Les 1001 vices du système d'indemnisation des intermittents du spectacle<!-- --> | Atlantico.fr
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Les débats concernant le régime des intermittents se concentrent sur leur niveau d'indemnisation.
Les débats concernant le régime des intermittents se concentrent sur leur niveau d'indemnisation.
©Reuters

Pas si vite

Le débat sur le régime des intermittents fait rage... mais sans doute pas sur la bonne question.

Agnès  Verdier-Molinié

Agnès Verdier-Molinié

Agnès Verdier-Molinié est directrice de la Fondation IFRAP(Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques).

Son dernier ouvrage est "Ce que doit faire le (prochain) président", paru aux éditions Albin Michel en janvier 2017.

 

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Atlantico : Aujourd'hui, les débats concernant le régime des intermittents se concentrent beaucoup sur le niveau d'indemnisation. Mais, est-ce le vrai problème ? Ou au contraire, ne faudrait-il pas d'avantage se pencher sur ce qu'est vraiment un intermittent ? Quelle est la part de gens rattachés au régime qui ne représentent pas, au final, la culture Française ? Qui sont ces gens ?

Agnès Verdier-Molinié : Les critiques se concentrent sur le système d’indemnisation, ultra-déficitaire et financé essentiellement par l’assurance-chômage, c’est-à-dire grâce aux cotisations de l’ensemble des salariés. Le coût de l’indemnisation des 100.000 intermittents du spectacle est disproportionné : en 2009, 1,3 milliard d’euros d’allocations a été versé, pour seulement 225 millions de cotisations recueillis, soit plus de 5 fois plus.3,7% des bénéficiaires génèrent un tiers de la dette annuelle du régime. La Cour a calculé que 10% des intermittents ont perçu en moyenne 39.867 euros par an d’allocations en 2010. Le déficit a été d’un milliard d’euros, soit "un tiers du déficit total de l’assurance chômage, alors que les intermittents ne constituaient que 3% des demandeurs d’emploi" en 2010 nous dit la Cour des comptes.

Depuis la réforme de 2003, le statut d’intermittent est réservé aux techniciens et aux artistes remplissant des conditions définies aux annexes 8 et 10 de l’Unedic : soit 100.000 personnes environ, qui sont rattachées au régime général de l’assurance-chômage géré par Pôle Emploi. Malgré un durcissement des conditions d’accès au statut d’intermittent depuis 2003, le nombre d’intermittents indemnisés par l’assurance-chômage ne cesse d’augmenter, en moyenne d’1% par an, passant de 102.223 en 2007 à 106.619 en 2010 d’après la Cour des comptes.

Quels sont les critères d'attributions qui justifient cette appellation d'intermittents du spectacle ? Comment certaines personnes parviennent à se greffer au système ?

Pour être indemnisé, il faut justifier de 507 heures de travail dans les 319 jours (artistes) ou 304 jours (ouvriers et techniciens) qui ont suivi la fin du contrat de travail prise en considération pour la précédente admission ou à défaut, de 531 heures de travail (artistes) ou 557 heures (ouvriers et techniciens) au cours des 335 jours. Mais trop d’intermittents sont indemnisés pour de mauvaises raisons : la Cour a dénoncé le phénomène de « permittence », où employeurs et salariés s’entendent pour déguiser des emplois permanents en emplois précaires et déclencher l’accès aux allocations. Au moins 15% des intermittents statutaires seraient concernés. La Cour a vivement critiqué la permissivité actuelle face à ces situations de fausse précarité. La « permittence » est, il est vrai, encouragée par l’incohérence du système, qui n’accorde d’indemnisation chômage aux intermittents que lorsque ceux-ci travaillent.

Qu'est-ce que cela coûte ? Sont-ils majoritairement responsables du milliard d'euro de déficit engendré par le régime des intermittents ?

Fixer un objectif de réduction du déficit est indispensable et rapprocher au plus vite les conditions d’indemnisation des intermittents des conditions communes s’impose. En augmentant les cotisations des employeurs et en les indexant sur le nombre de journées d’indemnisation générées.

Pour tenir cet objectif, les conditions d’indemnisation des intermittents devront être revues, comme le recommande la Cour qui en souligne le caractère « très favorable au regard du droit commun de l’assurance chômage ». Il faudra accepter de réduire le nombre de personnes bénéficiant du statut d’intermittents, nombre qui n’a pas cessé de croître. La Fondation iFRAP propose de réserver ce statut aux seuls artistes ce qui permettrait, selon nos estimations, de réduire le déficit à terme de 500 millions d’euros par an. Et ce d’autant plus que ce serait une réforme juste : les intermittents-techniciens sont en moyenne mieux payés et ont un temps de travail plus élevé que les artistes ; leur situation est globalement bien plus avantageuse que celle des intérimaires, alors qu’ils peuvent plus facilement que les artistes se reconvertir, le cas échéant, dans d’autres milieux professionnels. Une autre possibilité serait de « caler » le régime des intermittents du spectacle sur celui des intérimaire mais cela ne permettait une économie que de 320 millions d’euros.

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