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Il suffit d’avoir fumé du cannabis pendant 3 ans pendant son adolescence pour que sa mémoire en soit altérée
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Cerveau en pétard

Des chercheurs américains ont récemment publié une étude dans laquelle ils démontrent qu'une consommation chronique de cannabis à l'adolescence avait des effets sur la mémoire à long-terme. Ces résultats viennent compléter ceux que l'on connaissait sur la mémoire à court-terme.

Dan Véléa

Dan Véléa

Le Docteur Dan Véléa est psychiatre addictologue à Paris.

Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur les addictions, dont Toxicomanie et conduites addictives (Heures-de-France). Avec Michel Hautefeuille, il a co-écrit Les addictions à Internet (Payot) et Les drogues de synthèse (PUF, Que sais-je ?, Paris, 2002).

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Atlantico : Une nouvelle étude réalisée par l'université de Northwestern montre qu'une consommation fréquente de cannabis pendant l'adolescence peut affecter la mémoire à l'âge adulte. Comment l'expliquer ?

Dan Véléa : Cette étude vient s'ajouter à une longue liste de résultats parfois mitigés concernant les effets d'une consommation chronique de cannabis sur le cerveau. Si la majorité d'entre elles démontrent bien les effets nocifs de la substance, elle porte un coup à d'autres résultats, notamment une dernière étude qui affirmait que la consommation de cannabis pouvait améliorer la mémoire chez les sujets atteints d'Alzheimer.

Le cannabis contient près de 480 alcaloïdes possédant des propriétés psychoactives. Certains ont des effets sur le sentiment de détente, d'autres permettent de s'amuser, de ressentir du bien-être… Ils agissent contre la mémoire, que ce soit la mémoire de fixation, à court terme, ou une mémoire plus ancienne. L'explication la plus logique est celle consistant à dire que les neurones, à force d'être trop souvent confronté à ces substances psychoactives, s'abîment fortement.

Le vieux mythe disait qu'une fois les capacités de mémoire déstabilisées, il n'y avait plus de capacité de régénération. Mais on voit de plus en plus que celles-ci existent : ceux qui souffrent de maladies de Parkinson peuvent recourir à des greffes neuronales, ou cela peut reprendre, tout comme lors de maladie cardio-vasculaires. Pour autant, je ne pense pas que la recherche se soit posé des question sur ce type de mémoire : les dégâts causés sont là. A l'âge de 18 ans, le cerveau est suffisamment mûr, donc la destruction neuronale des capacités de mémorisation est atteinte chez ce type de patient. Chez les patients plus âgés, et dont la consommation est chronique, on voit aussi une perte de mémoire.

On connaissait déjà les effets sur la mémoire à court terme. Quelle est la différence entre ces deux types de mémoires, à quels besoins spécifiques répondent-elles ?

Il y a 5 types de mémoires, mais en gros la mémoire de fixation correspond à la mémoire des évènements récents, tandis que la mémoire d'évocation se crée à partir des réminiscences des souvenirs issus de l'enfance. Ce que l'on constate aujourd'hui, c'est que les deux sont touchées par la consommation de cannabis. Le siège du système émotionnel -le système limbique- impliqué dans les mécanismes de l'apprentissage, et l'hippocampe, sont tous les deux fortement sollicités dans la consommation de cannabis.

D'ailleurs, une étude australienne avait pris un panel d'étudiants de 15 à 18 ans et qui fumait régulièrement du cannabis. A 35 ans,  leur mémoire était sensiblement inférieure par rapport aux sujets témoins qui ne fumaient pas.

A partir de quelles doses la consommation de cannabis devient-elle réellement problématique ?

Il va falloir ici casser un mythe : la consommation de cannabis ne devient pas problématique uniquement par la fréquence. C'est surtout la concentration de THC, et l'intensité de la fumette qui sont en jeu.

En quoi la cartographie du cerveau, très utilisée par les chercheurs, est-elle importante pour connaître les effets d'une consommation régulière de cannabis ? Et quelles régions en sont les plus affectée ?

En l'occurrence, l'équipe fait de la recherche fondamentale, et l'imagerie médicale leur permet de voir quelles sont les zones déficientes, celles sollicitées par la consommation -les zones chaudes- et celles qui ne sont pas suffisamment exploitées.

Les chercheurs se sont également intéressés à l'effet d'une consommation régulière de cannabis sur les sujets souffrant de troubles mentaux. Que sait-on concrètement de l'effet du cannabis sur ces derniers ?

Il faut être honnête sur cette question, mais même en étant honnête les résultats restent inquiétants. Il y a deux effets du cannabis sur les troubles mentaux et les psychoses. Premièrement, ceux qui auraient de toute manière développé ce type de trouble. Chez ces derniers, on a pu constater que le cannabis provoquait une accélération de l'apparition de ces psychoses.

Dans le deuxième cas, le plus connu avec le cannabis mais aussi avec le LSD est la pharmaco-psychose, où la molécule est directement responsable de l'apparition de la psychose. Mais la différence entre les deux, c'est que celle-ci n'est que très rarement durable. En revanche, au-delà des psychoses, le cannabis est fortement impliqué dans la démotivation des individus. 

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