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"La prévention n’est-elle pas une bonne résolution pour chacun de nous pour 2024 et pour le ministère de la santé et de la prévention ?", se demande Antoine Flahault.
"La prévention n’est-elle pas une bonne résolution pour chacun de nous pour 2024 et pour le ministère de la santé et de la prévention ?", se demande Antoine Flahault.
©Philippe LOPEZ / AFP

Eléments de réponse

Les politiques de santé résolument tournées vers la prévention peuvent apporter des éléments de réponse à ces défis que sont le dérèglement climatique et le vieillissement de la population mondiale.

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Le dérèglement climatique et le vieillissement de la population mondiale représentent deux défis majeurs pour les générations à venir. Nous allons voir ici pourquoi les politiques de santé résolument tournées vers la prévention peuvent apporter des éléments de réponse à ces défis. Et ce ne sera pas à l’horizon 2040 ou en 2050 d’y réfléchir, mais bien dès 2024.
Le changement climatique a pour origine l’accumulation des émissions de gaz à effet de serre en raison de l’industrialisation d’une population mondiale de plus en plus nombreuse. Il a pour conséquences de nombreux impacts sur la santé, à commencer par l’émergence de maladies infectieuses, mais aussi les effets des événements climatiques extrêmes représentés par les canicules, les inondations, les tempêtes et les ouragans, plus sévères et plus fréquents. La combustion des énergies fossiles induit aussi une pollution atmosphérique aux particules fines qui est délétère pour la santé respiratoire, cardiovasculaire, neurologique et qui est une cause reconnue de nombreux cancers. Les conséquences du dérèglement climatique sont inégalement réparties dans le monde, les pays les plus pauvres d’Afrique subsaharienne en payant le plus lourd tribut, avec des régions entières devenues invivables, sources de malnutrition, de conflits et de violence, de migrations, et d’accroissement de la pauvreté.
Le vieillissement de la population n’est quant à lui pas une mauvaise nouvelle. Il est la conséquence de l’augmentation spectaculaire de l’espérance de vie de la population mondiale et du contrôle de la natalité en moins d’un siècle, grâce aux progrès conjoints du développement socioéconomique, de l’éducation et de la médecine. Mais ces évolutions démographiques posent de nouveaux défis à nos sociétés, outre celui du maintien du ratio de dépendance (rapport entre le nombre d’inactifs dans une société et le nombre d’actifs), celui du vieillissement en bonne santé et du maintien de l’autonomie des personnes âgées. 
On a trop tendance à croire que la question du vieillissement en bonne santé est l’affaire des gériatres, alors que c’est dès la conception et durant toute la vie que l’on doit s’en préoccuper. L’espérance de vie est un bon marqueur de la qualité d’un système de soins et la France fait œuvre de champion ici avec l’une des meilleures au monde. En revanche, c’est l’espérance de vie en bonne santé à l’âge de 65 ans qui est probablement l’un des meilleurs indicateurs de la qualité d’un système de santé axé sur la prévention, et ici la France pourrait mieux faire et a même intérêt à mieux faire. Et cela est d’ailleurs valable partout dans le monde aujourd’hui. 
En effet, pour mener loin sa population, il faut un système de soins et un accès aux soins des plus performants. Mais pour arriver en bonne santé à l’âge de 65 ans et y rester le plus longtemps possible après, il faut, en plus d’un bon système de soins, et d’un haut niveau de vie et d’éducation, avoir su mettre en place toutes les actions de prévention qui permettent de réduire le risque d’être malade, et ce, tout au long de la vie. Il existe quelques dizaines d’actions de prévention connues pour être efficaces, ce n’est donc pas un objectif inatteignable. Il y en a même quatre majeurs contre lesquels la France pourrait vouloir mieux faire : la promotion d’une alimentation saine et de l’exercice physique et la lutte contre l’usage problématique de l’alcool et contre celui de la cigarette. Avoir des politiques publiques courageuses qui concentreraient leurs efforts pour être sur les premières marches du podium européen sur ces seuls quatre domaines serait probablement de nature à relever le double défi du vieillissement de la population et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle du continent européen. En effet, les usages problématiques de tabac et d’alcool sont les causes de nombreuses maladies et handicaps chroniques et sont le fait de politiques trop souvent complaisantes vis-à-vis desquelles la puissance publique porte une lourde responsabilité. Or ce sont deux leviers de prévention rapidement actionnables. Une alimentation saine plus accessible, et de nombreux travaux scientifiques convergent aujourd’hui pour en définir les caractéristiques, serait à la fois de nature à améliorer la santé de la population et à fortement réduire les émissions de carbone du pays. Une alimentation plus saine en France signifie un régime moins carné, avec moins d’aliments transformés et privilégiant davantage les fruits, les légumes, les poissons et les volailles. Elle signifie aussi une lutte contre le gaspillage alimentaire. La promotion de l’activité physique est avant tout celle de la marche à pied, du vélo et de l’usage des transports publics. Elle contribue à une meilleure santé mais aussi à une moindre empreinte carbone et à une moindre pollution atmosphérique de nos villes. Il conviendrait, parallèlement au développement des pistes cyclables sécurisant les cyclistes vis-à-vis des automobilistes, de s’atteler désormais à mieux protéger les piétons vis-à-vis des engins roulants de toute nature.
Il y a bien sûr de nombreuses autres actions de prévention qui pourraient être entreprises et qui protègeraient durablement la population encline à vouloir les adopter. Certaines sont très éloignées du secteur même de la santé, comme la lutte contre la pollution de l’air. L’amélioration du niveau d’éducation de la population est aussi un levier puissant et connu de prévention sanitaire. La lutte contre l’isolement social également, celle contre le harcèlement et les violences à l’école, dans les familles ou en milieu professionnel aussi. Contre tout cela, il existe des actions de prévention qui ont établi les preuves scientifiques de leur efficacité et qu’il conviendrait de mettre en œuvre sans tarder si l’on veut être en mesure de relever les défis qui s’annoncent.
La prévention n’est-elle pas une bonne résolution pour chacun de nous pour 2024 et pour le ministère de la santé et de la prévention ?

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