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Sous les jupes des joueuses 
de tennis...
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Roland Garros !

Roland Garros se déroule cette année du 22 mai au 5 juin 2011. Le tennis est un sport où l'érotisme s'immisce partout, avec une singulière puissance. Franck Evrard en dévoile les dessous affriolants, dans son livre "L'érotique du tennis" aux éditions Hermann. Extrait - épisode 2.

Franck Evrard

Franck Evrard

Patrick Evrard est Professeur de Lettres modernes.

Docteur ès Lettres et ès Arts du spectacle, il est chargé de cours à l'université de Paris VII- Denis Diderot. Responsable de la revue de littératures CONTRE-VOX. Il est l'auteur de L'érotique du tennis (Hermann, 2011).

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Au XIXe siècle, le regard masculin était aimanté par les jupes des joueuses qui, en balayant le sol, révélaient par intermittence une haute bottine de cuir blanc. En 1958, le photographe de charme Serges Jacques est poursuivi par la police à cause d’un cliché paru dans Paris Hollywood qui montre un joueuse de tennis dont la petite culotte laisse subrepticement deviner une toison pubienne indisciplinée. En juin 1972, pour illustrer un article sur « les dessous du tennis », la couverture de Lui exhibe une joueuse blonde de dos, prête à recevoir un service : la posture qui dévoile une culotte blanche est censée révéler « la fesse cachée » du tennis. Dans ses chroniques consacrées à la télévision, le romancier Patrick Besson en Saint-Simon hédoniste adopte le regard fétichiste du téléspectateur qui traque le mystère de la minijupe ou convoite la vision de slips ou culottes féminines avec la bénédiction familiale: « Au fond, le tennis féminin est une série érotique télé qui passe le samedi et le dimanche après-midi. On peut même assister au tournage. Avec sa femme et ses enfants. » [1] La drôlerie vient du fait que ce désir de voir et cette passion des étoffes sont souvent déçus soit par la malédiction de l’absence des joueuses jolies comme Anna Kournikova, trop vite éliminée dès les premiers tours, si bien que son slip ne reste qu’un « souvenir » ou un « mythe », soit par l’imposition fâcheuse d’une tradition vestimentaire comme dans le cas des joueuses russes (Dementieva, Myskina), « les premières dans l’histoire du tennis mondial à ne pas montrer leur culotte ». Apparemment mineures et gauloises, les considérations de Besson dissimulent une réflexion sur la difficulté de concilier érotisme et art dans la pratique du tennis.

Aujourd’hui, le corps du joueur ou de la joueuse de tennis pactise avec le tissu, aussi bien sur les modes du flottement que sur celui du gainant et du moulant. Le short flottant, vague du joueur et la jupette ou la tunique de la joueuse apparaissent comme des alibis pour l’exhibition. Seconde peau légère, voile, ils participent d’une dialectique du montré et du caché, de la dissimulation et de la révélation qui contient la promesse d’ouvrir sur la scène interdite du sexe. Dans Le Plaisir du texte, Roland Barthes a mis en évidence ce jeu érotique entre le corps et le vêtement. « L’endroit le plus érotique d’un corps n’est-il pas là où le vêtement bâille ? Dans la perversion (qui est le régime du plaisir textuel) il n’y a pas de « zones érogènes » (expression au reste casse-pieds) ; c’est l’intermittence, comme l’a bien dit la psychanalyse, qui est érotique : celle de la peau qui scintille entre deux pièces (le pantalon et le tricot), entre deux bords (la chemise entrouverte, le gant de la manche) ; c’est ce scintillement même qui séduit, ou encore : la mise en scène d’une apparition-disparition. » [2]

[1] Patrick BESSON, Le Plateau télé, chronique du temps passé devant la télévision, Paris, Fayard, 2010, p. 525.

[2] Roland BARTHES, Le Plaisir du Texte, Paris, Seuil, 1973, p. 19.

Extraits de L'érotique du tennis (Hermann, 2011)

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