Israël : une guerre qui paradoxalement sauve le pays de lui-même<!-- --> | Atlantico.fr
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Des bénévoles préparent des colis contenant des produits de première nécessité pour les distribuer aux soldats israéliens dans la ville d'Ashkelon, au sud du pays, le 17 octobre 2023.
Des bénévoles préparent des colis contenant des produits de première nécessité pour les distribuer aux soldats israéliens dans la ville d'Ashkelon, au sud du pays, le 17 octobre 2023.
©Thomas COEX / AFP

Solidarité

Gideon Kouts, professeur émérite de Civilisation et communication juives et hébraïques modernes et contemporaines, analyse pour Atlantico la réaction de l'opinion publique israélienne depuis les attaques du Hamas.

Gideon Kouts

Gideon Kouts

Gideon Kouts est professeur émérite de Civilisation et communication juives et hébraïques modernes et contemporaines à Paris 8.

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Atlantico : Joe Biden a effectué une visite éclair en Israël hier. Une visite du président américain pour assurer l’Etat hébreu de son soutien. Cet objectif est atteint ? 

 Gideon Kouts : Du point de vue des dirigeants et du public israélien, la très courte visite de Joe Biden en Israël é été la plus importante jamais effectuée par un Président américain, ou tout autre dirigeant étranger, dans ce pays. En quelques heures, Biden a su rassurer les israéliens d’un appui sans faille de son principal allié dans l’une des plus graves crises qu’il ait jamais traversées et renforcer l’image et le statut des Etats Unis dans la région. Déjà avant sa venue, Biden était attendu en Israël comme le sauveur, dans un contexte de perte de confiance dans la direction de l’armée et de l’Etat et, dans ses paroles et ses actes, il a tenu ses promesses aussi sur le plan international et au sein de son propre pays. Malgré l’annulation de la réunion d’Amman, il a pu obtenir de la direction israélienne la plupart de ses conditions, notamment les ‘corridors humanitaires’, pour l’offensive sur Gaza qui se prépare. Bien joué.

Parlons de l’image d'Israël dans le reste du monde. Est-ce que Israël l'intègre dans sa réflexion pour mener la guerre ?

L’image qui a longtemps prévalu en Israël est celle du ‘Monde entier est contre nous’. Au début de la tragédie actuelle l’opinion publique abasourdie était agréablement surprise par l’appui et l’indignation générale. Plus tard l’image s’est ‘normalisée’ en renforçant les images préconçues. Au-delà des sentiments et d’une éventuelle déception, la réflexion d’Israël est celle du réalisme et de l’utilité. C’est la raison de l’orientation ‘américaine’, mais aussi, malgré son hostilité croissante vis-à-vis d’Israël, des ‘arrangements’ avec la Russie. 

Comment la société israélienne encaisse le coup depuis l'attaque du Hamas ? On voit une société extrêmement solidaire mais aussi manifestement bouleversée. Dans quel état d’esprit se trouve-t-elle ? 

L’attaque du Hamas et la guerre qui suit, ont surpris la société israélienne en plein  débat majeur - probablement  LE débat majeur pour son avenir d’Etat démocratique. Les adversaires de la contestation de la ‘Réforme juridique’  n’ont pas hésité d’accuser leurs adversaires de vouloir miner l’armée populaire Tsahal , basée sur les réservistes, de l’intérieur , et, en effet des aviateurs ont menacé de ne pas effectuer leur service de réserve… Des jeunes israéliens ont exprimé leur volonté d’émigrer … La terrible attaque surprise a modifié tout cela. Comme dans le passé, des israéliens en vacances ou travail à l’étranger se sont précipités sur le premier vol vers Israël .Malgré le terrible choc les israéliens se sont réuni et réunifié au-delà des considérations partisanes pour sauver le pays et leur mode de vie. Il faut noter qu’il s’agit de la première guerre israélo- arabe qui ne s’est pas déroulé à ses débuts  entre armées, mais a été dirigée directement contre les civils, contrairement à la doctrine sécuritaire , selon laquelle l’armée défend l’arrière- territoire très exigüe, et empêche l’accès de l’ennemi aux villes et villages. Les résultats, on l’a vu, sont terribles et sans précédent. Mais malgré les  évidents manquements de l’armée et du pouvoir politique, les 'règlement des comptes' évidents sont repoussés jusqu’après la victoire militaire dont personne ne doute. Le gouvernement Netanyahou a gagné un sursis…De ce point de vue, paradoxalement,  la guerre de Gaza, a  amené l’Etat d’Israël au retour à l’essentiel  et aux sources de son existence, et constitue même pour certains un genre de’ sauvetage’

Concernant la frappe sur l’hôpital de Gaza, Joe Biden l’impute à un tir de roquette hors de contrôle par un groupe terroriste dans le territoire palestinien. Un tir imputé, selon Israël, à l’organisation palestinienne Djihad islamique, allié du Hamas. Est-ce que cette déclaration peut calmer les opinions arabes très remontées contre Israël ?  

Cette question a évolué comme vous l’avez pu constater en quelques heures. La frappe qui n’était, apparemment, qu’une explosion n’a pas fait 500 morts, mais plutôt dix fois moins, selon des sources de renseignement européennes. Des preuves ont également été apportées quant à la responsabilité. Mais cela ne va pas calmer, à court terme, les opinions arabes- un terme qu’il faut aussi manier avec précaution compte tenu de la réalité politique dans la plupart de ces pays, car la ‘fabrication’ éventuelle et l’utilisation de l’incident  était censée mettre à mal l’offensive israélienne. Le problème des gouvernements arabes, même modérés et alliés officiels d’Israël, reste inchangé, et les prochains jours et semaines  seront  compliqués et lourds de conséquences pour la suite du rapprochement entre Israël et le monde arabe. 

Toutes les rédactions internationales se sont pourtant emparées de cette information avec très peu de prudence. Il y a comme un retournement d'opinion alors que l'attaque du Hamas le 7 octobre dernier a été terrible. Comment est-ce perçu par les Israéliens ? 

Très mal, même si ce qui importe aux Israéliens c’est surtout la position américaine qui ne les a pas déçus, aux dépends d’autres pays, notamment la France  (qui n’a pas su traduire ses justes paroles en actes) , en laissant  le leadership aux Américains, en attendant ‘le temps utile’ pour Emmanuel Macron. En effet, les services d’information de l’armée israélienne ont  réagi trop rapidement et pas toujours  convenablement lors de précédentes ‘affaires’. Pas cette fois- et malheureusement la perception de (certains) médias internationaux par les israéliens s’est de nouveau détériorée.

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