Guilhem Carayon : « Laurent Wauquiez est le meilleur pour représenter la droite » <!-- --> | Atlantico.fr
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Laurent Wauquiez et Eric Ciotti saluent la foule à la fin du conseil national des Républicains au "Palais de l'Europe" à Menton, le 30 juin 2018.
Laurent Wauquiez et Eric Ciotti saluent la foule à la fin du conseil national des Républicains au "Palais de l'Europe" à Menton, le 30 juin 2018.
©VALERY HACHE / AFP

Présidence LR

La rentrée des Jeunes Républicains se déroule ce 3 et 4 septembre à Angers. Son président, Guilhem Carayon, appelle à une refondation et à une révolution au sein du parti dans le cadre de l'élection du président des Républicains, prévue en décembre prochain.

Guilhem Carayon

Guilhem Carayon

Guilhem Carayon est le président du mouvement des Jeunes républicains. 

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Atlantico : Vous organisez ce week-end la rentrée des jeunes LR, qu’en attendez-vous ?  Quelle ambition avez-vous ?

Guilhem Carayon : On a décidé de se rassembler à l’occasion de cette rentrée des jeunes Républicains pour mettre fin à un paradoxe. Les idées de droite sont clairement majoritaires dans le pays et pourtant le parti de droite, LR, n’a jamais été aussi faible. Cela devrait inciter nos ainées à une forme d’introspection : pourquoi en sommes-nous arrivés à faire moins de 5% à la présidentielle, à perdre trois élections présidentielles de suite et à ne plus être capable de gagner une élection nationale depuis 15 ans. On appelle à faire une révolution au sein du mouvement. Il faut tout changer, tout rebâtir du sol au plafond et ça passe d’abord par la clarification de la ligne politique que l’on propose français.

On a trop souffert d’avoir davantage suivi la ligne de Juppé et Raffarin plutôt que celle du RPR canal historique, celle de Pasqua et Séguin : la fermeté sur les questions régaliennes et une Europe des nations. La clarification de la ligne est un sujet primordial. Il faut aussi savoir faire émerger de nouveaux sujets dans le débat public. On parle très peu, à droite, de la question écologique. Pourtant elle est au carrefour de tous les sujets. Et nous avons un discours à proposer qui est aux antipodes des partis qui se disent écolos en France et qui veulent tout interdire. Nous croyons que la transition écologique peut être la grande révolution industrielle du XXIe. On peut rendre compatible la croissance avec la lutte contre le dérèglement climatique. Ce sera d’ailleurs l’un des ateliers que nous proposerons ce week-end.

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Bruno Retailleau a annoncé ce vendredi sa candidature au poste de président des Républicains. Qu’en pensez-vous ?

J’ai un profond respect pour Bruno Retailleau. C’est une boussole intellectuelle pour notre famille politique. C’est l’un des rares politiques à avoir voté contre le traité de Lisbonne en 2008. Mais j’ai décidé de m’engager pour Éric Ciotti car je me retrouve dans son idée de reconstruire un grand mouvement populaire et patriote dans l’esprit du RPR. Il a une ligne sans tabou. Mais le message que je veux faire passer aux jeunes LR, c’est que la compétition qui va s’ouvrir doit se faire dans un esprit de loyauté. Il faut que les débats soient dignes et nous y veillerons. Nous avons vécu trop de divisions ces dernières années. Nos aînés nous ont habitués à des guerres fratricides, nous voulons l’apaisement. Il faut pouvoir débattre de nos idées, pour la France et pour le mouvement, dans un esprit de loyauté.

Aurélien Pradié est aussi candidat, quel regard portez-vous sur sa démarche ? Est-ce important que les différentes sensibilités soient représentées ?

C’est important. Aurélien Pradié incarne une sensibilité au sein des Républicains. Il a été un excellent avocat de la déconjugalisation de l’AAH que nous avons finalement obtenu, après cinq années. Il s’est battu contre les violences conjugales à l’Assemblée et j’admire cela. Mais je considère que la ligne d’Éric Ciotti, populaire et patriote, est celle qui me parle le plus. Je ne parle ici qu’en mon nom. Certains jeunes Républicains préfèrent la candidature d’Aurélien Pradié ou de Bruno Retailleau, d’autres, comme moi, soutiennent Éric Ciotti. Une tribune rassemblant plus de 500 jeunes LR vient de sortir pour lui apporter leur soutien. Mais il est sein d’arriver à débattre au sein d’une famille politique. La démocratie interne c’est important.

