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Pourquoi vous ne devriez pas toujours faire confiance à votre banque
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Bonnes feuilles

Vos économies sont-elles vraiment à l’abri à la banque ? Votre banque mérite-t-elle vraiment votre argent ? Rien n’est moins sûr dans la conjoncture actuelle et il est dans votre intérêt de le vérifier avant de lui faire crédit. Extrait de "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?", de Simone Wapler, chez Ixelles Editions (1/2).

Simone Wapler

Simone Wapler

Simone Wapler est rédactrice en Chef des Publications Agora (analyses et conseils financiers).

Elle est l'auteur de "Comment l'Etat va faire main basse sur votre argent: ... et ce que vous devez faire pour vous en sortir !", paru chez Ixelles Editions en mars 2013.

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Qui est vraiment votre conseiller financier ?

Une étude Deloitte conduite en mars 2013 rapporte que seulement 30 % des personnes interrogées pensaient que leur banque avait à cœur l’intérêt du client.

« Un employé de banque sur six ne rechignerait pas à commettre un petit délit d’initié pour empocher 10 M$, un sur quatre a été témoin d’une faute professionnelle, et près d’un sur trois est convaincu que, pour réussir dans le métier, il faut faire abstraction de l’éthique, voire de la loi.

Le meilleur moyen de progresser dans la hiérarchie de Goldman Sachs, c’est de convaincre les clients d’investir dans les produits dont nous essayons de nous débarrasser car ils n’ont pas beaucoup de potentiel de profit. » (Extraits de « Banque, éthique et principe de bonne gestion », L’Observateur de l’OCDE, n° 294.)

L’AMF a procédé à des visites mystères, un agent se faisant passer pour un client amateur de risque ou au contraire désireux de sécurité. Conclusion de l’AMF : pas de propositions commerciales manifestement inadaptées, même si celles-ci sont parfois guidées par l’offre de produits en cours. En revanche, les placements proposés sont présentés sous leur meilleur jour, les inconvénients et les frais étant partiellement passés sous silence.

Ne croyez pas que personne ne se rebiffe face à cette dérive. De plus en plus de clients – particuliers aisés,entreprises, collectivités territoriales – traînent leurs banques en justice et obtiennent gain de cause.

La multiplication des litiges

La plupart des clients reprochent à leur banque de les avoir poussés dans des montages complexes à base de produits dérivés qui le plus généralement s’appuient sur des écarts de taux d’emprunt ou de change.

Ainsi un propriétaire immobilier frontalier s’est vu proposer par l’UBS un habile montage avec un prêt en francs suisses à un taux d’emprunt inférieur à celui qu’il aurait obtenu en euros. Le prêt était gagé par deux contrats d’assurance-vie en euros. Seul inconvénient, le prêt redevenait exigible si la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie descendait en dessous de la somme prêtée, ce qui bien sûr arriva… Une société cotée, commerçant essentiellement en dollars, a attaqué la Deutsche Bank et la Royal Bank of Scotland pour avoir perdu 30 M€ dans un montage complexe lié aux effets de change. La Société générale a été condamnée à indemniser la société minière calédonienne SMGM qui souhaitait se protéger contre un risque de baisse des cours du nickel. En Allemagne, c’est le papetier Ille Papier Service qui attaque la Deutsche Bank. Selon Les Échos43, Deutsche Bank a déjà passé 630 M€ pour risques juridiques au deuxième semestre 2013 ; la Société générale affiche une perte de 109 M€ au premier semestre et a provisionné 200 M€ pour d’autres litiges. À l’origine de la plupart des cas, des produits dérivés44 mais aussi des conflits d’intérêts entre la banque et son client. Dexia et ses prêts aux municipalités donne aussi de multiples exemples de cette dérive financière.

D’autres clients reprochent le simple défaut de conseil, comme ce particulier à qui son conseiller de la Banque populaire avait fait souscrire 600 actions Natixis entre 2006 et 2007 pour un montant total de 10 290 €. En 2010, ce client les revend avec une moins-value de 8 292 €. La cour d’appel de Grenoble a condamné la Banque populaire des Alpes à indemniser son client de 5 800 € pour défaut de conseil. Le client n’avait pas été averti des risques et Natixis était une filiale en perdition de la BPCE45.

