Pourquoi "l'échec" du pacte de responsabilité était prévisible (et ça fait longtemps qu'Atlantico l'explique)<!-- --> | Atlantico.fr
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Pierre Gattaz (à droite), Thierry Lepaon (à gauche) et François Hollande (au fond).
Pierre Gattaz (à droite), Thierry Lepaon (à gauche) et François Hollande (au fond).
©REUTERS/Kenzo Tribouillard/Pool

Faillite du système

Alors que la mobilisation sociale des patrons a débuté lundi 1er décembre, Emmanuel Macron a estimé ce mardi 2 décembre que le pacte de responsabilité était un échec et que c'était aussi celui de Pierre Gattaz.

Le pacte de responsabilité ? "Un échec" a estimé ce mardi 2 décembre Emmanuel Macron. Le ministre de l'Economie a pointé l'absence d'accords sur l'emploi dans la plupart des branches. Accords sur l'emploi qui devaient faire office de contrepartie aux versements du Crédit d'impôt compétitivité emplois (CICE) de 40 milliards et des baisses de charges sur les salaires applicables à partir de janvier 2015. Ce pacte de responsabilité annoncé le 14 janvier 2014 par François Hollande lors de ses vœux aux Français, se voulait en effet "fondé sur le principe simple : moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur [les] activités [des entreprises] et, en même temps, une contrepartie, plus d’embauches et plus de dialogue social."

Un peu moins d'un an plus tard, sur la soixantaine de branches professionnelles existantes, selon Les Echos, 6 n'ont même pas encore entamé de négociations, 19 "ont manifesté la volonté de le faire", 10 ont tenu une première séance de travail. "Et seules 15 ont engagé des négociations sérieuses, dont 2 ont signé un accord (la chimie et la métallurgie)", écrivent Les Echos.

Dès le mois de janvier dernier pourtant, de nombreuses analyses avaient mis en garde contre le pari du gouvernement. D'abord pour sa logique "du donnant-donnant, d’une économie administrée maniant la carotte et le bâton", plutôt qu'une approche fondée sur des diagnostics à partir desquels déduire les mesures appropriées. C'est ce que suggérait Jean-Charles Simon, économiste et lui-même entrepreneur. Dans cette même analyse, il revoyait d'ailleurs à la baisse des charges pour les entreprises. Quand le gouvernement annonçait 30 milliards de baisse de charges, lui les estimait à haute de 10 à 15 milliards.

>>> Pour en savoir plus : 1,8 million d’emplois créés par le pacte de responsabilité ? Ce que les 10 à 15 milliards de baisse de charges réelle pour les entreprises (et non 30…) pourront permettre

Outre la "logique mafieuse" du pacte, celui-ci révèle avant tout une "absence de pensée économique". En creux, le pacte de responsabilité sous-tend qu'en échange d'abaissement de charges, "les entrepreneurs embaucheraient plus de monde pour produire la même quantité de biens à l'arrivée," faisait remarquer Charles Gave, président de l'Institut des libertés.

>>> A lire également :Pourquoi le pacte de responsabilité ne vaut pas mieux qu'un chantage mafieux

Car le problème de la France n'est pas un problème de production mais bien de demande. Comme l'a montré Nicolas Goetzmann, responsable du pôle économique d'Atlantico, en analysant les données de l'Insee, la France possède les capacités de production mais ces dernières sont inexploitées. Et la demande, "elle est partout atone quand elle n’est pas étranglée", estimait il y a plusieurs mois Gérard Thoris, économiste. Les ménages sont défiants et les exportations contraintes par la situation européenne. "Cette demande atone est étranglée par une politique de rigueur qui n’a pas fini de toucher les classes moyennes sous la forme aujourd’hui d’impôts supplémentaires et, demain, de services publics en moins. Sous cet angle, il n’y a pas de raison que l’investissement reprenne aussi longtemps que le taux d’utilisation des capacités de production restera faible (80 % en décembre 2013 contre 85 % en moyenne depuis 1996)", nous expliquait-il. Aujouter à cela, le temps qu'a mis le gouvernemnt à considérer la déflation comme un risque.

>>> Lire son article :Pourquoi la conjoncture condamne le pacte de responsabilité

Dans un tel contexte, une baisse des charges ne pouvait et ne peut toujours pas produire l'effet attendu, à savoir la création d'emplois. D'autant plus que la méthode choisie, le "dialogue social" ou plutôt la faiblesse du dialogue sociale a laissé dès le départ peu de chance à ce pacte. "De façon tout à fait caractéristique, c’est un pacte que le président de la République a proposé d’abord aux entreprises, et non un pacte social élaboré par et entre les partenaires sociaux," a jugé Eric Verghaeghe.

>>> Pour aller plus loin : Quelles probabilités le pacte de responsabilité a-t-il vraiment d'aboutir ?

Et nous n'étions pas les seuls à vous l'avoir dit car au mois de juin, Bercy désavouait déjà le pacte, chiffres à l'appui. Les prévisions du ministère des Finances ont été rendues public par le rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014 qui indique : 

"Le plan d’économies de 50 milliards d’euros proposé par le Gouvernement pour la période 2015 à 2017, soit une réduction des dépenses de plus de 2 points de PIB, aurait ainsi un impact négatif sur la croissance de 0,7 % par an en moyenne entre 2015 et 2017, et pourrait entraîner la suppression de 250 000 emplois à horizon 2017. "

Ce même rapport estime néanmoins que "l’impact récessif du plan d’économies sera contrebalancé par les effets positifs des mesures de relance programmées dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité et du CICE. (Crédit impôt pour la compétitivité et l’emploi)  Comme précédemment mentionné, ce pacte aurait pour effet, hors financement, de rehausser l’activité de 0,6 point à horizon 2017 et de créer 190 000 emplois."

Au final, 190 000 emplois crées par le volet "baisse de charges", 250 000 emplois détruits par le volet "réduction des dépenses", pour une perte totale de 60 000 emplois d'ici à 2017.

>>> A lire également :Le pacte de responsabilité désavoué par les calculs de Bercy

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