Gouvernement : le casting gouvernemental fait-il encore la différence ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le nouveau gouvernement doit être annoncé ce, en vue de la tenue d’un voire deux conseils des ministres cette semaine.
Le nouveau gouvernement doit être annoncé ce, en vue de la tenue d’un voire deux conseils des ministres cette semaine.
©GONZALO FUENTES / POOL / AFP

Remaniement

La composition d’un nouveau gouvernement est attendue dans la matinée de ce lundi 4 juillet. Un bon ministre peut-il réellement faire la différence dans son ministère et au sein du gouvernement ?

Benjamin Morel

Benjamin Morel

Benjamin Morel est maître de conférences en Droit public à l'Université Paris II Panthéon-Assas.

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Atlantico : Le remaniement est imminent, dans un contexte d’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale, le choix du nouveau distribution peut sembler tour à tour crucial ou inutile. Qu’en est-il réellement dans la configuration actuelle ?  

Benjamin Morel : Le choix de la nouvelle distribution est important, mais sans doute pas pour les raisons qui monopolisent les médias. L’important n’est pas d’abord le dosage de droite et de gauche au sein de l’architecture gouvernementale. Alors que les alliances vont être à géométrie variable durant toute la législature et que le débauchage individuel risque de plus d’énerver que de rallier l’opposition, mieux vaut chercher des ministres représentant des signifiants neutres ; peu clivant. En revanche, il convient de s’appuyer sur de vrais professionnels, non seulement de la politique, mais aussi et surtout du Parlement. Avec la défaite de Richard Ferrand et Christophe Castaner, les relais les plus fiables de l’Élysée ont disparu du Palais Bourbon. Elisabeth Borne n’a pas d’expérience parlementaire ; Olivier Véran en a peu. Il faut des ministres qui connaissent la pratique d’une institution au fonctionnement bien plus complexe que l’image médiatique qui en est donnée.  

En quoi un bon ministre peut-il faire ou pas la différence dans son ministère et au gouvernement ? Ont-ils suffisamment de latitude ? En particulier lorsque l’on sait qu’ils ne choisissent que peu leurs équipes et directeurs de cabinet ?

C’est un point essentiel qui marque particulièrement le dernier quinquennat. Les ministres n’ont, non seulement pas la main sur leur cabinet, mais la composition de ces derniers, au moins jusqu’en 2021, fut limité à un rôle de communication. Cela ne permettait pas aux ministres d’avoir un rapport de direction effective avec leur administration. Les directeurs d’administration de leur côté étaient nommés directement par l’Élysée. La volonté de marginaliser les ministres a toutefois connu des limites. Après la crise Covid, il est devenu évidemment pour tout le monde que l’Élysée ne pouvait pas tenir directement l’ensemble de l’administration au risque de dysfonctionnements graves au sein de l’État. Du pouvoir a donc été un peu rendu aux ministres. Par ailleurs, la nécessité de négocier avec les parlementaires pour faire passer les projets de loi modifie forcément le rapport de force. L’Élysée ne peut plus imposer en réunion interministérielle ses arbitrages dont le ministre devra ensuite s’assurer qu’ils s’imposent aux parlementaires. Le ministre en commission notamment va forcément devoir composer ; et là il n’y a aucun représentant de l’Élysée qui peut se substituer à lui.  

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Dans quelle mesure une bonne équipe gouvernementale, par sa composition comme par ses capacités, pourrait impacter la tenue de l’Assemblée nationale ?

Il faut comprendre que l’Assemblée est un chaudron. L’opposition y tente des coups et l’important n’est pas d’avoir théoriquement 289 députés qui vous soutiennent, mais d’avoir toujours la majorité en séance. Il faut donc non seulement composer avec les oppositions compatibles, mais aussi mobiliser la majorité et soigner les relations avec l’opposition la plus franche pour la dissuader de vous pourrir la vie… cela implique au moins deux qualités. La première est de très bien connaître le droit parlementaire pour éviter de tomber dans les pièges tendus par l’opposition. Le gouvernement en 2019 lorsqu’il s’enferre dans les luttes parlementaires sur la réforme des retraites fait preuve d’un amateurisme procédural étonnant… qui finalement l’obligera à user du 49 alinéa 3 la veille d’une élection municipale. L’autre qualité essentielle est évidemment la capacité à négocier avec les parlementaires ce qui nécessite une bonne connaissance des attentes des parlementaires, de leurs marottes, des intérêts de chaque circonscription…  

Pendant longtemps, le gouvernement visait à représenter des sensibilités et des territoires, ce qui permettait des équilibres internes.  Un casting diversifié peut-il toujours avoir cet effet ? 

Je ne suis pas certain que cet équilibre territorial soit à ce point essentiel. Jadis, il fallait équilibrer les poids des différentes fédérations des partis, donner des gages à tels ou tels barons… Cela permettait d’équilibrer les rapports de force au sein du parti et de s’assurer la fidélité des réseaux locaux. Pour une formation comme Renaissance, un tel jeu n’est pas nécessaire. Cela peut l’être au PS ou à LR, dans une moindre mesure au RN… mais la fragilisation du vieux modèle des partis rend cela moins pertinent. Le personnel politique est par ailleurs trop peu implanté pour vraiment envoyer un signal à l’électorat. Cela vaut aussi pour les élus locaux. La plupart des Français connaissent mal voire pas du tout le nom de leur président de conseil départemental ou de conseil régional. 

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