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Inégalités : petits contre-arguments aux nouvelles thèses de Thomas Piketty sur la propriété privée
©JOEL SAGET / AFP

Capitalisme

Thomas Piketty, à l'occasion de la sortie de son nouvel ouvrage, a indiqué qu'il était favorable à un système de répartition du pouvoir au sein de l'entreprise en faveur des représentants du personnel.

Ferghane Azihari

Ferghane Azihari

Ferghane Azihari est journaliste et analyste indépendant spécialisé dans les politiques publiques. Il est membre du réseau European students for Liberty et Young Voices, et collabore régulièrement avec divers médias et think tanks libéraux français et américains.

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Atlantico.fr : Thomas Piketty a déclaré sur France Inter qu'il était favorable à un système de répartition du pouvoir au sein de l'entreprise au bénéfice des représentants du personnel (dans les grandes entreprises, 50% des droits de vote au conseil d'administration leur serait réservé) et au détriment des grands actionnaires (qui verraient leur droit de vote baisser à un niveau de 10%). Il a justifié cette mesure par l'obligation de répondre aux différentes questions environnementales ou économiques qui traversent le capitalisme. Dans les principes, pourquoi est-ce contraire à l'idée de responsabilité sur laquelle repose l'efficacité du capitalisme ? Dans les faits, les systèmes économiques cités par Thomas Piketty (Allemagne, Suède) ont-ils réussi grâce à ce type de répartition ? 

Ferghane Azihari : il faut souligner dans un premier temps que Thomas Piketty propose ni plus ni moins que l'expropriation des investisseurs français. Dans la logique capitaliste, celui qui lie son capital au destin de son entreprise est évidemment légitime à gérer son entreprise. C'est une mesure de justice et de responsabilité. Si demain vous confiez les rênes de votre entreprise à ceux qui n'ont rien à perdre de la réussite ou de l'échec de leur gestion, vous créer un aléa moral et une terrible injustice pour ceux qui ont tout à perdre. Une telle mesure s'apparente à une sorte de vol qui annihilerait les incitations des individus à investir dans leur entreprise, avec toutes les conséquences négatives sur la croissance et la production globale des richesses. Ce serait donc une mesure d'appauvrissement pour l'économie française. Je ne vois pas très bien dans un second temps ce que la question écologique vient faire là-dedans. Pour répondre au défi écologique, nous n'avons pas intérêt à ce que les sociétés s'appauvrissent, au contraire ! 

Thomas Piketty a cité la Suède. Après vérification, il se trouve qu'il ment : la Suède a bien des mécanismes de représentation des travailleurs au conseil d'administration. Mais ils n'ont pas du tout les mêmes pouvoirs et les mêmes prérogatives que les actionnaires. D'ailleurs, la loi suédoise interdit explicitement que des représentants des salariés soient plus nombreux que les représentants des actionnaires au conseil d'administration. C'est donc un mensonge que Thomas Piketty profère sur la radio du service public. 

L'économiste a aussi parlé de l'idée de propriété temporaire et a ciblé les détentions de capital qui ne serviraient à rien chez les très riches. Pourtant, ces actifs sont-ils généralement du capital qui dort, par exemple pour les plus grandes fortunes françaises ?

Je ne crois pas que ce soit la question principale. La manière dont le capital est utilisé n'a pas d'importance. La question est la suivante : comment ceux qui ont de grands patrimoines font-ils pour s'enrichir ? Si aujourd'hui, on part du principe qu'on est dans une économie de marché, l'enrichissement vient de la fourniture de biens et de service massivement plébiscités par les consommateurs. La propriété temporaire revient donc à punir les classes productives, à punir la création de richesse. Aucune civilisation n'a bâti sa prospérité en punissant ses classes productives. 

Il propose également un impôt progressif sur la propriété de l'ordre de 90% pour les multi-milliardaires et cite l'Amérique de Roosevelt et son taux de croissance. Dans les faits, qu'est-ce qui a fait de cette Amérique une puissance économique ? L'intervention de l'Etat a-t-elle quelque chose à voir dans cette équation ?

Il y a une part de mensonge dans ce constat. Quand il rappelle ce taux exorbitant de fiscalité, Thomas Piketty oublie de dire que ces taux étaient quasi symboliques, et que la totalité de la population y échappait. Piketty l'indique très bien dans ces travaux. Il montre que dans les années 1950 le taux moyen d'imposition des 1% les plus riches n'a jamais accédé plus de 46%. On est loin des 90 % qui auraient caractérisés la fiscalité sur les super riches. Le gouvernement américain a toujours été un gouvernement très léger dans le poids de la richesse nationale. Il n'a jamais dépassé plus de 35% du PIB en revenus fiscaux tout au long du XXème siècle. Il est faux aussi de dire que les Etats-Unis se seraient enrichis grâce au Léviathan fiscal. Ce qui a fait la prospérité d'une nation, c'est la capacité à attirer une classe productive toujours plus importante, à attirer des gens qui ont intérêt à créer des richesses. Thomas Piketty ment quand il attribue la prospérité des sociétés modernes à son modèle marxiste, qui au contraire, n'a jamais marché nulle part.

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