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 Facebook : Mark Zuckerberg va devoir retrouver son génie pour échapper aux sanctions européennes
©JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Atlantico Business

Mardi soir, devant les députés européens, Mark Zuckerberg s’est une nouvelle fois confondu en excuses. Il est en ce moment en visite à Paris. Histoire de sauver son groupe et éviter son démantèlement ?

Aude Kersulec

Aude Kersulec

Aude Kersulec est diplômée de l' ESSEC, spécialiste de la banque et des questions monétaires. Elle est chroniqueuse économique sur BFMTV Business.

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Mark Zuckerberg est en visite en Europe pour une vaste opération de relations publiques. De passage à Paris mercredi et jeudi, où il a d’abord été reçu à l’Elysée pour la réunion « Tech for Good » - autrement dit la technologie au service du bien commun - Mark Zuckerberg a rencontré des européens assez remontés sur l’impérialisme des GAFA américains. Le président français en a profité pour défendre devant un parterre de patrons de la Silicon Valley, son projet phare de taxation des entreprises du numérique. « For Good » comme il dit, il n’empêche qu’il sera confronté à un public plus porté par le business que par l’éthique (les Facebook, Uber, Microsoft…), mais aussi à fort pouvoir d’investissement. Du coup, le président français, qui a aussi pour objectif de cueillir quelques grands coups pour la France, a quand même adouci son discours.

Finalement, c’est surement devant les députés européens, pendant son audition mardi soir, que Mark Zuckerberg a été confronté à la plus grande résistance.

C’est le député belge Guy Verhofstadt qui a ouvert les hostilités : « Il y a le fait que vous ayez moins, voire pas du tout de contrôle sur votre entreprise. Cela se voit parce que vous ne cessez de vous excuser, vous vous êtes excusé au moins quinze ou seize fois ces dix dernières années. »

Ca a été le premier point de défense pour Mark Zuckerberg : annoncer qu’il avait corrigé les erreurs du passé et de montrer que le problème du respect des données et de la sécurité avait été pris au sérieux par Facebook. Parmi les mesures qui ont été mises en place, il a notamment cité un meilleur contrôle des applications qui utilisent les données de Facebook, la possibilité́ de ne pas avoir ses données personnelles stockées chez Facebook, ou l’arrivée de l’intelligence artificielle pour repérer les fraudes, fake news et tentatives de manipulation. 20 000 employés, au lieu des 10 000 auparavant, seront consacrés à ce meilleur contrôle.

Deuxième point : il a du faire face aux menaces de démantèlement pour conserver l’entité de son groupe.

A la question « que pouvez- vous faire pour me convaincre de ne pas démanteler Facebook? », posée par le député allemand Manfred Weber qui s’inquiète du pouvoir grandissant du réseau social, Mark Zuckerberg n’a pas répondu directement. Il a préféré détourner la question en évoquant les nombreux concurrents qui fleurissent chaque jour. Or, pas une semaine ne passe sans que la position dominante de l’entreprise ne pose problème et qu’une nouvelle organisation, lobby ou même des politiques ne propose de démanteler la firme – même Emmanuel Macron s’était dit ouvert à la question dans une récente interview, les trouvant « trop gros pour être gouvernés ».

Rappelons que Facebook possède plusieurs entités, plusieurs réseaux sociaux différents. Après les rachats d’Instagram, de Messenger et de WhatsApp, sa position dominante sur les réseaux sociaux et les systèmes de messagerie est incontestable. Sans compter que Facebook s’est aussi lancé dans la publicité et partage maintenant le secteur avec Google. Eux seuls raflent les ¾ du marché de la publicité. Pour la concurrence, il faudra repasser plus tard.

Tout ça interroge forcément sur la nécessité de réguler, voire de démanteler une telle position dominante.

Alors, les américains ont plus d’expérience et d’exigence en la matière. La législation américaine est très sévère à l’encontre des abus des positions dominantes. La loi Antitrust date des années 1890 et a vu plusieurs grands groupes se faire taper sur les doigts. A commencer en 1911 où l’empire de John Rockfeller, Standard Oil, avait du être démantelé en pas moins de 30 sociétés. Microsoft avait fait l’objet d’une procédure à la fin des années 90. Mais il faut signaler que depuis l’avènement des GAFA, ni Amazon sur le e-commerce, ni Facebook sur les données ne semblent encore éveiller les soupçons.

L’Europe n’a pas le même historique, mais face au retard dont elle fait preuve dans le domaine technologique, elle pourrait agir. Suffira-t-il à l’Europe de menacer d’un surplus de régulation ? Guy Verhofstadt menace de sanctions le géant: « voici ce que nous allons faire en tant que Parlement européen parce que nous en avons la compétence: premièrement, renforcer les règles notamment en ce qui concerne les compensations financières en cas de manquement, et ensuite déclencher les institutions européennes compétentes pour lutter contre les monopoles, car c'est ce qu'est Facebook." Comme devant les parlementaires américains, le patron de Facebook s'est dit prêt à accepter un minimum de régulation, et a promis de s'y conformer, sans plus de détails.

Quel tournant prendra Facebook dans les prochaines semaines ? Celle d’ «un des géants d'internet ou (…) un génie raté ayant créé un monstre numérique qui détruit nos démocraties » ? L’avenir nous dira si la question des données, cruciale en cette semaine de mise en route de la RGPD, a été prise au sérieux.

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