La Grande-Bretagne au bord du chaos économique et politique fait peur à tous les pays occidentaux <!-- --> | Atlantico.fr
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Liz Truss et Emmanuel Macron.
Liz Truss et Emmanuel Macron.
©Ludovic MARIN / AFP

ATLANTICO BUSINESS

La Grande-Bretagne est passée au bord du Krach financier la semaine dernière, obligeant Liz Truss à abandonner ses projets de politique budgétaire jugés impossibles à financer. C’est un avertissement sans frais aux occidentaux, et notamment à la France.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les marchés nont pas aimé « les trussonomics » anglais. Ils naimeront pas mieux un nouveau « quoi quil en coute » à Paris.

A peine installée au 10th Downing Street, Liz Truss a été obligée dabandonner ce qu’on appelait déjà les « Trussonomics », un paquet de mesures qu’elle avait proposé au moment de sa nomination il y a moins d’un mois pour redresser la situation très compliquée de la Grande-Bretagne. Le projet de budget quelle a présenté le 28 septembre comportait une augmentation massive des dépenses publiques et sociales et des baisses dimpôts très significatives. Dun coté, Liz Truss voulait relancer lappareil de production, de lautre, soulager les difficultés rencontrées par une partie de la population.

Le problème, cest que ce budget était impossible à financer et quen le publiant, la Première ministre a fait paniquer les marchés obligataires. La Banque dAngleterre a été obligée de réagir pour éviter la faillite de fonds de pensions qui se retrouvaient en cessation de liquidité, coincés par la hausse des taux dintérêt.

Dans la foulée, le ministre de l'économie et des finances, à peine installé, Kwasi Kwarteng, a été limogé et Liz Truss a abandonné son projet. Quelle humiliation ! Quitte à prendre le risque de devoir revenir devant ses électeurs.

Pour la presse britannique, le Royaume-Uni est retombé en plein chaos et elle ne donne pas cher de lavenir de ce gouvernement.  Les conservateurs qui lui avaient fait confiance sont désespérés et considèrent quelle aurait du démissionner elle-même, plutôt que de sacrifier son ministre de l’économie.

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Il est évident que, pour beaucoup dobservateurs, le marché obligataire, qui gère la dette publique, ne pouvait pas accepter une dérive financière majeure sans se mettre à labri, ce quils ont fait pour éviter, selon le New-York Times, un nouveau Lehman Brothers.

Mais les mêmes observateurs considèrent aussi que beaucoup de pays occidentaux sont loin d’être à labri dun aventurisme britannique imputable à une mauvaise maitrise des finances publiques.

Alors, la situation de la Grande Bretagne est liée à la multiplication de facteurs défavorables. La gestion du Brexit savère de plus en plus compliquée, parce que les couts de logistique et des procédures se sont alourdis et sajoutent désormais à linflation importée par l’énergie, les matières premières et les produits alimentaires.  Contrairement aux promesses qui avaient été faites par les Brexiters, la Grande Bretagne na pas réussi à trouver dans le monde des partenaires alternatifs à ceux que le Royaume-Uni a perdu en Europe. Les États-Unis ne se sont pas précipités pour venir en aide à lAngleterre qui, en plus, a perdu une partie de la puissance de lindustrie financière. Ajoutons que ces dernières années, la gestion du Covid a été calamiteuse dans les campagnes et la pandémie a beaucoup désorganisé le système dautant que, faute de moyens, le Trésor britannique a été beaucoup moins généreux pour financer « un quoi quil en coute » comme en Allemagne ou en France. Doù les grosses difficultés en sortie de covid pour profiter du rebond mondial.

Au total, peu de croissance, beaucoup de chômage et dinégalités. Boris Johnson na pas tenu la route et Liz Truss est arrivée avec des ambitions très Thatchériennes, mais un paquet de réformes qui sest fracassé sur le mur des réalités.

La situation Britannique est très particulière par rapport à celle des autres pays occidentaux, sauf que, dans beaucoup de démocraties, on commence à avoir de sérieux soucis au niveau des finances publiques. LAllemagne peut vivre sur les excédents, mais lItalie, lEspagne et surtout la France ont du mal à redresser l’équilibre. Les ambitions de maitrise sont très souvent insuffisantes surtout dans un climat inflationniste. La France doit à la fois soutenir son économie, juguler des problèmes dapprovisionnement en énergie tout en finançant par linvestissement, la conversion vers une économie verte. Dautant plus compliqué que la gouvernance na pas de majorité absolue.

Les pays européens viennent de recevoir les avertissements très sérieux du FMI et des banquiers centraux, parce que la panique britannique a rappelé assez brutalement que la volatilité très forte sur les marchés ne se limitait pas à sanctionner les « trussonomics » de Londres, mais aussi pouvait très bien toucher les plus dissipés de la classe européenne. En clair, cest François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, qui a rappelé à Bercy la nécessité de ne pas laisser filer les dépenses publiques parce que les déficits et lendettement étaient déjà très lourds. Et quand François Villeroy de Galhau parle à Paris, il fait son job en accord avec la banque centrale européenne.

Le risque qui inquiète les marchés porte sur la façon dont la gouvernance française va éteindre les débuts dincendie qui sallument sur le terrain social.

Ce qui se passe sur les carburants, dans les raffineries et peut être demain à EDF ou à la SNCF montre bien à quel point la société française, qui a pourtant été une des plus aidée et soutenue par des perfusions dargent public, est inflammable. Et quand la menace se rapproche trop du pouvoir, le pouvoir a tendance à sortir le carnet de chèques.

Les marchés nont pas aimé « les Trussonomics » anglais, ils ne supporteront pas un nouveau quoi quil en coute français.

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