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La prochaine élection présidentielle aura lieu dans un peu plus d'un an.
La prochaine élection présidentielle aura lieu dans un peu plus d'un an.
©CHARLY TRIBALLEAU / AFP

Parti des riches, des pauvres, des jeunes ou des vieux ?

Lucas Jakubowicz a analysé le dernier sondage Ifop sur la prochaine présidentielle. Selon lui, les résultats confirment des tendances à l’œuvre depuis des années : la gauche a perdu le peuple, la droite a perdu les jeunes.

Lucas Jakubowicz

Lucas Jakubowicz est journaliste politique et rédacteur en chef de Décideurs Magazine.

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Atlantico : Le dernier sondage Ifop-Fiducial pour Sud Radio et le JDD consacré à l'élection présidentielle de 2022 montre que la gauche est devenue ultra-minoritaire dans les catégories populaires. Quels sont les chiffres les plus frappants ?

Lucas Jakubowicz : Vous avez raison de le souligner, la gauche est à la peine dans cette partie de la population. La situation n’est pas récente. Au premier tour de l’élection présidentielle de 2002, Jean-Marie Le Pen était déjà premier dans ce segment du corps électoral. Mais le PS tirait encore son épingle du jeu et disposait d’un certain socle. Ce temps là semble révolu. Anne Hidalgo est créditée de 3% d’intentions de vote dans les catégories populaires, c’est stupéfiant ! Jean-Luc Mélenchon s’en tire mieux avec 12%. Mais il reste derrière Emmanuel Macron, pourtant décrit par certains comme le président des riches (19%). Dans le même temps, Marine Le Pen est créditée de 43%.

Comment cette situation s’explique-t-elle ?

La gauche ne parle plus aux « nouveaux prolétaires » tels que les intérimaires, les livreurs, les smicards de la France périphérique. En concentrant son discours sur les questions sociétales elle a oublié une chose : les Français les plus pauvres veulent augmenter leur pouvoir d’achat, disposer d’un meilleur logement, bénéficier de la méritocratie républicaine ou du droit à vivre en sécurité. Ce n’est pas avec des tracts en écriture inclusive et la promotion de la décroissance que la gauche améliorera son attractivité. En fait, le RN prospère car la gauche a abandonné ceux qui croyaient en elle. En examinant ce sondage, il est frappant de constater que le PS et EELV réalisent leurs meilleurs scores chez les cadres et professions intellectuelles supérieures et chez les jeunes urbains.

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Quel est l’état de l’électorat de la droite traditionnelle ?

En un mot, il est vieux, peu importe le candidat testé. Prenons l’hypothèse Xavier Bertrand : il est à 27% chez les plus de 65 ans mais à 2% chez les moins de 30 ans. Certes, la droite a toujours eu un électorat plus âgé que la moyenne. Mais à ce point-là, c’est du jamais vu. De plus, même si la droite surperforme chez les seniors, Emmanuel Macron a chipé la première place. Cette popularité s’explique de plusieurs manières : les plus âgés sont plutôt pro-UE, attachés à la symbolique du pouvoir et plus modérés que la moyenne. Le président coche toutes les cases.

Sur le papier on peut penser que la situation de LR est enviable : beaucoup d’élus locaux, de députés, 16% d’intentions de vote au niveau national... En réalité, leur électorat comporte une surreprésentation de retraités et les jeunes sont en voie de disparition. Impossible d’incarner l’avenir en se reposant sur les retraités !

De plus, niveau stratégie, LR est dans une tenaille : son aile droite tend à partir chez Marine Le Pen et son aile gauche se tourne vers Emmanuel Macron. Un virage à droite supposerait la perte l’aile gauche, un virage à gauche ferait fuir l’aile droite. Cruel dilemme. Leur meilleur espoir serait qu’Emmanuel Macron disparaisse et que les macronistes de droite rentrent au bercail. Un scénario à moyen terme hypothétique.

Emmanuel Macron capitalise sur le vote de seniors. Qu’en est-il des CSP+ ?

Le Président est toujours performant dans cet électorat, mais il faut prendre ce chiffre avec des pincettes car, pour l’Ifop, la tranche CSP+ correspond à un salaire de plus de 2 500 euros, ce qui ne semble pas le vrai seuil de richesse, n’en déplaise à François Hollande. Sur ce segment, Emmanuel Macron devance la droite. Ce n’est pas un hasard. Mettez-vous à la place d’une CSP+ qui a toujours voté à droite : Emmanuel Macron a supprimé l’ISF alors que la droite promettait depuis dix ans de le faire, il a les codes sociaux de la bourgeoisie (lui-même reconnaît qu’il a un ethos de droite). Pour parler crûment, avec lui, les CSP+ en ont pour leur argent.

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Mais attention, pour la prochaine présidentielle il sera également le candidat des classes moyennes inférieures. Il obtiendrait 24% des voix (soit sa moyenne nationale) chez les Français qui touchent 1300 et 1900 euros par mois.

Quelle est la structure du vote RN ?

Ce n’est pas une nouveauté, dans les catégories populaires elle est très très loin devant les autres et dépasse les 40% chez les ouvriers et les employés. Marine Le Pen semble également progresser chez les salariés du secteur public. Son score chez les jeunes est impressionnant puisqu’elle attirerait pratiquement un tiers des moins de 35 ans. Le RN semble donc le premier parti de la jeunesse. Pas la jeunesse diplômée des grandes villes mais celle de la France dite périphérique. Le vote Le Pen semble également présent dans certaines régions. Ainsi, en Paca, selon un autre récent sondage de l’Ifop, elle récolterait 48% chez les 24-35 ans !

En revanche, le parti est très faible chez les plus de 65 ans (12%) et dans l’agglomération parisienne où il est devancé par tous les partis de gauche. Chez les diplômés du supérieur, elle est à 12% également.

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