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Vous dites appeler à une refondation, une révolution, au sein du parti. Éric Ciotti, que vous avez décidé de soutenir peut-il en être l’artisan ?

L’une des raisons pour laquelle j’ai décidé de soutenir Éric Ciotti, c’est parce qu’il a clairement dit que lui président de parti, la question de l’incarnation pour la prochaine élection présidentielle, du leadership, était tranchée parce que ce serait Laurent Wauquiez notre candidat. Je n’ai pas envie qu’on se retrouve, dans 4 ans, avec à nouveau l’incertitude sur qui sera notre candidat et à devoir organiser une primaire dans laquelle nous n’arriverons pas à rassembler tout le monde. Il faut trancher très vite la question du leadership et aujourd’hui, il me semble que le meilleur pour représenter la droite c’est Laurent Wauquiez.

Désigner comme champion naturel de la droite Laurent Wauquiez pour 2027, alors que la droite a besoin de refondation, n’est-ce pas mettre la charrue avant les bœufs ?  

On a besoin de régler rapidement la question du leader. Sinon on va connaître le même sort qu’en 2016-2017 et 2022. Laurent Wauquiez l’a dit plusieurs fois, il a choisi de ne pas reprendre la présidence des Républicains car il estime que le chemin d’un candidat à la présidentielle n’est pas de rentrer dans la politique politicienne et les polémiques stériles. Il faut aller à la rencontre des Français, pas forcément devant les caméras d’ailleurs, il n’y a pas besoin de cela. Il faut se baser sur la campagne de Chirac en 1995, il s’était rendu dans chaque canton de France pour aller à la rencontre des Français. Il faut retrouver le vrai sens de la politique et c’est le chemin que Laurent Wauquiez a entamé.

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Faire l’impasse sur la présidence de LR n’est-il pas un choix risqué pour Laurent Wauquiez ?

Je ne pense pas. Il y a encore cinq ans qui mènent à la présidentielle. Rentrer dans le jeu politique c’est aussi prendre le risque que les gens se lassent. Et puis ce n’est pas son niveau. Le débat public aujourd’hui est d’un tellement faible niveau qu’il vaut mieux ne pas rentrer dedans. Je préfère que LR mène le combat des idées et serve de laboratoire d’idées. Il faut être capable de produire des idées nouvelles : sur l’écologie, sur la sécurité, sur l’économie. J’ai l’impression qu’aucune idée nouvelle n’a émergé de LR depuis une quinzaine d’années, depuis l’arrivée au pouvoir de Sarkozy. De nombreux sujets avaient été mis sur la table. Mais depuis, j’ai l’impression que la droite a été paresseuse et n’a pas réussi à renouveler son logiciel. C’est sans doute ce qui explique le décalage avec l’opinion. Ne pas parler d’écologie aujourd’hui, cela veut dire ne pas parler aux jeunes. Et c’est évidemment quelque chose auquel on ne peut pas se résoudre. Donc il faut clarifier notre ligne mais aussi faire émerger une nouvelle génération. L’enjeu c’est aussi de tourner des pages, regarder l’avenir. La droite doit être audacieuse. En ce sens, je pense qu’il faut tourner la page Sarkozy.

Même si Éric Ciotti ne devenait pas président de LR, Laurent Wauquiez serait-il malgré tout le candidat naturel de la droite en 2027 ?

En tout cas, je le souhaite. Je défendrais cette idée auprès des militants et dans les instances des Républicains car je crois qu’il est quoi qu’il arrive le meilleur pour nous représenter. Je ne me résigne pas aux scores minables. Et l’une des raisons de cette défaite brutale, c’est la primaire. Il serait bon qu’on s’entende sur le fait de ne pas recourir à la primaire.

Éric Ciotti comme Laurent Wauquiez ont été au sommet de LR par le passé. Sont-ils les mieux placés pour incarner les idées nouvelles ?

