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L'Economie britannique se porte-elle si bien?
L'Economie britannique se porte-elle si bien?
©Reuters

A la loupe

Alors que la campagne électorale bat son plein au Royaume Uni, les chiffres économiques apparaissent contradictoires concernant la bonne santé du pays.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Le 7 mai prochain auront lieu les élections générales britanniques, dont le résultat reste encore très indécis. Dans une classique ambiance de campagne électorale, les accusations des uns et des autres ont pour effet de masquer en partie la réalité actuelle de l’économie britannique. Ainsi, selon l’économiste vedette de la société générale ; Albert Edwards, la situation du Royaume Uni serait alarmante à double titre : la persistance d’un déficit public important, et la présence d’une balance commerciale dégradée.

Et à priori, la position d’Albert Edwards est légitime. Le Royaume Uni ne parvient pas à redresser ses comptes publics, et ce, malgré un discours politique perçu comme étant empreint d’austérité.

Déficit Public en % du PIB. Royaume Uni. Source. Eurostat.

Car la réalité de la situation fiscale du Royaume, avec un déficit de -5.8% par rapport au PIB en 2014, ferait presque passer la France, et son trou de  -4%, pour un modèle de vertu comptable. De la même façon, la balance commerciale du pays, c’est-à-dire le solde existant entre les importations et les exportations, est également très largement déficitaire, à -4.2% du PIB pour l’année 2013.

Balance de compte courant. UK. En % du PIB. Source ONS

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Sur la base de ce qu’il est aujourd’hui courant d’appeler les déficits jumeaux, l’économie britannique n’aurait donc aucune raison de pavoiser.

Pourtant, une telle accusation se trouve affaiblie par une autre réalité. Le Royaume Uni est parvenu à faire baisser son niveau de chômage de façon considérable, passant de 8.4% au début de l’année 2012, à 5.7% en ce début d’année 2015, créant 1.8 millions d’emplois au passage depuis l’arrivée de David Cameron au pouvoir.

Royaume Uni. Taux de chômage. En %

Et si le Royaume Uni est parvenu à créer de l’emploi et à faire baisser son niveau de chômage, cela est pour une raison simple; son niveau de croissance s’est approché des 3% au cours de l’année 2014, un record depuis 2006.

Taux de croissance. Royaume Uni. Source ONS.

Ainsi, la situation économique du Royaume Uni paraît paradoxale. Mais entre croissance, baisse du chômage et déficits jumeaux, la situation ressemble pourtant à celle d’un autre pays; les Etats Unis. En effet, la situation budgétaire américaine, bien que plus favorable que le Royaume Uni pour l’année 2014, affiche un profil semblable sur l’ensemble de ces années.

Déficit Public en % de PIB. Etats Unis. Source Fred.

Une comparaison qui peut également se faire sur le niveau de la balance commerciale, largement déficitaire aux Etats Unis. Mais, ici encore, les Etats Unis sont parvenus à créer 10 millions d’emplois au cours des 4 dernières années, notamment en raison de leur croissance soutenue de 2.2% en 2013 et de 2.4% en 2014.

Ce qui apparaît ici, c’est que le Royaume Uni et les Etats Unis présentent les mêmes symptômes économiques parce qu’ils ont suivi la même stratégie de sortie de crise. Et cette stratégie se résume principalement par une très large opération de soutien monétaire couplée à une stabilisation des dépenses publiques.

Et ici aussi, les chiffres sont comparables. Le Royaume Uni, comme les Etats Unis, sont rapidement intervenus après la crise de 2008 pour soutenir leur croissance, en injectant l’équivalent de plus de 20% de leur PIB par la voie monétaire dans l’économie. Le résultat d’une telle politique est une forte relance de la demande intérieure, notamment de la consommation, ce qui a pour effet de supporter les importations plutôt que les exportations. D’où la formation d’une balance commerciale déficitaire.

Concernant les déficits publics, et à l’inverse de la stratégie austéritaire européenne, les deux pays ont préféré "faire filer" leurs déficits largement au cours des pires années, c’est-à-dire 2009 et 2010, afin de ne pas rajouter une crise à la crise. De cette façon, et en se concentrant sur la croissance de façon prioritaire, le Royaume Uni et les Etats Unis ont directement agi sur la cause.

Désormais, et grâce à la reprise de la croissance du PIB, les déficits publics, (comptabilisés en % du PIB) sont mécaniquement en train de se résorber. Ainsi, ce qui est pointé comme étant un problème au Royaume Uni, correspond plus aux conséquences de la reprise qu’à une source d’inquiétude particulière.

Dans le cas contraire, cela reviendrait à se féliciter de la bonne tenue de la zone euro. Entre une balance commerciale européenne, qui affiche un niveau de 3.5% du PIB de la zone euro, et donc très largement excédentaire, et un niveau de déficit public total à -2.5% du PIB ; l’Europe devrait être perçue comme une vraie championne. Mais la croissance atone et les 11.6% de chômage laissent perplexes sur la stratégie choisie. Le Royaume Uni et les Etats Unis ont fait un autre choix.

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