ISF : l'impôt pervers qui lamine le patrimoine des Français pour une rentabilité minable <!-- --> | Atlantico.fr
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L’ISF revêt aux yeux du fisc une santé éclatante.
L’ISF revêt aux yeux du fisc une santé éclatante.
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Éditorial

L'Impôt de Solidarité sur la Fortune va rapporter 5,3 milliards d'euros aux caisses de l'État, soit 640 millions de plus que prévu. Mais il faudra beaucoup de temps pour qu’on mesure en France, au-delà des chiffres apparents dont se réjouit le pouvoir, le coût réel de cet impôt sur les forces vives de la nation.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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Voilà bien encore une exception française : alors que sous le poids d’une fiscalité de plus en plus lourde, les rentrées fiscales se font de plus en plus mal, avec une baisse attendue aussi bien sur l’impôt sur le revenu des particuliers que des taxes concernant les sociétés, l’ISF revêt aux yeux du fisc une santé éclatante. Le secrétaire d’Etat au budget Christian Eckert prévoit un bonus de 640 millions d’euros sur les prévisions, qui devrait aboutir à un rendement record de 5,3 milliards d’euros cette année pour les contribuables qui devront s’en acquitter d’ici le 16 juin. Une manne providentielle pour réduire un peu un déficit budgétaire qui continue de croître imperturbablement.

Pour le pouvoir, cet impôt a toutes les vertus et d’abord celle de "faire payer les riches", alors qu’en réalité les très grosses fortunes y échappent en grande partie par le biais de l’outil de travail ou encore les collections d’œuvres d’art. Ce sont plutôt les petites fortunes pourvues de biens immobiliers qui payent le plus lourd tribut, dans  la mesure où la cible est de plus en plus concentrée, le nombre des assujettis étant de l’ordre de 300 000, un chiffre inférieur à près de moitié à celui de l’an dernier, car le plancher de l’impôt a été porté à 1,3 million d’euros.

Une raison de plus pour rendre l’ISF populaire, puisqu’il est surtout payé par les autres ! Cela éloigne d’autant la perspective de sa suppression en cas de retour de la droite au pouvoir. Au demeurant, on n’oublie pas que la fiscalité de cet impôt avait été durcie sous le gouvernement d’Alain Juppé.

En revanche, pour les redevables de l’impôt, la facture devient de plus en plus lourde pour des raisons qui n’avaient  pas été prévues au départ, qui résultent de l’évolution des taux d’intérêt. En effet, le loyer de l’argent ne cesse de baisser. La  banque centrale européenne vient même de créer un intérêt négatif. Ce qui conduit à un véritable effondrement des rendements des obligations et des placements traditionnels comme l’assurance-vie, alors que les cinq taux de l’ISF ne bougent pas : une tranche à 1,5% a même été créée. On mesure ainsi l’écart qui se creuse alors que le livret de caisse d’épargne ne va bientôt rapporter qu’un pour cent. De même les revenus locatifs pour les propriétaires subissent une érosion régulière, alors que dans les grandes métropoles comme Paris, l’ISF répercute les effets de la bulle entretenue désormais par les achats d’étrangers fortunés qui raflent peu à peu les plus belles demeures de la capitale. Autrement dit, l’impôt ne peut plus être payé sur les revenus du capital, voire du travail, mais bien sur les actifs du patrimoine.

Une situation qui ne pourra se perpétuer longtemps. Le rendement exceptionnel de cette année provient de deux causes : la reprise de la bourse l’an dernier dont l’indice phare, le Cac 40 a progressé de près de vingt pour cent ; la régularisation ensuite des patrimoines revenus de l’étranger et qui concerne pour l’instant vingt-cinq mille dossiers, susceptibles de s’accroître encore quelque temps. Mais cette manne pourrait aussi se tarir. Il arrivera à l’ISF ce qui s’est produit pour les autres formes  de taxation : l’excès finit par réduire la masse imposable, les assujettis cherchant d’autres formes de placement moins vulnérables. Cela ne manquera pas d’encourager l’exil qui affecte surtout les élites, celles qui donnent l’impulsion à l’activité économique et qui revendiquent aussi le désir de l’argent lié à la réussite. Et il faudra beaucoup de temps pour qu’on mesure en France, au-delà des chiffres apparents dont se réjouit le pouvoir, le coût réel de cet impôt sur les forces vives de la nation, qui explique pourquoi il est pratiqué à des taux extrêmement modiques lorsqu’il n’est pas totalement abandonné par la plupart des pays.

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