Quand je dis qu’il faut faire émerger de nouvelles générations, ce n’est pas du jeunisme. L’expérience en politique c’est une chance. Et j’aimerais parfois en avoir un peu plus. Laurent Wauquiez, il y a dix ans, tout le monde le prenait pour un ringard, on jugeait ses idées caricaturales, sur l’assistanat, sur l’immigration massive, etc. Aujourd’hui, on ne parle que de ça. Le cancer de l'assistanat, tout le monde est d’accord avec ça. Je pense que l’histoire lui a donné raison. Et ce n’est pas parce qu’il n’a pas été compris il y a dix ans qu’il ne peut pas prétendre à la plus haute fonction.

On reproche souvent à Éric Ciotti que sa ligne puisse être la cause d’un rétrécissement de LR. Que répondez-vous à cette inquiétude ?

Ce discours de la crainte de l’explosion, cela fait 20 ans qu’on le tient et on a fait moins de 5% à l’élection présidentielle. Donc je crois que c’est exactement le contraire. Il est urgent de clarifier une ligne politique forte. On ne peut pas être à la fois le centre mou, modéré, et la droite forte. Il faut définir qui l’on est. C’est la base pour reprendre le pouvoir. Je pense par ailleurs qu’Éric Ciotti est très caricaturé mais que les gens seraient étonnés de voir à quel point il peut rassembler s’il était élu président des Républicains. Je le pense très loin de la caricature qui a été faite de lui par nos adversaires. Ce sont les mêmes qui caricaturaient Laurent Wauquiez et je n’ai pas envie de leur faire confiance. Ce que dit Éric Ciotti aujourd’hui c’est qu’on fait partie de la droite, donc on doit porter les idées de la droite. Il faut enfin s’assumer. Les sujets qu’il a mis sur la table depuis qu’il est au parlement se sont tous révélés véridiques.

On vient de sortir d’une élection présidentielle ou Le RN et Éric Zemmour ont fait un tiers des voix. Un Français sur trois vote plus à droite que le parti de droite. Si ça ce n’est pas la meilleure cause du problème qu’on a, il y a un vrai sujet. On a souffert du manque de clarté. Les gens ne savent plus identifier la politique défendue par les Républicains. Certains diront que ce sont des libéraux, d’autres des conservateurs, d’autres encore des souverainistes. Si on arrive à clarifier les idées qu’on porte, nous redeviendrons crédibles.

Même au sein de votre parti, il y a des réserves sur la ligne d’Éric Ciotti ou le conservatisme de Bruno Retailleau, et ce ne sont pourtant pas « des ennemis » ?

Justement, nous verrons dans quelques mois quand, je le souhaite, Éric Ciotti sera élu, s’il est capable de rassembler. Je suis convaincu que ce sera le cas. Il saura rassembler, mais en étant capable de garder une ligne directrice. J’ai toute confiance en lui, nous sommes sur la même ligne.

La plupart des grands partis ont une jambe libérale et une jambe conservatrice, comment expliquer que la droite française ait du mal à faire de même ?

Je pense qu’il n’y a pas que deux jambes. Il y a évidemment la fermeté sur les questions régaliennes. La première des libertés devrait être de vivre en sécurité dans ce pays. Le deuxième sujet, c’est la liberté économique, évidemment. Nous sommes un pays asphyxié par les taxes et les impôts tout en étant les champions de la dette, du déficit public, des déficits commerciaux, etc. Et nos services publics se dégradent. Il a fallu une crise pour se rendre compte que notre Hôpital était à genoux. Le niveau de l’Ecole ne fait que chuter. L’école est devenue la fabrique des inégalités. On peut prôner plus de liberté économique, c’est un discours qui peut parler au petit comme au salarié, tout en prônant un état stratège. Cela veut dire ne pas être béat dans la mondialisation et comprendre que la mondialisation sauvage a appauvri les classes moyennes et populaires. Ces deux discours ne sont pas antinomiques.

Le Rassemblement national de Marine Le Pen cherche à se respectabiliser à l’Assemblée nationale. Est-ce que cela change quelque chose dans la relation que LR doit avoir avec le RN et ses électeurs ?

