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Pas de baby-boom en Chine malgré la fin de la politique de l'enfant unique : le début du déclin est là
©Reuters

Des efforts pour rien

En 2015, le taux de natalité chinois s'élevait à 12,1 naissances pour 1 000 habitants, alors qu'il était de 21 naissances pour 1 000 habitants en 1960. Un chiffre qui se rapproche du taux de natalité italien et japonais, établi à 8 naissances pour 1 000 habitants selon les données de la Banque mondiale.

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico : Plus d'un an et demi après la fin de la politique de l'enfant unique en Chine, les premiers chiffres émanant des enquêtes de population annuelle réalisées par les administrations provinciales révèlent qu'aucune hausse significative de la natalité n'a été observée depuis. Comment peut-on interpréter ce faible taux de la natalité en Chine à l'heure actuelle ? Quelles en sont les causes ?

Emmanuel Lincot : Rappelons tout d’abord que la population chinoise reste la première au monde avec 1 milliard 357 millions d’habitants (recensement de 2013) et que nombre d’experts estiment que la fin de la politique de l’enfant unique permettra d’ici 2019 la naissance de 50 millions d’enfants supplémentaires. C’est toutefois un chiffre insuffisant pour enrayer le vieillissement accéléré de la population chinoise.

Plusieurs facteurs  expliquent ce phénomène : l’enrichissement général de la population tout d’abord. Atteindre un certain seuil de bien-être matériel prévaut sur toute autre considération et d’entre toutes, assumer le renouvellement des générations futures. Ne sous-estimons pas non plus le coût, en constante augmentation, que représente la scolarisation d’un enfant. Dans un pays où le système de sécurité sociale est pratiquement inexistant, ces sacrifices sont de plus en plus difficilement acceptés. Enfin, le faible taux de natalité est peut-être un indicateur conjoncturel sur l’incertitude que connaît la Chine concernant son développement économiquemais aussi le contexte environnemental qui est catastrophique. Nombre de couples vivant dans les villes refusent tout simplement de mettre au monde un enfant dans une société aussi polluée, donc dangereuse.

D'un point politique, économique et social, quelles sont les conséquences du ralentissement démographique chinois ?

J’y vois malgré tout plusieurs conséquences positives : la baisse des avortements due à la réglementation ; de même que le déséquilibre entre les sexes devrait être affecté positivement. Mais globalement, les plus de 65 ans, qui représentent aujourd’hui à peine plus de 10 % de la population, seront 18 % en 2030. A l’horizon de 2050, le nombre de seniors devrait dépasser le quart de la population, comme au Japon aujourd’hui. Bref, selon la formule déjà bien connue "la Chine sera certainement vieille avant de devenir riche". C’est un problème grave et qui sera sans doute abordé lors du XIX° Congrès du PCC à l’automne prochain car concrètement, dans les décennies à venir, le financement des retraites et le poids grandissant des dépenses de santé pèseront de plus en plus sur l’ensemble du système. Les troubles encourus remettraient en cause la légitimité du Parti.

Face à ce qui apparaît être un échec de la fin de la politique de l'enfant unique sur la natalité chinoise, quelles autres solutions les autorités pourraient-elles mettre en oeuvre ? 

Le risque serait un désengagement de l’Etat au profit d’une privatisation grandissante des services de soins et de sécurité pour les retraites futures. D’après la démographe Isabelle Attané, à partir de 2030, la population chinoise perdra plus de cinq millions d’habitants chaque année, soit l’équivalent de la moitié de la population de la Belgique. Entre temps, la population de l’Inde, rivale de la Chine, l’aura dépassée. Le problème n’est donc pas que local. C’est un enjeu pour l’avenir même de la puissance chinoise à l’international, vis-à-vis de son rival indien notamment. Une chose est sûre : le poids du nombre pour la Chine deviendra, dans les décennies à venir pratiquement, un mythe. Les autorités recourront-elles à l’immigration pour pallier à ce déficit ? Nul ne peut y répondre pour le moment. En tout cas l’économie n’est pas la seule à s’essouffler….

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