Les dividendes versés atteignent des records, mais la France ne sait toujours pas les utiliser avec efficacité<!-- --> | Atlantico.fr
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Bruno Le Maire, ministre de l'économie, quitte le palais de l'Élysée après avoir assisté à la réunion hebdomadaire du Cabinet à Paris, le 20 octobre 2021.
Bruno Le Maire, ministre de l'économie, quitte le palais de l'Élysée après avoir assisté à la réunion hebdomadaire du Cabinet à Paris, le 20 octobre 2021.
©AFP

Dividendes des grandes entreprises

Que fait la France des dividendes records versés par les grandes entreprises ? On sait peu de chose, alors que les autres grands pays capitalistes les utilisent pour financer la retraite de leurs salariés. Une idée qui pourrait marcher en pleine campagne présidentielle !

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les dividendes versés aux actionnaires se sont redressés plus rapidement que prévu, après la pandémie et vont atteindre un niveau mondial considérable. La France a profité de ce rebond, mais on ne sait toujours pas avec précision qui les touche et ce que l’on en fait. Alors que les entreprises anglo-saxonnes se sont organisées pour que les dividendes aillent en priorité financer les systèmes de retraites. Lesquels ont intérêt à financer les activités économiques rentables. 

La France, elle, a multiplié les réformes sans jamais oser mettre en place des systèmes par répartition. Tous les candidats à la présidentielle ont chacun leur petite recette magique mais aucun n’a intégré la perspective de créer des fonds de capitalisation. Le résultat de cet entêtement aveugle est que nos régimes sont toujours aussi fragiles et plus grave encore, nos entreprises manquent de fonds propres, donc de leviers de croissance. 

Après les 513 milliards distribués au 2e trimestre, le gestionnaire américain d’actifs Janus Henderson constate que pour le 3e trimestre, les versements aux actionnaires ont bondi de 19,5 % par rapport à ceux de 2020, pour atteindre 403,5 milliards de dollars, un record pour un troisième trimestre. 

Du coup, toutes les perspectives pour 2021 ont été boostées. Le capitalisme mondial devrait donc voir le pactole des dividendes versés croitre de 15,6% et dépasser les 1400 milliards de dollars, ce qui représente un record absolu. 

Ce qui prouve que l’activité économique a non seulement rebondi très violemment dès que le risque Covid a reculé grâce à la vaccination, mais que cette activité a gagné en résultat. La renaissance a été surprenante pour beaucoup. Les profits dégagés l‘ont été tout autant. Sachant que la flambée des prix des matières premières et des énergies a gonflé les bénéfices du secteur minier, mais pas seulement.

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Alors, c’est évidemment une bonne nouvelle en dépit des cris de l’extrême gauche qui verront là un marqueur supplémentaire des « outrances capitalistes ». 

C’est une bonne nouvelle parce que les dividendes, dans une entreprise, représentent le résultat net, une fois que l’entreprise a tout payé, ses salaires, ses achats, ses loyers, ses frais généraux, les investissements et les impôts. Et ces dividendes sont soit conservés en réserve, soit distribués aux actionnaires. 

La deuxième bonne nouvelle est que la part versée aux actionnaires est très importante. Ça prouve une chose: que les entreprises cherchent à rémunérer leurs actionnaires. 

L’alternative à la distribution, c’est la conservation dans la trésorerie des entreprises de ces dividendes et le rachat d’actions. Dans le passé mais encore aujourd’hui, les entreprises utilisent leurs réserves de cash pour racheter des parts du capital, ce qui fait monter la valeur des actions ou augmenter l’autocontrôle de la société. La finalité est très spéculative et ne profite guère à la croissance puisque cet argent n’est pas investi.

Le versement aux actionnaires permet certes de les rémunérer et de les fidéliser. Mais au-delà, cette distribution a une utilité beaucoup plus large. 

Des dividendes distribués reviennent forcément dans le circuit économique : 

- Soit ils sont consommés pour une petite proportion,

- Soit ils sont réinvestis dans d’autres entreprises. La multiplication des levées de fonds dans les entreprises nouvelles s’explique en partie par l’abondance des dividendes distribués. 

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Mais l’essentiel des dividendes sont versés aux fonds d’investissement ou aux fonds de pension, c’est à dire aux fonds de retraites.  

Et dans ce cas, ils sont gérés et réinvestis pour optimiser leurs résultats

Cette mécanique est assez vertueuse, sauf que la France ne sait pas l’utiliser. D’abord, parce que la participation des salariés au capital de leurs entreprises n’a pas été encouragé, ni par les syndicats, ni par l'Etat en dépit des intentions.  

Ensuite, parce que ces fonds qui règnent sur le capitalisme international servent principalement à garantir les fonds de retraite qui versent les pensions. Le niveau des pensions est donc sécurisé, mais il dépend de la bonne santé de l’économie. Alors les adversaires des fonds de capitalisation ont toujours expliqué que ce type de retraite faisait courir aux salariés deux risques en cas de crise grave : le risque de perdre son salaire en cas de chômage et le risque de perdre sa retraite. Le salarié serait donc face un risque de double peine. 

Ils oublient seulement de dire que les fonds de pension sont dans 90 % des cas gérés un peu comme des sociétés d’assurance, ils répartissent leur portefeuille de façon à repartir le risque. 

Ils oublient que nos sacro-saints systèmes par répartition sont tributaires des équilibres démographiques (le rapport entre les actifs et les inactifs) mais leur santé dépend aussi de la situation de l’économie. Parce qu’en cas de crise grave, le chômage augmente et le nombre de cotisants au régime diminue. 

La France n’a jamais eu ni la culture, ni la fiscalité pour autoriser et favoriser l’émergence des fonds de retraite. Le seul fonds de retraite qui existe en France est réservé aux fonctionnaires  de l’Etat, des collectivités publiques et des entreprises publiques. L‘adhésion est complètement libre, la seule condition est d’appartenir à la fonction publique ou d’avoir dans le passé, appartenu à la fonction publique, ne serait-ce e que le temps d’un stage étudiant de quelques semaines. Ce régime de retraite très particulier est le Prefon. 

A noter que depuis quelques années, des PER ( plan d’épargne retraite ) fonctionnant sur le modèle Prefon ont été autorisés pour les salariés du privé ou pour les professions libérales et que ces PER ne sont pas un échec et sont plébiscités. Signe que les mentalités changent.

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