Ce qui m’importe ce n’est pas l’union des partis mais celle des électeurs. Pour ça, il faut reconstruire un grand mouvement de droite, qui soit populaire. On ne peut plus se permettre de parler aux gens qui vont bien, aux classes aisées. Il faut parler à ceux qui travaillent dur, aux retraités, aux jeunes, et avoir un discours qui correspond à leurs attentes. Pour cela, il faut faire le bon diagnostic sur la situation. Lors de ma campagne pour les législatives, j’ai vu très peu d’espoir et beaucoup de colère et de désillusion. Une enquête d’opinion l’a montré il y a quelques jours : 75% des Français se disent pessimistes quant à leur avenir. La base de tout c’est le bon diagnostic. D’abord comprendre qu’il y a une explosion de l’insécurité, souvent causée par une immigration massive et une justice laxiste. Ensuite, qu’aujourd’hui le travail ne paie pas, que la dette va peser sur nos générations et celles de nos enfants. Si on arrive à faire ce diagnostic, y compris celui du défi de la transition écologique, on pourra éventuellement trouver des solutions à ces problèmes. La droite n’a pas suffisamment bien, pendant des années, su comprendre quel était le malheur français et comment exercer le pouvoir. C’est l’un des aspects du discours de Laurent Wauquiez qui me plait le plus : si demain on arrive au pouvoir il faut savoir l’exercer. Nous sommes arrivés au pouvoir en 2007 avec Sarkozy alors même que nous n’étions pas prêts à l’exister, nous ne savions pas pourquoi les gens ne croyaient plus à la politique. On ne comprenait pas le sentiment d’impuissance du politique face à l’Europe, face à la Commission européenne qui a ouvert la France et tout le continent à tous les vents mauvais de la mondialisation. Elle empêche l’émergence de champions industriels, elle attaque le modèle agricole. Il y a eu des aspects positifs à la mondialisation, mais on n’a pas su contrôler ses excès. C’est aussi l’article 8 de la CEDH a été pris comme base juridique pour rejeter l’expulsion de l’imam Iquioussen. Il faut remettre au goût du jour la souveraineté nationale.

L’une des raisons qui fait que je ne me retrouve pas dans le logiciel macroniste est le fait que Macron ne parle que de souveraineté européenne et non nationale. Or la souveraineté européenne, cela n’existe pas. Emmanuel Macron est l’exemple de l’élite qui a fait un trait sur le peuple, sur la nation, sur ses frontières. Le pays va très mal et il faut un réveil français. Pour cela, il faut une classe politique qui soit au niveau. Et je veux que mon parti se reconstruise sur des bases solides.

Quelle est la place des jeunes LR dans cette refondation ?

Nous sommes là pour ouvrir notre gueule, dire qu’il faut tout changer, demander une révolution dans notre parti. On est là pour dire qu’on ne se satisfait pas de faire moins de 5% à la présidentielle. Je ne me suis pas engagé pour que LR devienne le parti radical, ou un syndicat d’élus locaux. Ce n’est pas la vocation du grand parti de droite en France.  Il doit être un mouvement populaire capable de brasser toutes les couches de la population. Je crois encore à la force des partis politiques et Emmanuel Macron a commis une grande erreur en sous estimant la place des partis. D’ailleurs la majorité ne pense rien, il n’y a rien de commun entre ses composantes. Pourtant on en a besoin comme laboratoire d'idées et comme outil de lien avec les gens. On a besoin de cela pour gagner la bataille culturelle. Il faut bien sûr avoir des élus, mais il ne suffit pas d’avoir des élus.

Y-a-t-il un désir de droite chez les jeunes ?

Une partie de la jeunesse est clairement wokiste, même si elle ne le sait peut-être pas. Ils ont été élevés dans une époque où ces idées sont à la mode et ont pénétré les milieux culturels, politiques, universitaires, etc. Cette jeunesse-là est très difficile à convaincre car elle obéit à un logiciel très à gauche, très radical, qui n’a rien à voir avec la gauche républicaine issue de Jaurès et Clémenceau.

Mais une très grande partie de la jeunesse partage des idées de droite sans le savoir. Ils sont dans une logique saine : ils veulent un travail qui paie, pouvoir nourrir leur famille, vivre sur une planète durable, etc. Et ce n’est pas parce que ces jeunes se considèrent écolos qu’ils ne sont pas de droite. Un de mes proches qui votait auparavant à droite ne l’a pas fait à cette élection car notre parti ne parlait pas assez d’écologie. Or la droite doit être écolo, par essence. Notre ADN, c’est la transmission, la conservation, de notre planète, une volonté de transmettre le beau.

Propos recueillis par Guilhem Dedoyard

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