Les milieux économiques et boursiers vont fêter Noël dans l'euphorie alors que l'équilibre politique du monde n'a jamais été aussi fragile...<!-- --> | Atlantico.fr
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La grande majorité des places boursières du monde vont sans doute terminer l'année avant l'heure et dans l'euphorie.
La grande majorité des places boursières du monde vont sans doute terminer l'année avant l'heure et dans l'euphorie.
©SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Atlantico Business

Tout s'explique. Les bourses du monde terminent l'année dans l'euphorie alors que l'état du monde, en raison des guerres, n'a jamais été aussi dangereux. L'euphorie des uns est sans doute excessive, mais le catastrophisme des autres aussi...

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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La grande majorité des places boursières du monde vont sans doute terminer l'année avant l'heure et dans l'euphorie. À New York, comme à Paris et partout en Europe, les indices boursiers vont battre des records historiques et complètement effacer le trou creusé par le Covid. À priori, ces mouvements sont animés par une situation économique et monétaire très favorable.

C'est assez incompréhensible parce que ce vent d'optimisme souffle sur un monde dont l'équilibre politique global n'a jamais été aussi menacé. Entre la guerre en Ukraine, les conflits au Moyen-Orient, les menaces terroristes et la montée des populismes, un risque de guerre mondiale plane évidemment.

Alors, qui se trompe : les boursiers qui jouent avec le feu de la spéculation, ou les gouvernements qui accumulent les armes et les munitions ?

Les mouvements de la bourse sont absolument cohérents. Dans le monde entier, ils considèrent que les situations économiques sont globalement bonnes avec des perspectives rassurantes. À Paris, à Francfort, à Wall Street, au Nasdaq... et en Asie sauf en Chine... on est sorti de la tempête Covid, les dégâts ont été limités et effacés. Dans l'immédiat, on enregistre un recul de l'inflation en reconnaissant que la poussée de fièvre n'était pas contagieuse. La politique monétaire s'annonce beaucoup plus accommodante ; les banques centrales en Amérique comme en Europe se préparent à lâcher du lest sur les taux d'intérêt. Sur le terrain de l'économie, les situations ne sont pas inquiétantes. L'année 2024 va atterrir grâce à des résultats qui vont rester bons pour la plupart des grandes valeurs. C'est vrai aux États-Unis où l'économie est tirée par les grands groupes de la tech (les GAFAM) et par les industriels de l'énergie... En France, les locomotives du CAC 40 sont évidemment dans le luxe, les industries automobiles, la construction aéronautique, le tourisme, les services. L'Allemagne s'appuie sur son réseau d'ETI et son dynamisme à l'exportation. À plus long terme, les acteurs du monde des affaires ont intégré de façon plus opérationnelle que les gouvernements la nécessité d'engager la mutation environnementale, dont l'abandon programmé des énergies fossiles, le développement du nucléaire... etc. À plus long terme, et pour les milieux d'affaires, les difficultés de la Chine sont purement politiques.

Ou bien la gouvernance chinoise continue de durcir le système et la Chine va s'asphyxier... mais les pays occidentaux s'organisent pour amortir cette asphyxie du marché intérieur. Ils n'investissent plus et se tournent vers le marché indien ou les autres pays du Sud-Est asiatique comme l'Indonésie...

Ou bien Pékin revient loyalement dans le jeu de la mondialisation, Mais c’est mal parti. Dans tous les cas de figure, un changement de pied des Chinois n'apparaît pas catastrophique aux Occidentaux qui en profitent d'ailleurs pour relocaliser certaines de leurs industries.

Dans ce contexte-là, les milieux financiers et les milieux économiques ne se posent que la question de la durabilité de cet équilibre compte tenu des bouleversements de la géopolitique.

A priori, on peut logiquement s'inquiéter des mouvements populistes, de l'impérialisme des Russes et de la violence de l'islamisme. On peut aussi s'inquiéter d'une coagulation des haines contre les valeurs de l'Occident. Les milieux d'affaires surveillent tous ces mouvements d'opinions dans leur propre pays comme à l'internationale. Mais sans tomber ni dans l’arrogance, ni dans un cynisme qui serait insupportable, ils s'accrochent à des idées très simples.

D'abord, il n'y a pas de vraies cohérences et d'unité entre l'impérialisme de Poutine et les mouvements terroristes dont les racines idéologiques sont souvent différentes et concurrentes.

Ensuite, il n'y a pas d'alternatives au système du capitalisme privé et de l'économie de marché comme au temps de la guerre froide. Or, le monde aspire à la prospérité économique ; le monde entier a besoin des progrès de la technologie dans tous les domaines (santé, écologie, etc.) ; le monde entier a besoin de système de communication, bref, le monde entier a besoin de croissance. Or, la croissance et la création de richesse ne sont possibles que dans le cadre d'une économie de marché, et de concurrence et pour que l'économie de marché puisse fonctionner, elle a besoin d'échanges et de liberté individuelle plus ou moins large, et de règles du jeu respectées.

C'est le problème de la Chine, la Chine cherche à profiter du système capitaliste mondial mais refuse d'en respecter les règles. Donc, elle s'exclut naturellement du jeu.

Le monde islamique est dans la même situation. Le monde islamique a besoin de prospérité économique ; les pays riches de l'islam, producteurs de pétrole, ont compris que pour conserver leurs richesses, ils avaient besoin de leurs clients, donc de s'inscrire à la table du capitalisme mondial. Ils constituent une force de rappel très forte pour espérer la paix. C'est Henry Kissinger qui avait développé cette réalité au lendemain de la crise pétrolière de 1974. À l'époque, et pour beaucoup, ce quadruplement du pétrole annonçait la catastrophe. Pour d'autres, ils offraient une opportunité de progrès. Ceux-là n'avaient pas tort. Quand on n'a pas de pétrole, on essaie d'avoir des idées.

Le décalage actuel entre "l'optimisme des boursiers et des milieux économiques" et le pessimisme des opinions publiques tient principalement au fait que l'opinion publique est chauffée à blanc par l'incohérence et la médiocrité des responsables politiques relayés par un système médiatique qui travaille essentiellement sur le court terme.

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