Israël : la crise démocratique dépasse de très loin Netanyahu<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à la Knesset, le 27 mars 2023. Netanyahu a annoncé une pause dans les réformes judiciaires.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu à la Knesset, le 27 mars 2023. Netanyahu a annoncé une pause dans les réformes judiciaires.
©Marc Israel SELLEM / AFP

Responsabilités partagées

Alors que le pays est secoué par de violentes manifestations contre le projet de réforme judiciaire du gouvernement, c’est loin dans l’histoire israélienne qu’il faut aller chercher les racines du chaos politique actuel. Et la gauche porte aussi une lourde de part de responsabilité.

Benyamin Netanyahou a finalement reculé. Depuis janvier, Israël est secoué par des manifestations d’ampleur importante en opposition à la réforme judiciaire du gouvernement Netanyahou. Le Premier ministre israélien a finalement annoncé, dans une adresse à la nation, après des consultations politiques avec certains partenaires de la coalition au pouvoir, le report à la prochaine session parlementaire – mi avril – de l’ensemble controversé des textes. Cette décision survient alors que le ministre de la Défense a été limogé, après avoir appelé à suspendre la réforme, estimant que l'opposition massive qu'elle suscite pose un problème de sécurité au pays.

Pour Hussein Aboubakr Mansour, directeur du programme EMET pour les voix démocratiques émergentes du Moyen-Orient, la situation actuelle doit aussi être lue au prisme de l’histoire israélienne pour comprendre quelles sont les racines du chaos politique actuel. Selon lui, ce qui a mené à l’arrivée de la coalition de droite « intégrale » a notamment trait à la «  colère des électeurs des partis de droite et religieux en raison des griefs historiques d'être exclus, marginalisés et diabolisés par l'establishment israélien et l'élite de gauche qui semble être beaucoup plus désireuse d'inclure des Arabes hostiles et antisionistes que des Juifs religieux ». Pour lui, on observe « une ironie de la part de gens éclairés, inclusifs et cool qui se sont soudainement découvert une passion pour la langue arabe et les pays arabes et qui utilisent arabe comme synonyme de ce qu'ils considèrent comme l'opposé de l'utopie démocratique laïque : le fanatisme fasciste à l'esprit étroit. »

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Hussein Aboubakr Mansour ajoute qu’il « existe également une colère compréhensible face aux conditions de sécurité et à la violence que personne ne veut aborder. » et rappelle également que « les colons n'ont pas agi et ne se sont pas comportés de manière isolée, mais avec l'approbation des gouvernements israéliens successifs, de droite comme de gauche, et qu'ils sont utilisés comme un bouc émissaire commode » : mis sur le même plan que les "extrémistes" palestiniens et rendus tous responsables du conflit.

Selon lui, « La marginalisation et l'exclusion politiques ont pour but de faire perdre la raison aux gens. Et lorsqu'ils y parviennent, leur folie confirme la nécessité de leur exclusion. Une dynamique d'exclusion politique classique ». Et face à cette dynamique d’exclusion ressentie, le risque d’une forme de vengeance, une fois au gouvernement. Des risques dont l’analyste explique sur Twitter s’est dit avoir été conscient, même s'il estimait que la présence de Netanyahou, « excellent homme d'État et politicien, pouvait atténuer bon nombre de ces risques ».

D’abord optimiste, en raison des "déclarations réconciliatrices" de Ben Gvir et de Smotrich, qui ont affirmé qu'ils n'avaient pas l'intention d'être des révolutionnaires, il estime que les deux se sont révélés « pire que ce qu’ils pensaient ». « J'espérais qu'ils deviendraient des hommes politiques conservateurs, mais ils se sont révélés être des révolutionnaires romantiques ayant une vision mythologique de l'État et de la politique », écrit Hussein Aboubakr Mansour.

C’est dans ce terreau que s’est inscrite la proposition de réforme judiciaire et les vives manifestations. « L'attitude révolutionnaire de la droite religieuse a suscité, à juste titre, chez les Israéliens laïques, la crainte que les rôles ne soient inversés et qu'ils ne soient désormais exclus », rapporte Hussein Aboubakr Mansour. Un phénomène qu’il estime « aggravée par la manière absolument insensée dont la droite religieuse a choisi de se conduire, que ce soit en matière de législation ou à l'encontre des Palestiniens et des Arabes » mais aussi « par la révolte de la gauche israélienne qui déteste intensément la personne de Netanyahou et par la révolte d'une élite institutionnelle enracinée qui, naturellement, ne veut pas de sa position privilégiée ». Tout cela a mené, selon lui, à ce que la réforme judiciaire soit perçue comme une « tentative révolutionnaire » de la droite pour refonder l’Etat sur de nouveaux clivages.  Se sont ainsi agrégées des questions aussi diverses que la démocratie, la place des femmes, des Arabes, des personnes handicapées, etc.

Et « Dans ce bourbier, la gauche israélienne a fait des choses que je trouve affreuses, créant une mobilisation de masse qui menace la solidarité sociale israélienne, menaçant ouvertement l'État sur le plan économique, copiant l'agenda américain de la résistance anti-Trump et, plus désastreux encore, cherchant à obtenir le soutien de l'establishment de la gauche américaine », estime Hussein Aboubakr Mansour. En définitive, conclut-il « La gauche israélienne voulait protéger l'État de la pluie et l'a donc jeté dans la rivière ».

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