Le PIB européen représentait 91% de celui des Etats-Unis il y a 10 ans, 65% aujourd’hui… Et si cet effondrement n’était qu’un trompe-l’œil ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le PIB de l'Union européenne représentait 91 % de celui des Etats-Unis en 2013, contre 65 % en 2023.
Le PIB de l'Union européenne représentait 91 % de celui des Etats-Unis en 2013, contre 65 % en 2023.
©Philippe HUGUEN / AFP

Pouvoir d'achat

Les Européens ont perdu de la richesse depuis dix ans par rapport aux Etats-Unis. Comment expliquer cette chute vertigineuse ?

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Selon les données du Financial Times, le PIB de l'Union européenne représentait 91 % de celui des Etats-Unis en 2013, contre 65 % en 2023. Ce serait la fluctuation des taux de change qui serait à l'origine de cette chute vertigineuse. Expliquez nous.

Philippe Crevel : Le dollar s'est apprécié par rapport à l'euro depuis plusieurs années, en particulier depuis la crise sanitaire de 2020. 

Le poids relatif de la zone euro par rapport aux États-Unis a diminué en raison de la dépréciation de l'euro. Si le dollar s'est apprécié, l'euro s'est déprécié. Par effet de change, il y a une baisse de la valeur européenne par rapport aux États-Unis. Mais je dirais que ce n'est pas la seule explication. Il y a également une divergence manifeste de croissance entre les deux zones économiques qui s'accentue depuis la crise sanitaire.

65 % du PIB, ça veut dire que les Européens ont perdu de la richesse depuis dix ans par rapport aux Etats-Unis. On produit moins donc on s'appauvrit ? On a moins de pouvoir d'achat ?

Le taux de change est un effet relatif et ne modifie pas en tant que tel notre richesse par habitant. Par exemple, les Allemands, qui sont en récession, ont pris la place du Japon sur le podium des trois plus grandes puissances mondiales également par un effet de change. Le yen s'étant déprécié par rapport à l'euro. Le japonais ne s'est pas appauvri du simple fait qu'il a perdu une place dans le classement des plus grandes puissances économiques mondiales. En revanche, le fait que la croissance européenne soit plus faible que celle des Etats-Unis depuis maintenant une bonne dizaine d'années crée évidemment une divergence entre les deux zones économiques qui se matérialise par une évolution des revenus de la richesse par habitant. Cette évolution est favorable aux Etats-Unis, et pas dans la proportion indiquée au début de cet entretien. La croissance économique supérieure aux Etats-Unis aurait provoqué un écart entre l'Europe et les Etats-Unis d'à peu près 20 %.

Le Financial Times se trompe dans son calcul ?

C'est un calcul qui prend en compte les effets de change. Or, ce n'est pas la seule donnée à prendre en compte pour apprécier l'évolution comparée entre deux zones économiques. Et d'ailleurs, en général, les classements se font en parité de pouvoir d'achat avec lequel on prend davantage en compte les niveaux des prix. Puis on essaie de corriger et de neutraliser les effets de change pour déterminer s'il y a enrichissement ou appauvrissement de telle ou telle population.

Qu’en est-il exactement ?  Est ce qu'on s'est enrichi ou appauvrit ?

Depuis une dizaine d'années, il y a appauvrissement pour la zone euro (et la France) du fait d'une croissance plus faible et donc liée à notre dépendance énergétique alors que les américains, eux, sont devenus exportateurs de pétrole et de gaz. D'autre part, nous sommes moins performants sur les secteurs technologiques. Cela crée un déficit de croissance en Europe par rapport aux Etats-Unis. Les américains ont un atout : ils attirent les capitaux du monde ce qui permet de financer leur économie. Ils le font beaucoup plus facilement que l'Europe.

Est-ce que l'Union européenne est plus pauvre parce qu'elle travaille moins ? Comment regagner de la richesse ? 

L'intensité en travail au niveau de l'Europe est plus faible qu’aux Etats-Unis. La durée globale de travail en Europe a eu tendance à baisser ces dernières années quand elle s'est stabilisée aux Etats-Unis. Evidemment, moins il y a de travail, plus il est difficile d'avoir de la croissance. D'autant plus que la productivité européenne recule également, en particulier en France. Donc moins de travail et pas de productivité, c'est moins de croissance. C'est ce qui explique une partie de la divergence de part et d'autre de l'Atlantique.

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