L'industrie de la mode désormais plus forte que l'automobile et l'aéronautique réunies : quelques leçons "Made in luxe" pour le reste de l'économie <!-- --> | Atlantico.fr
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La pharmacie est aussi l'exemple même d'un secteur à haute valeur ajoutée qui dépend d'une main d'oeuvre très qualifiée.
La pharmacie est aussi l'exemple même d'un secteur à haute valeur ajoutée qui dépend d'une main d'oeuvre très qualifiée.
©Regis Duvignau / Reuters

Petit miracle français

Le secteur de la mode et du luxe est très dynamique : il représente 1.7% du PIB, selon une étude de l'IFM (Institut Français de la Mode). Sa contribution à l'économie nationale est plus importante que celle de certains secteurs subventionnés de l'industrie. Un constat qui interroge sur les dysfonctionnements de notre modèle économique.

Eric Dor

Eric Dor

Eric Dor est docteur en sciences économiques. Il est directeur des études économiques à l'IESEG School of Management qui a des campus à Paris et Lille. Ses travaux portent sur la macroéconomie monétaire et financière, ainsi que sur l'analyse conjoncturelle et l'économie internationale

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Atlantico : La publication d’une étude intitulée "les chiffres clés inédits de la mode et de son économie" a pu mettre en avant le fait que ce secteur représente à lui 150 milliards de chiffre d’affaires, 33 milliards d’exportations ; 580 000 emplois directs, ou encore 1.7% du PIB du pays, soit un total plus élevé que les secteurs de l’automobile et de l’aéronautique réunis. Alors que les dossiers du type Peugeot, ou encore Alstom occupent le devant de la scène politique et économique, quelles sont les leçons à apprendre de cette situation ? Quelles sont les leçons de cette situation pour l'économie française ? 

Eric Dor : Les résultats obtenus par l’IFM sont dûs à leur méthodologie, et plus particulièrement à la manière dont ils ont définis les secteurs qu’ils comparent. Le secteur de la mode, tel qu’il est défini par l’IFM, recouvre d’abord une vaste gamme d’activités, puisque ce sont celles liées aux lunettes, parfums et cosmétiques, textiles et vêtements, chaussures et articles en cuir, montres et bijouterie. Ensuite l’IFM regroupe aussi bien les activités de production manufacturière de ces articles en France, que les activités de commerce de gros et de détail de ces produits, ainsi que tous les services utilisés dans la cadre de leur design, et commercialisation, y compris la publicité, le transport, la logistique et la communication. Donc forcément cela regroupe énormément d’activités et d’emplois. La production de tels articles en France n’en est qu’une petite partie.

Or, il semblerait que les secteurs automobiles et aéronautiques, auquel la mode est comparée, sont définis de manière beaucoup moins expansive. Par exemple l’IFM indique que l’automobile représente 0,5% du PIB en France. Mais cela, c’est simplement la part de la valeur ajoutée de l’activité de production de voitures en France. Pour que la comparaison soit cohérente, il faudrait aussi y ajouter les activités de commerces de gros et détails d’automobiles, et tous les services liés.

Pour le reste, il est évident que les secteurs de la mode et du luxe sont des secteurs où des marques françaises ont une renommée internationale, et où la valeur ajoutée est surtout concentrée sur les aspects de design et de commercialisation, qui peuvent encore être localisées en grande partie en France, même si la partie fabrication est partiellement délocalisée dans des pays à bas coûts salariaux. Comme la France est un pays à salaires relativement élevés, dans un monde où les processus de productions ont été très segmentés internationalement, c’est évidemment sur ces parties de la chaîne de production que le pays a intérêt à se concentrer.

Alors que les aides, diverses subventions, contrats aidés, semblent être orientées principalement vers des secteurs fragilisés, ne serait-il pas plus efficace, d’un point de vue économique, que la France parie plus fortement sur ses atouts ? Le secteur de la mode est-il délaissé ?

Confrontée à la concurrence des pays à bas salaires, la France peut difficilement garder des emplois de masse dans le secteur manufacturier ou certains services que l'on peut délocaliser, sauf sur des activités à haute valeur ajoutée comme en Suisse et en Allemagne. Ces secteurs, dont la mode de luxe par exemple, doivent être privilégiés. Le problème principal de la France est un niveau de gamme moyen trop bas des produits, même si elle a quelques niches de très haute technologie. Sur ces niveaux de gamme moyens, la France est concurrencée par les pays à bas salaires, et déjà en Europe par des pays du sud. Remonter le niveau de gamme doit être une priorité mais c'est difficile. Cela requiert énormément d'investissements à encourager fiscalement. Cela requiert également un gros effort dans l'éducation, pour élever les qualifications en partenariat avec certains secteurs. 

Le CICE profite à une large palette de secteurs en France. Le secteur de la mode, et de tous les services qui y sont liés, en profite.  De manière générale la rentabilité s'est améliorée en France.

Quels sont les autres secteurs de l’économie française qui mériteraient d’être plus soutenus, en raison d’un positionnement favorables des entreprises locales ?

Le secteur agroalimentaire, et particulièrement ses déclinaisons haut de gamme. La pharmacie est aussi l'exemple même d'un secteur à haute valeur ajoutée qui dépend d'une main d'oeuvre très qualifiée. Une attention particulière doit être portée aux secteurs exportateurs de services. la France est un des principaux pays exportateurs de services au monde. Il y a bien sûr le tourisme, pour lequel la France est très bien placée. L'emploi augmente dans les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration. Mais les exportations de services financiers et d'assurance sont également très dynamiques. Il y a bien évidemment tous les services liés aux nouvelles technologies, où la France dispose de personnels très qualifiés.

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