La population chinoise diminue plus tôt que prévu : bonne ou très mauvaise pour le Parti communiste ?<!-- --> | Atlantico.fr
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La baisse de la population chinoise constitue un défi de taille pour Xi Jinping.
La baisse de la population chinoise constitue un défi de taille pour Xi Jinping.
©Mark Schiefelbein / POOL / AFP

Tsunami silencieux

Le pays le plus peuplé du monde a perdu 850 000 habitants l'an dernier, selon les chiffres officiels du Bureau National des Statistiques (BNS).

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico : La population chinoise est actuellement en train de chuter, et ce dix ans plus tôt qu’anticipé. A quoi est-ce dû ?

Emmanuel Lincot : Tout d'abord, une tendance générale et observable partout dans le monde post-industriel: "two incomes, no kids". Les jeunes ne veulent plus faire d'enfants comme leurs aînés et surtout l'expérience douloureuse vécue par la génération précédente et exposée à la politique de l'enfant unique a été pour tous un traumatisme. L'incitation gouvernementale à encourager désormais une reprise de la croissance démographique bute sur ce traumatisme. A ceci s'ajoute une crainte de l'avenir entravé par la pandémie qui, elle aussi, aura laissé des séquelles majeures, le  chômage, le difficile accès à l'éducation et au logement ; les risques de guerre, enfin. Bref, la société chinoise est confrontée à un problème profond, celui d'un manque de confiance. Et le volontarisme du gouvernement dans ses choix de politique nataliste aura du mal à contrebalancer cette tendance. 

Quels sont les avantages et les inconvénients d’une telle baisse de la population ?

La Chine sera un marché moins attractif. Un contre-exemple est celui de l'Inde qui, dans quelques années, va dépasser en nombre d'habitants la Chine et offrira aux investisseurs davantage de créneaux à leur expansion. L'autre problème est celui des retraites. Qui les financera ? Pas les jeunes et ce chantier a été à peine entamé par le gouvernement. Le gouvernement a donc le choix entre deux alternatives : une politique axée sur l'entrée des immigrés sur son territoire ou le développement de la robotique pour pallier son manque de main d'œuvre. C'est la seconde solution qui sera a priori retenue. Ce handicap démographique peut donc devenir un atout en termes d'innovations technologiques. Une chose est certaine : la Chine surpeuplée à laquelle nous avons été habitués depuis deux siècles est derrière nous. C'est donc le réaménagement territorial qui devra être de nouveau pensé entre les villes et les campagnes et la Chine sera par conséquent moins dépendante de l'extérieur sur le plan alimentaire.

Michael Pettis imagine que cette évolution démographique va se traduire par l’émergence de deux Chine, allant à deux vitesses et avec des problématiques différentes, au sein du pays ? Est-ce un futur possible ?

Il y a autant en Chine de problématiques qu'il existe de régions. Ce que nous savons, c'est que ce sont les régions du grand sud qui longtemps ont été des réservoirs inépuisables à main d'œuvre. Cela peut changer désormais et les plus nantis, les plus éclairés aussi, brigueront sans doute aussi des villes moins polluées et privilégieront des régions qui leurs seront sanctuarisées. L'îlotage urbain sous la forme de ghettos pour riches va donc se développer mais d'après d'autres critères que ceux qui ont jusqu'à présent prévalu. Et les pauvres continueront à être parqués dans leurs barres d'immeubles avec pour les premiers un accès illimité à des services de toute sorte et pour les seconds des difficultés croissantes au quotidien.  

Quelles peuvent être les réponses politiques de Pékin à ces évolutions ?

Le travail et l'intelligence. Or les dirigeants communistes ne travaillent plus et vivent sur leurs acquis. La majorité d'entre eux a des réflexes de bureaucrates, effrayés par les conséquences qu'ils paieraient au prix fort en cas d'initiatives. Ils sont pris de court dans tous les domaines : ralentissement de la croissance, incapacité à gérer une pandémie, incapacité à répondre à une précarité endémique qui touche plus de la moitié de la population...A ce rythme d'incompétences, la Chine se sera débarrassée des communistes avant d'être vieille. 

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