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Khalid Cheikh Mohammed : pourquoi personne ne s’intéresse au procès qui aurait dû être le plus important depuis Nuremberg
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Le KSM de Zero Dark Thirty

Cinq hommes sont actuellement jugés à Guantánamo par la justice militaire pour leur participation aux attentats du 11 septembre 2001. Parmi eux, Khalid Cheikh Mohammed, cerveau de l'attaque.

Jacques  Portes

Jacques Portes

Jacques Portes est, depuis 1995, professeur d'histoire de l'Amérique du Nord à l'Université de Paris 8 Vincennes-Saint Denis. Il est agrégé d'histoire (1966), docteur de 3e Cycle (1974) de l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, et docteur d'État (1987).

Il a notamment publié États-Unis aujourd'hui : les maîtres du monde ? (2003) ; États-Unis : une histoire à deux visages. Une tension créatrice américaine, 2003.

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Le procès du responsable autoproclamé des attentats du 11 septembre 2001 a commencé le 28 janvier 2013 dans la confusion, toujours dans la salle de la prison militaire de Guantánamo. Khalid Cheikh Mohammed a en effet refusé de répondre au juge, ce qui a provoqué un report. Il est interné depuis 2003 dans ce lieu de détention à la très mauvaise réputation.

Il a été soumis à la torture au moins jusqu’en 2006, autant pour le faire parler que par vengeance pour les 3000 morts du 11 septembre. Sans que cela ait entraîné l’attention du public.

En revanche, au début du premier mandat de  Barack Obama, sa promesse de fermer la prison de Guantánamo a suscité des passions. Ce lieu de détention a été mis en place au lendemain des attentats du 11 septembre dans la  base de Guantánamo possédée par les États-Unis depuis 1903 ; situé sur l’île de Cuba, il offre l’avantage de l’extraterritorialité.

800 personnes y ont été a incarcérées depuis 2001, 420 ont été libérées faute de preuves : en 2010, il y restait encore plus de 240 détenus. La décision de fermer cette prison honteuse marquait la volonté nette de rompre avec les pratiques de la période précédente dans ce qu’elle avait de pire. Mais trois ans plus tard, cette fermeture n’a pas été accomplie.

D’une part, 48 des détenus restants et 30 Yéménites, dont le pays ne peut les accueillir, n’ont nulle part où aller, alors que les autres ont été jugés dans des tribunaux ordinaires ou renvoyés dans leur pays d’origine, or les habitants de Thomson (Illinois), où une prison neuve et sous-utilisée  pourrait être reprise par le gouvernement fédéral pour y placer ces détenus, se sont vigoureusement opposés à l’arrivée de ces individus reconnus comme dangereux.

De l’autre, la perte de la majorité démocrate au Congrès a rendu impossible le vote d’un texte rendant définitive la fermeture de la  base. Depuis, le ministre de la justice a indiqué que Khalid Cheik Mohammed, l’un des concepteurs de l’attentat du 11 septembre 2001, serait finalement jugé par la commission militaire spéciale à Guantánamo, car le projet de tribunal civil a été abandonné. C’est ce procès qui a débuté.

Ce procès passe pratiquement inaperçu aux États-Unis pour plusieurs raisons. Guantánamo reste à l’écart du circuit médiatique et la procédure y est spécifique et le prévenu, en dépit de ses déclarations, n’a jamais été perçu dans l’opinion publique avec l’attention et la passion suscitées par Ben Laden. Les images de cet homme n’évoquent pas le fier jihadiste. De plus, la mort du chef d'Al-Qaïda a permis aux Américains de prendre du recul par rapport aux 11 septembre.

Dans ce contexte, le jugement de Khalid Cheik Mohammed n’aura pas grande signification, tout au plus il ranimera quelques passions des victimes du 11 septembre,  mais rien à voir avec les grands procès de la fin de la Seconde Guerre mondiale qui étaient conçus pour faire date et pour impressionner les opinions.

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