Même dans les affaires les plus simples, il semblerait que l’incompétence et l’impunité règnent, comme en témoigne le calcul des intérêts sur les prêts. Les intérêts composés sont le b-a ba de l’activité de la banque. Pourtant les banques se sont trompées en calculant le TEG ou le TAEG. Le taux effectif global ou le taux actuariel effectif global permettent d’afficher le coût total d’un prêt – immobilier dans le cas du TEG et à la consommation dans le cas du TAEG – et donc de comparer les offres. Fin 2013, Les Expertiseurs du crédit, une société indépendante, repéraient que 50 % des crédits immobiliers comportaient un vice de forme. Pour l’Asso-ciation française des usagers des banques (AFUB), 70 % des prêts sont entachés d’erreurs de calcul. Si l’erreur est supérieure à un dixième de point, soit 0,1 %, la loi dit qu’en cas de faute reconnue de la banque, c’est le taux d’intérêt légal en vigueur au moment du prêt (0,04 % en 2013) qui s’applique alors. Bref, une erreur de la banque qui peut faire que votre crédit immobilier ne vous coûte presque plus rien… Plus fort encore, Dexia omettait purement et simplement cette mention de TEG dans ses contrats de prêts aux collectivités locales.

Si par malheur les emprunteurs se bousculent au portillon de la justice, c’est pratiquement 50 % à 70 % des prêts qui seront révisés et accordés gratuitement. En principe, il est très rare que les emprunteurs reviennent contester en engageant des frais de procédure devant les tribunaux. Il faut qu’ils soient déjà pris à la gorge. Mais le réseau va jouer à fond pour désamorcer tout litige avec les emprunteurs avisés. Une loi, rapidement ficelée et votée le 19 décembre 2013, va permettre de se couvrir de certaines erreurs passées 46 :II. – Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les contrats de prêt et les avenants à ces contrats conclus antérieurement à la publication de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale, en tant que la validité de la stipulation d’intérêts serait contestée par le moyen tiré du défaut de mention du taux effectif global prescrite par l’article L. 313-2 du code de la consommation, dès lors que ces contrats et avenants indiquent de façon conjointe :

1° le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ;

2° la périodicité de ces échéances ;

3° le nombre de ces échéances ou la durée du prêt.

III. – 1° Après l’article L. 313-2 du code de la consommation, il est inséré un article L. 313-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 313-2-1. – Lorsqu’un contrat de prêt conclu entre un établissement de crédit et une personne morale mentionne un taux effectif global inférieur au taux effectif global déterminé comme il est dit à l’article L. 313-1, l’intérêt conventionnel reste dû par l’emprunteur, mais celui-ci a droit au versement par le prêteur de la différence entre ces deux taux appliquée au capital restant dû à chaque échéance. »

« Personne morale » signifie des entreprises, donc des SCI (sociétés civiles immobilières) ou bien des collectivités locales et certains établissements publics.

Les codes devenant complexes et le législateur aimant les phrases à rallonge, une traduction ne fera pas de mal. Un contrat de prêt est donc valable si y figurent le montant, le principal, les intérêts, la périodicité des échéances et leur nombre OU la durée. Au moins, comme ça, les banquiers sont sûrs de ne pas se tromper car avec le nombre ET la durée, on pourrait toujours faire une erreur, n’est-ce pas ? Jusque-là, tout va bien, qui se plaindrait d’un petit choc de simplicité ? Mais il y a plus fort, les banques ont essayé une entourloupe, elles voulaient rester impunies, même après avoir violé le code de la consommation. Pour cela, le lobby avait concocté un article 60 rétroactif dans le projet de loi de finance pour 2014 qui prévoyait que le petit choc de simplicité s’appliquerait rétroactivement et que tous les prêts déjà signés étaient valables. Mais finalement, le 31 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a retoqué ce point.

En tout état de cause, il est prévu d’indemniser les victimes de ce vol légal avec un fonds de lutte contre les « risques bancaires systémiques », fonds évidemment alimenté par les victimes des banques et les contribuables. L’État protège les victimes en les taxant et assure l’impunité des coupables.

Extrait de "Pouvez-vous faire confiance à votre banque ?", de Simone Wapler, chez Ixelles Editions, 2014. Pour acheter ce livre cliquez ici

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