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Et la loi anticasseurs révéla le doute installé au cœur de La République En Marche
©LIONEL BONAVENTURE / AFP

LaREM

La proposition de loi a été adoptée mardi dans l'après-midi par 387 voix "pour", 92 voix "contre" et 74 abstentions. Fait intéressant, 50 députés de la majorité se sont abstenus.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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On connaissait les réserves d'un certain nombre de députés de La Rem à propos de "la proposition de loi visant à prévenir les violences lors des manifestations et à sanctionner leur auteurs", plus communément appelée Nouvelle Loi Anti-casseurs. Ils les avaient exprimées à de multiples reprises devant micros et caméras au cours du débat...Mais on avait grandement sous-estimé leur nombre. Aussi y atil eu un moment de stupeur dans les rangs de la majorité en découvrant que, là où on en attendait au maximum une trentaine, cinquante membres du Parti majoritaire s'étaient abstenus et qu'une dizaine d'entre eux n'avaient pas pris part au vote. Le texte a néanmoins été largement adopté par 347 voix contre 92, les Républicains ayant massivement voté en faveur de ce texte émanant de leurs rangs... puisque la proposition de Loi avait été déposée par le sénateur Bruno Retailleau et rejetée à l'époque par LaRem. "C'est un évènement, pas un schisme, il n'y a pas eu de vote contre dans nos rangs et cela ne fait que 16% des voix de notre groupe", commentait aussitôt le porte parole du groupe Jean-Baptiste Djebarri, député de la HauteVienne. Oui, mais avec les non votants, la statistique grimpe à 18%,presque 20, soit deux dixièmes du groupe majoritaire qui compte 307 membres au total, lui fait-on observer. Et l'élu de concéder, à l'instar des autres responsables du groupe "Ce n'est pas facile de gérer une majorité de plus de 300 personnes".

Car ce vote 'est clairement un revers pour le gouvernement. Juste avant le scrutin, Jean-François Eliaou, le porte parole du groupe pour le texte, (élu de l'Hérault) vantait le " fruit d'un travail et d'une négociation acharnés avec le gouvernement"(sous entendu pour adoucir le texte initial). Mais cela n'a pas été jugé suffisant pour ceux qui contestent l'article 2 du texte, autorisant les préfets à interdire le droit de manifester aux individus jugés dangereux (membres des fameux Vlaams Blok notamment): pour eux cette interdiction relève de la seule Justice et non d'une décision administrative. L'interview très critique dans le Monde de l'avocat François Sureau (pourtant proche d'Emmanuel Macron), affirmant que ce texte "établit (...) un véritable contrôle administratif du droit de manifester", alors qu'il s'agit d'un droit constitutionnel, a pesé sur la décision de certains députés réticents et encore hésitants. Certains tentent de se justifier en expliquant, comme une partie des opposants au texte que "cette proposition de loi est inutile car il " existe déjà un délit de préparation"... de manifestations violentes...

 Parmi les abstentionnistes on trouve les élus de la mouvance écologiste, avec à leur tête Barbara Pompili, présidente de la Commission du Développement Durable, Mathieu Orphelin, proche de Nicolas Hulot, ainsi que des membres de l'aile gauche de LaRem, appelés "Groupe de Poitiers", anciens du PS et élus de la région, mais des élus qui mettent en avant leurs valeurs. Pour l'heure ils espèrent, disent-ils que le Sénat réécrira le fameux article 2 en introduisant la notion d'interdiction de manifester aux seuls individus ayant déjà fait l'objet d'une condamnation préalablement, comme l'avait suggéré la députée Modem et ancienne magistrate, Laurence Vichnievsky ( qui a voté en faveur du texte). Une position d'attente, mais tout de même un signe de défiance à l'égard du gouvernement et... d'Emmanuel Macron. L'exécutif a dû aller puiser dans le " stock" des propositions de l'opposition LR un texte pouvant être adopté rapidement, ce qui apporte de l'eau au moulin de ceux qui parlent de loi de circonstance. Il n'en reste pas moins que ces fissures mettent en lumière la grande disparité du groupe LaRem. En 2017, la victoire d'Emmanuel Macron suivie de l'élection massive de députés à son effigie, devaient envoyer aux oubliettes les clivages entre la Droite et la Gauche. Les différences d'origine des élus macronistes s'étaient fondues dans l'euphorie de la victoire d'Emmanuel Macron et étaient supposées se noyer à jamais avec l'ancien monde. Les clivages sont réapparus timidement avec la loi sur l'asile et l'immigration. Depuis, l'étoile d'Emmanuel Macron a pali avec la crise des Gilets Jaunes, et les députés ont mûri." En 2017 le Groupe en était à l'enfance, aujourd'hui il est adolescent et un adolescent, c'est rebelle !", analyse un macroniste. Qu'en sera-t-il lorsqu'il sera complètement adulte ? Pour l'heure il n'est question ni d'exclusion ni de scission, mais dans les rangs de LaRem on critique sévèrement ceux qui ne prennent pas en compte la radicalité nouvelle" des manifestations depuis la naissance du mouvement des Gilets Jaunes". Les plus lucides prédisent qu'il se formera des "groupes de contestation lorsque nous aurons à voter des textes difficiles, comme la nouvelle loi bioéthique avec la PMA, ou encore une loi sur les cultes". Et cette élue souhaite " bien du plaisir à ses collègues abstentionnistes lorsqu'ils devront expliquer leur vote aux commerçants victimes des gilets jaunes".

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