux indemnités journalières maladie dépasse légèrement 10 Md€ par an) qui serait soulagée. Cela ferait bien l’affaire des ministres et de leurs équipes qui préparent la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2019, du fait que la croissance espérée n’est pas au rendez-vous : les cotisations étant grosso modo proportionnelles aux effectifs employés, si la croissance est modeste, la sécurité sociale ne perçoit pas assez pour financer l’augmentation irrésistible des dépenses maladie. Pour schématiser à l’extrême, la faiblesse de la croissance ne réduit pas le nombre de nouveaux cancers, ni les innovations thérapeutiques, généralement coûteuse, qui permettent de les soigner plus efficacement. Alors, où trouver l’argent ?

En pareil cas, les budgétaires fourmillent d’idées. Malheureusement, il ne semble pas y en avoir beaucoup, parmi ceux qui pèsent quand il s’agit de prendre des mesures, à disposer de conceptions claires en matière de finances sociales ; du coup, ces idées sont souvent des bricolages ayant pour effet de compliquer les choses pour l’ensemble des acteurs concernés : travailleurs, employeurs et assurance maladie. La complication sera évidemment au rendez-vous si le projet actuel aboutit, puisque l’employeur devra effectuer une partie du travail actuellement accompli par la sécurité sociale, sans que cela permette à cette dernière de réduire son personnel, car il lui faudra rester en liaison avec les entreprises : un arrêt de travail de 7 jours peut être prolongé, et l’indemnisation passer de ce fait de l’entreprise à l’assurance maladie.

Je ne dispose pas des moyens requis pour faire un calcul précis, mais je ne serais pas surpris si ce transfert de charges de l’assurance maladie aux entreprises entraînait plusieurs dizaines de millions d’euros annuels supplémentaires de frais de gestion, à la charge des entreprises. Autrement dit, pour faire payer plus aux entreprises, que par ailleurs on dispense à grands frais de fractions de cotisations patronales, nos inénarrables dirigeants se proposent de faire des modifications qui compliqueront le système et augmenteront ses coûts de fonctionnement. Si ce projet aboutit, cela n’aura rien de nouveau, ce sera un caillou de plus qui s’ajoutera au tas de hauteur respectable qui encombre déjà le pré carré des Français, une complication de plus et donc un coût supplémentaire pour le contribuable-cotisant. Pour Bercy et l’avenue Duquesne : business as usual.

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