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Iran : l'opposition à Mahmoud Ahmadinejad n'est pas morte,
bien au contraire...
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Résistance perse

Alors que l'Iran s'enlise dans la question du nucléaire, l'élection présidentielle de 2013 risque d'être un tournant important pour les Iraniens et l’opposition se dit déjà prête.

Thierry Coville

Thierry Coville

Thierry Coville est chercheur à l’IRIS, spécialiste de l’Iran. Il est professeur à Novancia où il enseigne la macroéconomie, l’économie internationale et le risque-pays.
 
Docteur en sciences économiques, il effectue depuis près de 20 ans des recherches sur l’Iran contemporain et a publié de nombreux articles et plusieurs ouvrages sur ce sujet.
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Le constat habituel concernant l’Iran est que l’opposition a été réprimée et que plus rien ne menace la stabilité du régime. Rien n’est plus faux. Il est vrai que le mouvement vert, qui avait initialement soutenu Hossein Moussavi lors des élections présidentielles de 2009, puis protesté massivement suite à la fraude électorale qui a conduit à la victoire de Mahmoud Ahmadinejad, n’occupe plus le devant de la scène. Ses dirigeants ont été assignés à résidence ou emprisonnés et les manifestations populaires de soutien à Moussavi ont cessé face à la répression et à la volonté d’éviter que le pays sombre dans la guerre civile. Ceci est un facteur qui différencie l’Iran d’autres pays dans la région : les pertes humaines et les souffrances engendrées par la révolution de 1979, la guerre civile qui l’a suivi (avec notamment la guerre entre les groupes islamiques et les Mouddajedines) puis la guerre de 8 ans avec l’Irak, font que la population dans son ensemble ne veut pas de nouveaux affrontements. Ceci ne signifie pas que les idées défendues par le mouvement vert ne soient pas présentes en Iran : les idées de démocratie, de respect des droits de l’homme, et même de laïcité sont des concepts qui travaillent la société civile iranienne depuis au moins 20 ans. Le mouvement vert a joué un rôle important en devenant l’émanation politique de ces idées qui continueront de trouver un écho important en Iran. Actuellement, les difficultés économiques qui pèsent sur la population et l’absence de véritables partis politiques d’opposition en Iran (tous les courants politiques en Iran doivent respecter le principe de Velayat-eh Faqih, c’est-à-dire la supériorité du religieux sur le politique) et le nationalisme iranien contribuent à une certaine stabilité politique. Pourtant, cette stabilité cache bien des affrontements.

L’apparition du mouvement vert a eu des répercussions sur le régime. Un certain nombre de députés pourtant conservateurs et fidèles à la Velayat-eh Faqih (et donc loyaux par rapport au Guide suprême, ) ont vu le mouvement vert avec sympathie et fortement désavoué la politique de répression menée par le régime (sans le dire ouvertement il est vrai). L’exemple le plus significatif est celui du député Ali Motahari qui a proposé un rassemblement des modérés des conservateurs et des verts. Une personnalité importante du régime, Ali Akbar Rafsandjani, ancien président et chef du Conseil de Discernement de l’Intérêt Supérieur du Régime, a initialement pris parti pour le mouvement vert avant de rentrer dans le rang. Ces mécontentements ont nourri l’opposition du Parlement au président Ahmadinejad, qui est devenue plus radicale face au mépris de ce dernier et à sa volonté d’étendre son pouvoir. Le Guide, Ali Khamenei, a finalement été convaincu qu’Ahmadinejad et son clan, pouvaient être dangereux pour la stabilité du régime car ils prévoyaient à terme de faire décroître l’influence des religieux dans la république islamique. De ce fait, une alliance entre une majorité de députés conservateurs et du Guide ont conduit à une marginalisation progressive de Mahmoud Ahmadinejad.

Cependant, ceci ne résout pas la crise politique interne. Même les partisans du régime ne se reconnaissaient plus vraiment dans l’affrontement politique entre  le clan d’Ahmadinejad et celui des leaders du Parlement (avec notamment le chef du Parlement, Ali Laridjani, qui n’a jamais exprimé la moindre sympathie pour le mouvement vert). Lors des dernières élections législatives de février 2012, le parti majoritaire (80 élus sur 290 députés) a été celui des conservateurs indépendants qui tout en soutenant la Velayat-eh faqih n’ont exprimé aucune allégeance politique. Le régime sait donc que la question de sa légitimité démocratique reste entière. Même si les deux situations restent différentes, comment les dirigeants iraniens peuvent-ils en effet continuer à critiquer le manque de démocratie en Syrie compte tenu de la répression en Iran ? C’est pour cela que les prochaines élections présidentielles de juin 2013 seront si importantes. Verra-t-on l’élection d’un conservateur indépendant qui tentera de récupérer une partie du message politique des verts ? Ou le régime trouvera-t-il un compromis avec les dirigeants verts pour que l’un des plus modérés de ces derniers se porte candidat ? Dans tous les cas, on ne peut être sûr que d’une seule chose : le message politique des verts iraniens continuera d’agir en profondeur en Iran...

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