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La COP21 ou la plus grande partie de poker menteur du Monde
©Reuters

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Les médias du monde entier insistent sur l’importance des enjeux de cette négociation internationale, avec des hommes politiques investis d’une mission de sauvetage. C’est vrai, sauf que le marchandage est tellement violent que tout le monde ment.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Depuis lundi, les chefs d’Etat et de gouvernement du monde entier ont donc engagé une partie de poker à l’échelle de la planète. Depuis lundi, ils négocient un accord international sur le climat, qui doit être sincère, chiffré et contraignant. En fait, toutes les conditions sont réunies pour que ce poker soit en réalité un immense poker menteur. Tout le monde ment parce que tout le monde a intérêt à mentir. Mais certains mentent plus que d’autres.

L’idée qui consisterait à obtenir des 150 dirigeants un accord est une idée folle que tout le monde fait semblant d’accepter.  Les pays développés, qui sont les plus gros pollueurs, de la planète à cause de leur niveau de consommation, vont donc promettre de moins polluer mais sans savoir comment et pourquoi.

Ils peuvent s’engager à produire et à consommer moins, sans  doute,  mais personne ne leur fera crédit. Ils peuvent aussi lancer des programmes d’innovations technologiques, mais ils ne le feront que si, et seulement si, ces investissements sont rentables. Et ils ne seront rentables que si les autres pays polluants, les émergents, font des efforts identiques puisque la pollution est mondialisée. Les nuages de gaz à effet de serre ne connaissent pas les frontières.

Les pays émergents justement sont de très gros pollueurs également. La Chine est le deuxième pollueur de la planète après les Etats-Unis. Les émergents n’ont pas les technologies les plus efficaces, ils ont du retard à rattraper en termes de développement et surtout ils sont de gros producteurs d'énergies fossiles : du pétrole et du charbon.

L’exploitation et la consommation du charbon représente 45 % des émissions globales de CO2. Dans ces conditions, les émergents sont prêts à s’engager à des réductions d’émission, importante, ils sont prêts à participer à la lutte contre le réchauffement climatique. Mais à une condition : recevoir des aides financières des pays les plus riches. Promettre de produire propre est un pieux mensonge parce que pour ces pays, la priorité est surtout d’accélérer le développement économique.

Ce qui est extraordinaire, c’est que tous les chefs d’Etat vont sans doute signer un accord international en sachant que beaucoup d’entre eux ne le respecteront pas. Ce qui est cocasse, c’est que tous feront mine de croire que cet accort sera viable.

Aucun chef d’Etat et de gouvernement ne se fait d’illusions. Aucun ne se sent politiquement engagé sur des phénomènes qui auront  lieu dans un demi-siècle. Ces hommes politiques sont en place pour une période qui ne dépasse jamais dix ans. Ils sont donc engagés pour une période qui ne dépasse pas la durée des mandats. C’est la grandeur et la faiblesse des démocraties. Le pouvoir démocratique  s’arrête à la frontière, là où commence le pouvoir du voisin.

En l’absence d’un début de gouvernement mondial, et d’un appareil juridique, la règle internationale pour  lutter contre le réchauffement climatique ne sera qu’une illusion de l’esprit ou le fantasme d’un politique utopique.

Il existe un moyen d’échapper aux faux semblants des accords internationaux et de sortir de ce poker menteur à l’échelle mondiale. Ce moyen, c’est de faire confiance dans le jeu du marché : c’est-à-dire de faire confiance dans la pression des contrepouvoirs économiques que sont les salariés, les clients et les actionnaires.

L’entreprise s’arrête de polluer quand le coût de la pollution est plus lourd que les avantages qu’elle retire à ne pas polluer.

Pour faire simple, si on réussissait à fixer au niveau international un prix du carbone élevé, on contribuerait à pousser l’entreprise à diminuer ses émissions. Il existe un moment dans le modèle économique où le coût du carbone est supérieur aux investissements nécessaires pour "dé-carbonner". A ce moment-là , l’industrie devient propre. C’est vrai aux Etats-Unis depuis les accords Kyoto, que le congrès US n’a jamais ratifié, mais que beaucoup d’entreprises respectent.

Les Etats du monde entier ne se mettront pas d’accord sur un prix du carbone assez dissuasif. Dans ce cas-là, ce sont les groupes de pression qui font le job. Les consommateurs veulent acheter propre,  bio ou équitable, ils veulent rouler sans émissions. Les salariés ont la même revendication, les actionnaires aussi qui allouent les investissements aujourd'hui selon le degré de pollution des produits ou des secteurs.

Les chefs d’entreprise sont obligés de se soumettre à ces lois du marché, sinon ils sautent. Les syndicats grognent, les clients boudent et les investisseurs se retournent. Les Chinois connaissent bien ce phénomène. Menacés d’asphyxie, les opinions publiques chinoises dont on dit qu’elles ne s’expriment  pas, sont parfois très présentes - et violentes - auprès de  leurs dirigeants locaux ou régionaux. La campagne chinoise ne supporte plus d’être entourée de nappes phréatiques polluées ou d’un ciel plombé par la fumée de lignite.

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