Présidentielle 2022 : le logement, une grenade dégoupillée au cœur de la campagne ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Des immeubles d'habitation et de bureaux à Paris.
Des immeubles d'habitation et de bureaux à Paris.
©©JOEL SAGET / AFP

Bombe sociale

Dans une note pour le think tank Real Estech intitulée « Le logement, bombe sociale à venir », Robin Rivaton estime que le logement devrait trôner en haut de la liste des politiques publiques.

Robin Rivaton

Robin Rivaton

Robin Rivaton est chargé de mission d'un groupe dans le domaine des infrastructures. Il a connu plusieurs expériences en conseil financier, juridique et stratégique à Paris et à Londres.

Impliqué dans vie des idées, il écrit régulièrement dans plusieurs journaux et collabore avec des organismes de recherche sur les questions économiques et politiques. Il siège au Conseil scientifique du think-tank Fondapol où il a publié différents travaux sur la compétitivité, l'industrie ou les nouvelles technologies. Il est diplômé de l’ESCP Europe et de Sciences Po.

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Atlantico : Vous avez publié une note pour le think tank Real Estech intitulée « Le logement, bombe sociale à venir ». Quelle est cette bombe sociale ? Comment le logement peut-il en être le détonateur ?


Robin Rivaton : Le logement devrait trôner tout en haut des politiques publiques. Il est le principal poste de dépense des Français et, parce qu’il est dynamique, impacte lourdement le pouvoir d’achat. En moyenne, les Français consacrent un peu moins de 20% de leurs revenus aux dépenses de logement, à savoir les loyers, les remboursements d’emprunt et les charges, déductions faites des aides au logement. Ce budget était de 16% en 2000. Le logement est responsable de l’état maussade de l’opinion publique en dépit des bonnes nouvelles économiques. 

Le logement peut être une bombe sociale potentielle, avec une crise sociale sous-jacente. Mais il n’y a pas la mèche, pas l’évènement qui pourrait être l’élément déclencheur d’une contestation violente comme a pu l’être la hausse du prix de l’essence pour les Gilets Jaunes. Certains pourraient, de manière assez cynique, se dire qu’il faut du temps avant que le manque de logements ne se traduise en contestation. Les gens se serrent, partagent les appartements, paient plus cher. Après tout, n’est-ce pas ce qu’acceptent docilement les Britanniques qui paient leurs loyers à la semaine, s’entassent dans les sous-sols, prennent des chambres en couple en colocation ? Si l’événement qui pourrait servir de déclencheur à cette bombe sociale en question n’est pas encore évident, la colère gronde chez nous.

Dans quelle mesure la question du logement a-t-elle un impact sur tous les plans de la vie des Français ?

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Le logement est au cœur de nos vies. Il aiguillonne les salaires et réduit donc la compétitivité de nos industries, absorbant les augmentations de salaire. Le logement est une réserve de valeur et en cela assure tout autant la constitution du patrimoine que la reproduction des inégalités. C’est d’ailleurs la difficulté d’accès à la propriété – le taux de propriétaires stagne dans notre pays depuis 15 ans alors qu’il n’a cessé d’augmenter dans les autres pays développés – alors qu’une petite partie de la population a pu quant à elle bénéficier de la baisse des taux d’intérêt pour accumuler les propriétés. Enfin la taxation de l’immobilier est directement lié à l’aménagement du territoire et reflète les déséquilibres territoriaux autant qu’il les exacerbe. A l’intérieur des logements, la suroccupation pèse sur la fécondité, si les jeunes ne peuvent pas quitter leurs parents, ils se mettent en couple plus tard et abandonnent la possibilité d’un troisième enfant comme elle participe à la diffusion des pandémies. La violence conjugale prospère lorsque des couples divorcés ne peuvent décohabiter.

Comment expliquer que le logement soit si peu une préoccupation politique, y compris dans cette période de campagne présidentielle ?

Le logement est au cœur de nos vies. Il est aux marges de la politique. La campagne présidentielle de 2022 ne se gagnera pas sur le logement. J’y vois deux raisons. D’une part il n’y a pas de réponse facile, baguette magique ou pensée hétérodoxe à laquelle personne n’aurait pensé auparavant. La réponse est nécessairement complexe, technique, experte. D’autre part, c’est une politique publique transpartisane. Alors certes certains essaieront de stigmatiser les propriétaires ou les rentiers, d’autres fustigeront la norme ou le poids du secteur social, une partie tentera d’opposer les élus locaux et les promoteurs mais dans l’ensemble l’objectif de bien loger les Français est partagé par tous. 

Est-il encore possible de proposer des solutions pour éviter l’éclatement de la bombe ? En quoi vos dix propositions peuvent-elles aider ? 

Oui je pense qu’il est possible d’avoir des propositions qui soient un discours politique. Il faut d’abord construire. D’ailleurs, la plupart des Français (62%) estiment qu’il n’y a pas assez de logements en France, seuls 12% considérant qu’il y en a trop. Le détenteur final du pouvoir d’urbanisme, c’est l’élu local. Il faut donc l’aider à construire. D’abord en passant à une pré-approbation des autorisations de construire. Si un projet répond au critère du plan local d’urbanisme, il doit être pré-approuvé. On inverse alors le schéma actuel, qui dit que tout ce qui n’est pas autorisé est interdit en stipulant que ce qui n’est pas interdit est autorisé. Ensuite, il faut leur donner plus des ressources propres, ressources propres que la disparition de la taxe d’habitation a obérées. Cela passe par une refonte de la fiscalité immobilière, c’est-à-dire la taxe foncière, les droits de mutation à titre onéreux et l’impôt sur la fortune immobilière, en un impôt unique, sur le patrimoine, progressif, de 1% et 1,5% et qui s’appuierait sur la valeur nette des biens (valeur d’acquisition moins la dette). Ce qui bénéficierait aux ménages qui viennent d’acheter plutôt qu’à ceux qui en héritent, puisqu’il n’y a pas de dettes pour ces derniers. Une large partie de cet impôt serait reversé par péréquation aux villes qui construisent pour conduire une réelle politique d’aménagement du territoire. 

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