Faire chambre (conjugale) séparée, bonne ou mauvaise idée pour le couple ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Ces dernières années, nous avons assisté à des évolutions et les couples choisissent de plus en plus de dormir dans le même lit.
Ces dernières années, nous avons assisté à des évolutions et les couples choisissent de plus en plus de dormir dans le même lit.
©Pixabay / Free-Photos

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Aujourd'hui, près d'un couple sur cinq dort dans des chambres séparées.

Philippe Brenot

Philippe Brenot

Philippe Brenot est psychiatre, sexologue et anthropologue. Il dirige les enseignements de sexologie et sexualité humaine à l'université Paris Descartes. Récemment, il a publié Les femmes, le sexe et l'amour : 3 000 femmes témoignent aux éditions Arènes.

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Atlantico : Aujourd'hui, près d'un couple sur cinq dort dans des chambres séparées. Comment expliquer ce phénomène ?

Philippe Brenot : Je pense que ce phénomène est souvent amplifié par la presse et les journalistes. Chaque fois que l'on veut souligner une évolution, on parle de « de plus en plus ». Cependant, il est important de noter que dormir dans des lits ou chambres séparés a toujours existé, particulièrement dans les familles aisées. Par exemple, il y a une cinquantaine d'années, la ménopause marquait la fin de la vie sexuelle féminine. À cette époque, la sexualité et la fécondité étaient étroitement liées. En 1980, la majorité des femmes cessaient d'avoir une vie sexuelle après la ménopause, qui survient entre 40 et 50 ans. C'est à partir de là que l'expression « avoir le démon de midi » est apparue, désignant le désir masculin au milieu de la journée ou de la vie. Cependant, avec l'avènement des contraceptifs permettant une vie sexuelle épanouie tout au long de la vie, les choses ont changé et beaucoup de couples ont continué à avoir des relations sexuelles après la ménopause. Néanmoins, des facteurs hormonaux peuvent affecter la sexualité des femmes, comme la sécheresse vaginale, ce qui entraîne des différences dans les générations plus jeunes. Dans certains cas, les femmes peuvent même connaître une sexualité épanouie après la ménopause, tandis que les hommes peuvent commencer à éprouver des difficultés, notamment en ce qui concerne l'érection. Il est donc important de reconnaître que la deuxième moitié de la vie a toujours été une période propice à l'éloignement des couples, pour diverses raisons. Aujourd'hui, cette réalité est différente. Même si nous nous éloignons, dans de nombreux cas où une séparation physique n'est pas envisageable, les couples optent pour des chambres séparées. Ainsi, il n'est pas surprenant que ce pourcentage de 20% soit atteint, alors qu'il était probablement de 40 à 50% il y a 50 ou 80 ans. Par exemple, lorsque l'on visite la maison de parents ou de grands-parents à la campagne, il est courant de voir plusieurs chambres et il est donc erroné de croire que la sexualité impliquait nécessairement le partage du même lit.

N'est-ce pas une excuse pour éviter de parler de problèmes plus importants au sein du couple ou un moyen non conflictuel d'échapper à un mariage malheureux ?

En effet, cela est tout à fait vrai. Comme je l'ai mentionné précédemment, prendre du recul nous permet de réaliser que c’est parfois le cas, il y a toujours eu au moins 20% de couples qui ne dormaient pas ensemble au sein d’un foyer. Cependant, dans les générations plus jeunes, la situation est différente. Ces dernières années, nous avons assisté à des évolutions et les couples choisissent de plus en plus de dormir dans le même lit. Néanmoins, diverses circonstances peuvent perturber cette pratique, telles que le vieillissement et les problèmes de sommeil. Le ronflement, souvent associé à la vieillesse, a été largement cité dans une enquête récente, montrant que 44% des couples qui ne dormaient pas ensemble évoquaient le ronflement comme motif. Parfois, des querelles peuvent également entraîner la décision de ne pas partager le lit conjugal pour une nuit. Dans la majorité des cas, c'est une décision prise par une femme, mais mal vécue par son partenaire masculin. Cela relève aussi de stéréotypes. Dans mes entretiens avec des couples, je constate fréquemment que cette décision est liée à des problèmes de santé ou au sein de la relation. Bien que ce ne soit pas rare, cela peut contribuer au pourcentage de 20% de couples qui ne partagent pas le même lit.

Quels sont les impacts, néfastes et/ou bénéfiques, sur le couple de dormir dans des chambres séparées ? Est-ce finalement une bonne idée ?

Il existe deux scénarios possibles. J'ai appelé cela le "partage", c'est-à-dire dormir séparément, que ce soit un choix délibéré ou subi. Je connais de nombreux couples qui sont heureux de ce mode de vie choisi pour différentes raisons. Certains ont fait le deuil de leur sexualité en raison de leur histoire personnelle, par exemple. Ils estiment qu'ils sont bien mieux ainsi, sans avoir à gérer les tensions ou les pressions sexuelles. D'autres ont choisi cette option pour préserver leur autonomie. Ils se retrouvent régulièrement, par exemple, en décidant de se rejoindre le soir ou le matin. Ces deux scénarios dépendent des individus et de leurs préférences. En revanche, il existe une troisième situation, plus complexe et probablement plus fréquente, où cette séparation est subie plutôt que choisie. Dans ces cas, quand on ne supporte plus son partenaire au point de dormir sur le canapé, il est fort probable que la crainte d'éloignement et de séparation s'installe rapidement.

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