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Primaire PS : 
la com' des candidats au rayon X
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Chacun sa recette

Discours, gestes, attitudes, autant d'éléments qui en disent long sur la personnalité et la stratégie des candidats à la primaire socialiste. Analyse d'un "profiler".

Jean Hubert

Jean Hubert

Jean Hubert est le pseudonyme d'un négociateur de crise.

 

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La primaire citoyenne révèle les idées politiques de chaque candidat bien-sûr, mais surtout leur personnalité. Le deuxième débat télévisé de ce mercredi devrait une nouvelle fois mettre en avant l’individualité de chacun d’eux. Analysons les forces et faiblesses de leur mode de communication, par ordre alphabétique.

Martine AUBRY

Elle est dans l’empathie. Elle se met à la place des Français qui ont peur et cherche à les rassurer grâce à des perspectives rationnelles. En effet, son lexique exprime la structure et la réalité des faits. Elle s’exprime de manière directe, sans détour ni métaphore symbolique.

Son expression orale est calme et rassurante, elle semble sereine. C’est d’ailleurs la candidate qui semble maîtriser le mieux la communication médiatique. Quant à sa communication non-verbale, la gestuelle par la partie gauche de son corps exprime a priori la sincérité. Elle utilise des gestes illustrateurs en corrélation avec ses propos. Par exemple une main ouverte lorsqu’elle parle d’ouverture, le poing serré lorsqu’elle exprime une notion de fermeté, ou encore des mouvements liés au rassemblement ou à la projection dans l’avenir.

Par son comportement, elle dégage l’image d’une femme politique honnête. Par son discours, elle cherche à paraître incorruptible, aussi bien moralement qu’idéologiquement.

Bien qu’assumée, elle souffre toutefois d’une image austère qui la dessert en terme de force fédératrice et séductrice, même s’il semble qu’elle soit bien différente hors caméra. Son vocabulaire manque souvent de symboles et de formulations fédératrices. Elle semble rétive aux discours idéologico-philosophico-émotionnels et préfère s’en tenir aux faits, qu’il s’agisse de constats ou de solutions potentielles. D’autre part, elle se sert de la comparaison avec les «échecs de la Droite» afin de dégager ses propres propositions, ce qui implique une forte vision stratégique, mais aussi qu’elle ait sûrement construit son programme en fonction des réalisations de la Droite. Elle utilise rarement le « je », et préfère le « nous ». C’est un vocabulaire que l’on peut interpréter de deux manières : soit elle cherche à fédérer et à passer outre la campagne individuelle de manière à transmettre aux électeurs l’image d’un groupe socialiste soudé et entier ; soit elle ne s’identifie pas en tant que personne dans l’engagement du processus électoral, en d’autres termes, elle se présente certes, mais n’aurait peut-être pas l’engagement personnel et l’ambition intimes du pouvoir. Elle veut « représenter », et non « incarner ». Elle ne cherche pas à « être », mais à « faire ». Nous pouvons estimer, comme de nombreux observateurs politiques d’ailleurs, qu’elle « subit » la primaire, et que dans une certaine mesure, elle aurait sûrement préféré seconder quelqu’un d’autre (DSK ?).

Jean-Michel BAYLET

Il bénéficie de l’image du père. Son âge, son physique, sa voix grave, et bien sûr ses références politiques mettent en avant l’image du vieux briscard à qui on ne la fait pas. Sa force de communication repose sur les idées des radicaux qui « ont toujours été novatrices », et le détachement volontaire des autres candidats socialistes. Il est de fait l’outsider, et cherche à être «le dominant». Il use donc d’une communication radicale.

Il souffre cependant d’un manque de notoriété qui le pousse à affirmer ses idées de manière parfois abrupte, ne laissant que peu de place au dialogue. Ses interventions sont riches, complexes et techniques, par conséquent sa communication perd en efficacité et en facteur fédérateur. On peut penser qu’il a plus l’expérience des débats techniques que médiatiques. Il inspire les valeurs anticonformistes des radicaux et la technicité de son savoir, mais son discours manque d’ouverture et d’impact charismatique. Son langage non-verbal est réduit et sans ampleur. Il semble être dans le contrôle total, sans spontanéité émotionnelle.

François HOLLANDE

Il insiste sur les points rationnels qui permettront d’instaurer le changement. Il met les Français face à l’urgence d’un changement radical. Il incarne l’autorité mais parvient à l’allier à la proximité et l’accessibilité (voir son mode de communication naturel avec les électeurs lorsqu’il les rencontre dans la rue par exemple). Il utilise le lexique de l’espoir et de la projection dans l’avenir. Sa communication non-verbale est ample, elle dégage conviction et charisme.

