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Les élus qui subventionnent le Tour de France dans le viseur de la Cour des Comptes
©REUTERS/Jean-Paul Pelissier

Faux départ ?

La Cour des comptes a rendu public son rapport sur la tenue du Tour de France 2016. Cette publication pose une question : les retombées économiques valent-elles tous les investissements consentis, surtout quand on pense qu’il s’agit aux deux tiers d’argent public ?

Adrien Pittore

Adrien Pittore

Adrien Pittore est journaliste, photographe et pigiste. Il a notamment participé au recueil « Les Photos qu’on peut voir qu’au niveau district – Tome 2 » publié le 17 novembre 2017 aux éditions Petit à Petit.

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Cour des comptes tour de francefrom Société Tripalio

Alors oui, le Tour de France n’a pas de valeur tant son importance dans la culture française est prépondérante. Néanmoins, il convient d’en revenir à l’aspect strictement financier pour apprécier la valeur, le coût et les retombées de cet événement indissociable de l’histoire de l’hexagone.

Une gestion hasardeuse

En 2016, le départ du Tour avait lieu dans le département de la Manche. Pour organiser cet événement, le département a dû recourir en 2015 à la création de l’association « La Manche – Ouest Normandie – Grand départ Tour de France 2016 » avant de la dissoudre en janvier 2017. Parmi les membres de l’opération, on retrouve aussi la région Normandie et les collectivités étapes du Tour. 

Le rapport de la Cour des comptes montre alors l’effet pervers d’avoir autant d’acteurs présents (à ces acteurs publics, il faut rajouter les acteurs privés comme Orange, Amaury Sport Organisation…) : les rôles ne sont pas clairement définis. 

Ainsi, l’association qui coordonnait les opérations a dû assumer le financement de la cérémonie de présentation des équipes (260 000€) alors que ce n’était pas sa mission et que le conseil d’administration n’avait pas validé cette dépense.

L’association compense ses dépenses limitées par des risques élevés

Le budget total de l’organisation du « Grand départ du Tour de France » était de 5,3 M€. L’association a supporté une part minoritaire soit 1,2M€ alors qu’originellement, elle ne devait débourser que 400 000€ (inscrits au budget prévisionnel). Les 4,1M€ restant étaient supportés par le département. 

Le rapport détaille aussi comment étaient dispatchées les ressources disponibles. Le département a dépensé 2,9M€ dont 2,8 millions d’euros de dépenses propres et 85 000€ de dons à l’association, quand la région dépensait 1,3M€ dont 700 000€ de subvention à l’association et 605 000€ de dépenses propres. 

Chargée de la coordination et la logistique, l’association a dû supporter des risques élevés. Par exemple, elle a versé 50 000€ de dépôt de garantie pour l’occupation et les dommages causés aux personnes se trouvant dans les parkings. 

Les recettes sont-elles surestimées ?

La Cour des comptes précise aussi que l’association a vu le jour dans le but de concentrer les recettes avant de les redistribuer. Dans le tableau mis à disposition, on observe alors que les 2/3 des recettes sont constituées de subventions de la région Normandie et d’un « reliquat d’avance non-remboursé par l’association au département« . 

Du côté des recettes commerciales (contrats publicitaires, sponsoring…), le bilan n’est pas meilleur du fait de la présence du groupe Amaury Sport Association (ASO), détenteur du Tour de France. En somme, pour signer un contrat, l’aval d’ASO était nécessaire de même qu’il fallait reverser une redevance à ce groupe. Ce dispositif limitait considérablement le nombre de partenaires disposés : seulement deux contrats ont été signés. 

Reste alors la question des retombées financières et en termes d’image. En somme, la fréquentation totale sur les trois jours autour du « Grand départ » était de 878 444 personnes dont la moitié était constituée d’habitants du département, et 102 329 venaient de l’étranger. 

Le rapport affirme alors que les dépenses des touristes non-résidents ont été estimées à 22,6M€ sur l’hypothèse d’une dépense moyenne de 32€ journaliers et 74€ sur 3 jours. On ne peut que questionner la véracité de ces chiffres puisqu’ils sont amenés par une étude TNS-Sofress de 2013, de même que la fréquentation a été « calculée » grâce aux signaux envoyés par les téléphones portables des spectateurs. 

Seulement, la Cour estime que le budget de 5,3M€ dépensés ne prend pas en compte les coûts supportés par les communes traversées. Les communautés de communes du Mont-Saint-Michel et de Sainte-Mère-Eglise ont respectivement dépensé 26 000€ et 100 000€.

Avec des chiffres qui varient de 1 à 10, il est difficile d’établir un coût final, même hypothétique. 

Quid de l’argument des retombées médiatiques ?

La Cour des comptes s’attaque aussi au dernier argument en vigueur, celui qui voudrait que par les nombreuses télévisions présentes et retransmissions, le Tour de France se veut comme un vecteur d’attractivité. D’un point de vue comptable, c’est une réalité. Néanmoins, la Cour des comptes considère que cette affirmation est surévaluée. 

L’événement a été diffusé par 209 heures de retransmissions dans 190 pays pour une audience de 44 millions de téléspectateurs, dont 13 heures de direct quotidiennes en France pour 3 millions de téléspectateurs par jour. 

Le rapport met aussi en avant 10 000 retombées presse sur 2 ans. Seulement, une partie des articles ont été commandés par le département. 

Alors si évidemment le Tour de France ne peut et ne doit disparaître du jour au lendemain tant il est inscrit dans la culture française, on peut se poser la question de son intérêt. Il rapporte des visiteurs pendant l’événement et après, mais quelle est la proportion par rapport aux investissements ?

Peut-on réduire cette grande fête à un aspect strictement financier ? Oui si l’on prend en compte la notion d’intérêt général.

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