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Les médias font trop souvent appel à des pseudo-experts sur les questions d’antiterrorisme.
Les médias font trop souvent appel à des pseudo-experts sur les questions d’antiterrorisme.
©Reuters

Du vent

Malgré la multiplication des médias, bien informer est un métier en perdition. Et quand cela touche à des questions aussi délicates et pointues que celle de l'antiterrorisme, donner la parole à des personnes qui ne connaissent rien au sujet peut finir par s'avérer dangereux.

Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

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Toujours plus stridents et militants, les médias officiels, ou stipendiés du pouvoir à coup de millions d'euros, décrochent du réel en matière d'information et de choix de leurs sources. Exemple, France Info et ses "experts en terrorisme". Naguère, cette radio matraquait les délires d'un mythomane - aujourd'hui ridiculisé - prétendant rencontrer, au bistrot du coin, ces émirs de l'Etat islamique célèbres pour égorger tout infidèle passant à leur portée.

Or pas échaudée du tout, France Info nous "vend" désormais fièrement un besogneux zigoto de l'anti-terrorisme comme "ancien de la DGSE", service où il n'a jamais mis les pieds (ce qu'une simple vérification aurait illico révélé).

Pour un média d'information continue, un tel manque de contrôle inquiète ; tout comme le fait qu'une radio "du service public" fasse désormais la seule propagande d'un "gauchisme culturel" naguère assassiné par le sociologue Jean-Pierre Le Goff, du CNRS. Un toxique cocktail de moralisme, de bons sentiments, d'indignations, d'antifascisme onirique et de prosternations devant diverses minorités et groupes de pression, qui provoque bien sûr l'aveuglement et bloque tout accès à la réalité du crime et du terrorisme.

Autre cas de phobie du réel, cet article du Monde du 26 mars dernier, sur les "nouveaux chiffres de la radicalisation", effrayant empilage de contresens politiquement corrects. On y lit que "le phénomène de radicalisation [islamiste, rappelons-le...] n'a rien à voir avec la religion"... On y déplore que nombre des signalements "concernent de jeunes relégués issus des quartiers sensibles"... Des bombes humaines à la Merah ou Kouachi y deviennent des frustrés "en quête de revalorisation narcissique", désireux de sortir de l'anonymat...

Ainsi, en période dangereuse et sur de cruciaux thèmes stratégiques, l'usage d'ignares néophytes, de militants ou d'"experts" recrutés au petit bonheur par des stagiaires, tous semblant perdus "dans le brouillard des intentions confuses et des projets avortés" (Boris Pasternak), doit-il tout autant préoccuper les citoyens que les dirigeants politiques.

Car au fond, que demander aux médias - surtout aux médias "chauds" ? De produire des diagnostics un peu sérieux en s'abreuvant aux sources - elles existent - pouvant les informer utilement.

Insistons ici sur la difficulté - et l'immense mérite - qu'il y a à informer l'opinion, surtout dans un Etat démocratique où le courage civique est un décisif rempart.

Ceux chargés de cette cruciale mission savaient naguère, pour parler comme l'historien allemand contemporain Jürgen Osterhammel, maîtriser "d'immenses armées de faits concrets". Lucides et réalistes, ces journalistes flairaient les contradictions aussi bien que les connexions. Les lire permettait de comprendre.

Or ces temps sont révolus. Agents zélés de milliardaires souvent glauques, ou militants gauchistes en livrée du "service public", les néo-acteurs de l'information s'extasient tous devant la "diversité" - sauf dans leurs propres rédactions, où s'agitent d'identiques clones jonglant avec trois portables.

Les observer renvoie à l'avertissement lancé par l'expert (lui, un vrai) Xavier Guilhou, dans l'excellent bulletin de géopolitique de l'Ecole de management de Grenoble : "La prééminence du parti-pris idéologique efface complètement chez certains la perception des réalités économiques, historiques, juridiques, géographiques ou culturelles. Et peu à peu, se profile le risque d'un enfermement dans une nasse mentale...".

Une nasse mentale de laquelle ces médias d'information devraient s'efforcer de sortir, sous peine de sombrer dans l'insignifiance et le discrédit.

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