Ceci étant, il dégage l’image d’une personnalité influençable, et dont l’entourage direct joue un rôle important dans la constitution de son personnage politique et ses prises de décisions. Certaines fuites de comportement trahissent parfois des sentiments de peur ou de doute, notamment lors d’interventions non préparées pendant lesquelles son visage change complètement face à des questions incisives. Son vocabulaire manque parfois de richesse argumentaire, comme s’il ne pouvait aller plus loin que ce qu’il a préparé en amont. Il n’est pas rare de le voir se laisser aller au gré du flot, plutôt que de contrôler la discussion. Son langage para-verbal manque certainement de force et rigidité pour instaurer son propre rythme. Il semble parfois subir les conversations. Il inspire l’ambition d’incarner une idéologie fédératrice, peut-être au détriment de sa forte sensibilité émotionnelle.

Arnaud MONTEBOURG

Il cherche à s’identifier aux Français par son enfance et son éducation, ses origines culturelles et sociales. Son discours est d’abord axé sur son propre profil, avant son programme. Il veut «être». Il veut « incarner », et pas « représenter ». Il cherche à exister en tant que personne.

Comme la plupart des personnalités politiques, il accentue le symbole, l’idéologie, et l’énergie d’idées novatrices.

En revanche, son discours est franc et massif, et dénote une tonalité de conquête et d’affrontement. Son para-verbal témoigne souvent de ce besoin de confrontation, voire de révolte, notamment lorsqu’il est poussé dans ses retranchements. Son expression non-verbale quant à elle marque l’attente de la confrontation. En effet, il n’est pas rare de le voir se repositionner après qu’il ait exprimé une idée, comme s’il se re-préparait à une nouvelle joute. Ce comportement implique une forte stratégie et une vision structurée des débats et des idées à exprimer.

Ségolène ROYAL

Son discours est idéologique et très fédérateur. Elle utilise en effet un verbal lié à la projection d’un idéal. Elle est dans le « logos », c’est-à-dire la symbolique. Les termes « espérance, bien-être, possible, trajectoire, réaménagement » sont très fréquents dans ses discours, même lorsqu’il s’agit de réponse à une question très concrète et technique.

Elle est également dans l’empathie et l’identification de la France populaire. Elle cherche par exemple à toucher l’électeur qui ne dispose d’aucun « piston », d’aucun « contact pour l’aider dans son avenir » (sic). Elle cherche à dégager l’image de quelqu’un d’honnête et inspirant l’espoir.

Elle s’exprime de manière structurée et hiérarchique. Il serait amusant de calculer le nombre de « et donc » qu’elle utilise. Par exemple « la solution est de relancer le système économique, donc les aides financières aux PME (…) et donc la deuxième décision que je prendrai sera la création d’une banque publique», exprime une représentation causale de ses schémas de pensée.

Elle souffre cependant de crédibilité décisionnelle. Elle s’exprime parfois avec maladresse lorsqu’on la bouscule, comme si elle n’était à l’aise qu’avec ce qu’elle avait préparé. Nombreuses sont les questions des journalistes auxquelles elle met du temps à répondre, souvent de manière détournée d’ailleurs. Elle esquive souvent la technicité d’une question par une approche symbolique ou philosophique, lors d’interventions non préparées. Bien que son langage para-verbal soit monocorde, il dégage parfois des sentiments de surprise. Les fortes variations de tonalité dans les aiguës trahissent les émotions ressenties au moment de l’expression. Sa communication non-verbale quant à elle trahit l’appréhension. Elle redoute peut-être la remise en cause de son statut et de sa légitimité. Elle souffre possiblement d’un manque de confiance en son propre personnage politique, et préfèrerait sûrement qu’on l’apprécie pour ce qu’elle est en tant que personne, et non en tant que personnalité.

Manuel VALLS

Il use d’un discours revendicatif et rationnel. Il interpelle l’électeur à titre individuel (« la dette nationale revient à 24 000€ par Français »). Son mode de communication est basé sur deux axes : s’adresser à l’individu plutôt qu’à la masse, et user de formules incisives. Il fait valoir son jeune âge, son dynamisme et son engagement, et cherche à insuffler une énergie différente des autres candidats. Ses idées politiques se détachent d’ailleurs de celles des autres. Son expression orale est claire et énergique, ses messages passent donc très bien. Sa communication non-verbale est simple mais sincère, il semble qu’il soit convaincu de ses idées. Là encore, il s’exprime avec la partie gauche de son corps, ce qui témoigne a priori de la sincérité.

En revanche, son discours est froid et parfois agressif. Il remet en cause le système avec vigueur et engagement, laissant paraître une personnalité guerrière et ambitieuse. Il semble être dans le besoin d’exister au sein des autres, notamment au regard des plus âgés.

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