Les villes françaises font machine arrière sur les ZFE<!-- --> | Atlantico.fr
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A l’origine de la mesure, une loi votée en 2021 prévoyait la mise en place de Zones à Faibles Emissions, obligatoires dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, avant le 31 décembre 2024.
A l’origine de la mesure, une loi votée en 2021 prévoyait la mise en place de Zones à Faibles Emissions, obligatoires dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, avant le 31 décembre 2024.
©SEBASTIEN BOZON / AFP

Pour calmer le jeu ?

Après avoir tenté d’imposer les zones de faible émission dans les principales villes françaises, en y bannissant l’entrée des véhicules les plus polluants d’ici 2025, les mairies font machine arrière les unes après les autres.

Hélène de Lauzun

Hélène de Lauzun

Hélène de Lauzun a étudié à l'École Normale Supérieure de Paris. Elle a enseigné la littérature et la civilisation françaises à Harvard et a obtenu un doctorat en Histoire à la Sorbonne. Elle est l'auteur de l'Histoire de l'Autriche (Perrin, 2021).

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Après avoir tenté d’imposer les zones de faible émission dans les principales villes françaises, en y bannissant l’entrée des véhicules les plus polluants d’ici 2025, les mairies font machine arrière les unes après les autres et ne cessent de repousser dans le temps la date de mise en œuvre de l’exclusion. En cause : les effets pervers de la mesure, qui frappe durement les familles les plus modestes, et nourrit le ressentiment de la population contre ce qui est perçu comme une injonction écologique inapplicable.

A l’origine de la mesure, une loi votée en 2021 prévoyait la mise en place de Zones à Faibles Emissions, obligatoires dans toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, avant le 31 décembre 2024. La délimitation de ces zones entraîne l’exclusion des véhicules jugés les plus polluants, selon un calendrier et un zonage qui peuvent varier d’une ville à l’autre. Le caractère polluant des véhicules est indiqué au niveau national par l’apposition d’une vignette dite ‘Crit’air,’ suivant leur ancienneté, leur type de motorisation et l’énergie utilisée. Les plus performants se voient accorder une vignette Crit’air 1 ou 2, et les plus polluants, une vignette 3, 4 ou 5.

Mardi 19 mars, le ministère de la Transition écologique a annoncé que plusieurs importantes métropoles régionales comme Strasbourg ou Marseille verraient les délais pour l’éviction des véhicules les plus polluants allongés sine die. Les voitures classées Crit’air 3 devraient ainsi avoir le droit de rouler au-delà du 1e janvier 2025, contrairement à ce qui a été annoncé. Il y a quelques mois, une autre vague de villes moyennes avait bénéficié de la même mesure. Désormais, seules les villes de Paris et de Lyon sont soumises aux restrictions maximales.

Pour justifier cet assouplissement, le ministère a communiqué sur une « amélioration » significative de la qualité de l’air, qui rendrait les mesures restrictives moins nécessaires. L’indicateur de pollution qu’est la concentration en oxyde d’azote relevée dans les villes concernées serait passé en dessous du seuil requis au niveau européen. « La bonne nouvelle, ce n’est pas qu’on ne va pas interdire. C’est que la qualité de l’air s’améliore de façon notable », a tenu à préciser le ministre Christophe Béchu, soucieux de ne pas alimenter inutilement le ressentiment des habitants à l’encontre des ZFE, globalement très impopulaires.

La volte-face gouvernementale sur le sujet ne convainc pas. Les associations de défense de l’environnement jugent qu’il est trop tôt, et que la qualité de l’air ne s’est pas suffisamment améliorée pour qu’il soit pertinent de baisser la garde. « Nous paierons cette inaction sur le long terme », s’est alarmé Tony Renucci, directeur général de l’association Respire.

Au-delà de la question des performances environnementales, le problème est en réalité tout autant politique. Le changement de cap sur les zones à faibles émissions peut s’expliquer par la crainte du gouvernement de s’exposer à une fronde des usagers automobiles, dans un esprit proche de celui des Gilets jaunes. Les propriétaires automobiles visés par les exclusions pour motifs écologiques sont dans leur immense majorité des ménages modestes, qui ont acquis leur voiture il y a de nombreuses années, et qui n’ont pas les moyens d’en changer facilement. Ils perçoivent les ZFE comme une politique écologique punitive, imposée par le haut au mépris de leurs préoccupations quotidiennes. Pour Pascal Riché, journaliste pour la revue de centre-gauche L’Obs, l’intention politique derrière l’assouplissement est évidente. Les ZFE sont selon lui l’exemple parfait d’une écologie mal comprise, imposant la contrainte avant l’initiative : une « machine à produire des votes RN », selon ses propres termes. A l’approche des élections européennes, les équipes d’Emmanuel Macron ne peuvent se permettre d’alimenter la grogne des classes moyennes qui profite avant tout au parti de Marine Le Pen et Jordan Bardella.

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