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Plus fort que le BitCoin, Facebook crée sa propre monnaie mais franchit la ligne jaune de la souveraineté monétaire des Etats
©Reuters

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Payer son Uber ou son hôtel réservé sur Booking en monnaie Facebook sera bientôt possible. Et ce n’est que le début pour l’entreprise de Mark Zuckerberg qui se lance dans le secteur des services bancaires.

Aude Kersulec

Aude Kersulec

Aude Kersulec est diplômée de l' ESSEC, spécialiste de la banque et des questions monétaires. Elle est chroniqueuse économique sur BFMTV Business.

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Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Mark Zuckerberg cherchait une voie de développement depuis deux ans, il la présente aujourd’hui, aux côtés de David Marcus, le Français débauché un an plus tôt auprès de Paypal. Pour cause, le but était de trouver quelqu’un pour gérer le développement monétaire, un projet pharamineux.  

Depuis que Facebook a été pris en flagrant délit de manipulation, ou même de faciliter la circulation de fake news, sans parler du soupçon de faire commerce avec les données personnelles. Depuis que les craintes de voir les annonceurs partir ailleurs et de voir une perte de revenus, les équipes se sont mises à imaginer de nouveaux gisements de croissance. Et de creuser un filon sur lequel beaucoup lorgnent : la banque et la monnaie.  

Du coup, il sera bientôt possible de retirer de l’argent via les réseaux sociaux, possible de payer avec la monnaie Facebook des VTC Uber ou des achats Amazon. Le défi : lancer une monnaie de paiement qui ne soit pas un objet de spéculation comme le fut le bitcoin, une monnaie qui offre aussi toutes les conditions de sécurité sans passer par les garanties d’un Etat.  

Facebook est donc tout proche de lancer une crypto monnaie au début de l’année prochaine, mais ce qui est encore plus impressionnant, c’est qu’elle a réussi à rallier dans son initiative un grand nombre d’entreprises de la Silicon Valley : Visa, PayPal, Uber, Booking et un représentant français, Iliad, la maison mère de Free. Il pourrait y avoir jusqu’à 100 entreprises intéressées par les sujets, toutes ayant investi un ticket minimum de 10 millions de dollars dans l’affaire.

Le but : créer une monnaie numérique, baptisée Libra (le signe astrologique de la Balance en anglais) pour payer ses achats en ligne et échanger de l’argent entre particuliers. Une monnaie privée qui pourrait bien avoir, en quelque temps, une ampleur inégalée, compte tenu des 2 milliards d’individus qui utilisent Facebook tous les jours sur la planète.

Libra sera donc lancée sous la forme d’une cryptomonnaie, monnaie virtuelle et utilisant la technologie blockchain pour assurer les transactions. La blockchain a la réputation d’être transparente et inviolable, c’est la technologie du futur pour beaucoup de secteurs.

Pour les cryptomonnaies de manière générale, il pourrait s’agir de l’étape tant attendue  de la vulgarisation, celle qui lui permettra d’être connue des masses et d’être vue comme quelque chose de solide.

La cryptomonnaie de Facebook devrait néanmoins se distinguer du bitcoin et d’autres monnaies aussi insolites qui ont pu voir le jour depuis, en répondant aux critiques qui étaient faites sur leur viabilité. De trois façons.

  1. Par la notoriété : Libra sera la monnaie de Facebook, réseau social utilisé par deux milliards d’utilisateurs à travers le monde et disposera donc d’une notoriété inégalée en la matière.

Si le bitcoin – cryptomonnaie la plus connue - avait réussi à se faire un nom, sa création reste un mythe et le nom de son fondateur un pseudonyme. La garantie de valeur sur le bitcoin n’était pas incarnée, donc elle n’était pas assurée.  D’où la spéculation.

  1. Sur l’aspect financier : le cours de Libra dépendra directement d’un panier d’autres monnaies, réelles cette fois : le dollar mais pas seulement, l’euro, la livre etc  Le but affiché est d’éviter une trop grande volatilité, notamment du bitcoin qui a perdu près de 75% en quelques mois sans que les investisseurs ne puissent émettre d’explications solides.

  1. Sur l’aspect institutionnel : le Libra aura une quasi-banque centrale, avec la création d’un Comité d’une vingtaine de membres qui aura pour objectif d’encadrer le taux de change et donc de développer la confiance autour de la monnaie.

 L’entreprise chargée d’assurer cette mission a d’ailleurs déja été créée à Genève. La Suisse, parce que la législation y est réputée plus souple pour le développement des cryptomonnaies. Par ailleurs, Facebook a déjà entrepris les démarches auprès des autorités bancaires européennes pour gérer les paiements et émettre de la monnaie électronique, accordées par l’Irlande pour toute l’Europe en 2016.

Emettre est un bien grand mot parce que Facebook ne créera pas de monnaie comme le fait la Réserve fédérale ou la BCE .. Elle changera des monnaies officielles en Libra.

En fin de compte, Libra devrait, avant même d’être officiellement créée, ce qui est nécessaire au bon fonctionnement de la monnaie, gagner la confiance.

Et c’était tout ce qui manquait aux cryptomonnaies : qui, pour garantir leur validité ? On ne paie en dollars ou en euros que parce qu’on a confiance en la valeur de la pièce, garantie par une banque centrale et qu’elles sont acceptées par les commerçants.

Le Libra s’achètera comme du dollar ou de l’euro et sera admis comme moyen de paiement par toutes les plateformes qui acceptent cette monnaie, qui devraient être nombreuses aux vues des entreprises ayant participé au projet. Certains observateurs vont même jusqu’à dire que Facebook installera des distributeurs de jetons physiques qui pourront être échangés auprès des banques commerciales ou utilisés comme moyen de paiement au sein des commerces physiques. A terme, Mark Zuckerberg espère rentabiliser son activité en proposant d’autres services bancaires d’une banque traditionnelle, par exemple le crédit.

Il n’y a qu’un pas pour que Facebook ringardise toutes les fintechs, l’industrie bancaire et les Etats d’un seul coup.

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