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L'échec de la réforme de la formation des enseignants est loin d'être la seule cause de la médiocrité de notre système éducatif
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Profs au bord de la crise de nerfs

La Cour des comptes vient de pointer les minces économies réalisées et "l'inadéquation de ce dispositif avec la mise en place du socle commun de connaissances".

Roger Célestin

Roger Célestin

Roger Célestin est journaliste.

Il écrit pour Atlantico sous pseudonyme.

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Notre confrère Le Monde (du jeudi 9 février 2012) consacrait son éditorial de Une à la réforme de la formation des enseignants, dite mastérisation, "engagée en 2008 et complètement mise en œuvre à la rentrée 2010, un échec cinglant" pointé par la dernière livraison de la Cour des Comptes. La Cour pointe particulièrement le problème de fond que représente "l'adéquation de ce nouveau dispositif aux grands objectifs assignés au système éducatif", notamment la mise en place du "socle commun de connaissances" que chaque jeune devrait maîtriser à la fin de la scolarité obligatoire. Les gains budgétaires sont "modestes" nous dit Le Monde (370 millions d’euros) et "occultent de lourds coûts indirects non évalués".

A ce stade, tout lecteur moyennement attentif sursaute. D’abord, à force de dénigrer ainsi systématiquement chaque économie réalisable ou réalisée, au prétexte qu’elle serait trop « modeste » (quelle est d’ailleurs la logique qui préside à ce raisonnement étrange ?) on en finirait par ne jamais réduire les dépenses, donc ne jamais améliorer la gestion, en reportant l’effort, à plus tard, toujours plus tard, en visant de plus gros budgets. Donc, bien sûr, économiser 370 millions d’euros (presque 2,5 milliards de francs quand même...) c’est une broutille... Sauf que non. Sauf que l’addition de ces « modestes » économies finit par améliorer significativement le budget. Sauf que cette procrastination nous a amené droit dans le mur de la dette. Sans oublier qu’il est souvent difficile de tailler dans les grandes masses des grosses dépenses.
Ensuite, le concept de coûts qui sont à la fois « lourds » et « non évalués » est, je l’avoue, difficile à comprendre. Car si les coûts ne sont pas évalués, sans même dire « calculés » ou « comptabilisés », on voit mal comment et pourquoi l’éditorialiste du Monde s’autorise à les qualifier de "lourds". Cette manière de procéder pourrait déclencher une accusation de malhonnêteté ou de manipulation. Venant d’un grand journal, que dis-je d’une institution, je penche plutôt pour une maladresse rédactionnelle, qui peut arriver à tout le monde...
Quant à la conclusion catégorique de l’éditorial, elle laisse également songeur. Avec cette réforme qui est un échec (ce qui n’est pas contestable en soi), "La France s’est privée du levier indispensable pour améliorer ses médiocres performances en matière d'éducation", selon Le Monde.
Mais non, mais non ! Pas d’inquiétude ! Si l’on se voulait méchant, ce qui n’est pas ma nature, on écrirait que cela fait bien longtemps que ni les enseignants ni leur formation ne sont un levier indispensable de quoi que ce soit à l’école. L’état de notre système est tellement mauvais et la formation dispensée par les IUFM était tellement en phase avec un modèle dépassé, que ni les élèves ni leurs parents ne s'apercevront que la formation des enseignants a été abandonnée. Et puis, rétablir une formation sans s’attaquer aux causes structurelles des problèmes ne servira à rien.
Les causes des "médiocres performances" sont connues mais jamais traitées au fond. On peut citer notamment l’inadaptation de l’organisation et du fonctionnement des établissements, des parcours, de l’orientation, l’amateurisme des méthodes d’enseignement, l’insuffisance de la présence des enseignants dans les établissements, une rigidité générale et le refus de tout changement au nom de principes bien pratiques pour conserver ses avantages et se voiler la face.
Le Monde est un gentil journal (qui compte beaucoup d’enseignants parmi ses lecteurs...) en parlant de "médiocrité". La réalité c’est, malheureusement, un rapport qualité/coût qui est minable et un dysfonctionnement général installé depuis 40 ans dont les conséquences économiques, sociales et culturelles sont dramatiques.

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