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Entre le plan de relance, la rentrée sociale et l’approche de la présidentielle, après le  « quoi qu’il en coute », voilà la facture de l’après-Covid
©THOMAS COEX / AFP

Atlantico Business

Alors que le ministre de l’Economie a annoncé la fin du « quoi qu’il en coute », il se retrouve bien obligé de continuer à supporter l’activité et payer le prix de la paix sociale et civile.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Entre la nécessité de continuer à supporter les secteurs de l’économie qui vont durablement rester en difficulté, comme le tourisme ou l’évènementiel, le prix d’une rentrée sociale qui s’annonce compliquée et les promesses faites à différentes administrations, la facture de l’après-Covid va rester lourde.

Quand Bruno Le Maire déclare que « le quoi qu’il en coute » est terminé, il a raison parce que l’économie va mieux. Elle se redresse au fur et à mesure que le pays se sent moins  menacé par la pandémie. On devrait donc retrouver un niveau d’activité normale à la fin de l’année. Dans ces conditions, le ministre ne peut qu’annoncer la fin des aides socio-économiques au fur et à mesure que le travail va reprendre. On ne peut pas imaginer une économie sous perfusion perpétuellement. 

Sauf que de telles intentions sont très théoriques. Les risques de la pandémie diminuent mais les risques politiques vont s’accroitre dès qu’on va s’approcher de l’élection présidentielle. Et d’expérience, on sait que la surenchère politique coute cher. 

Sur le prix de la pandémie, trois remarques : 

1ère remarque : il est évident que ce « quoi qu‘il en coute » a permis de protéger le système économique, et donc permis d’éviter une catastrophe. Presque tous les chefs d’entreprise le reconnaissent, et personne ne viendra critiquer la gouvernance française sur ce terrain-là.

2e remarque : ce « quoi qu’il en coûte » a couté très cher. Bercy annonce une facture de 240 milliards d’euros, soit 10 % de la richesse nationale, mais Bercy est en dessous de la réalité.

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Ces 240 milliards additionnent :

- 160 milliards de prêts aux entreprises et 

- 80 milliards d’exonérations de charges sociales, d’indemnités de chômage partiel et fonds de solidarité aux entreprises.  

Alors, c’est une facture provisoire parce que  Bercy va pouvoir sortir de ses comptes les prêts dont il a été garant et qui vont être remboursés, mais il va falloir intégrer au calcul des dépenses qui n’ont pas été comptabilisées, et notamment les recettes fiscales qui ne sont pas rentrées. Le manque à gagner est à prendre en compte.   

Parce qu’il y a eu moins d’activité, donc moins d’impôts prélevés, moins de TVA. Environ 37 milliards sur 2020 et 20 milliards de perdus en 2021. 

La facture sera un peu plus lourde que ce que le ministre a annoncé, mais on va forcément continuer à injecter de l’argent au cours des six mois à venir. 

D’abord, le gouvernement va finaliser cet automne un plan de relance et d’investissement dont une partie sera financée par l’Union européenne. Une grosse part restera à la charge de l’Etat, entre 20 à 30 milliards. Emmanuel Macron doit en reparler prochainement, parce que la dimension politique n’échappera à personne, compte tenu de la participation de l'Union européenne autour de table.

Ensuite, on a le plan de revenu «  presque » universel promis aux jeunes, qui va couter 3 milliards par an. Dans le dossier des promesses faites, on va retrouver la facture du Ségur de la santé, 12 milliards cette année, et toutes les dépenses ministérielles qui seront inscrites au budget : l’intérieur avec le renforcement de dépenses de sécurité, la justice et l’éducation. Ces trois ministères ont déjà reçu la promesse de rallonge qui sera imputée au budget 2022. 

Enfin, le gouvernement va continuer à soutenir certaines activités qui étaient en difficultés avant et qui ont été abimées par la crise. On ne les laissera pas tomber, c’est la promesse faite par le Premier ministre aux partenaires sociaux, hier. Le gouvernement avait mis sur la table de Matignon pour les partenaires sociaux , l’examen de l’environnement et des chantiers des réformes en cours : celui des retraites ou du chômage, dont la mise en œuvre est déjà reculée. En clair, il s’agit de donner aux partenaires sociaux un peu de grain à moudre pour éviter une rentrée sociale un peu énervée. Les manifestations qui se succèdent chaque week-end dans les grandes villes ne sont pas très importantes, elles sont mal structurées, mais il ne faudrait pas que les perspectives sociales alimentent la grogne et la rogne socio-politique. 

Le « quoi qu’il en coute » va encore trouver des terrains d’application et pas des moindres. 

Politiquement, la difficulté pour le gouvernement va être d’éviter le débat sur la gestion des dépenses publiques. Éviter la question du « qui va payer ? ». A quelques mois de l’élection présidentielle,  ça ferait désordre. Mais il faudra nécessairement donner une explication.  

Pour sortir de ce piège, le gouvernement a fait trois paris : 

Un : le pari d’une reprise très forte, capable de générer une croissance dont les dividendes  permettraient de rééquilibrer les finances publiques. C’est un peu utopique parce que la croissance sera forte, mais insuffisante compte tenu de l’ampleur des besoins. 

Deux : le pari d’une solidarité européenne pour abandonner le dogme de la rigueur maastrichtienne. Ça sera certainement la ligne stratégique d’Emmanuel Macron qui va prendre la présidence de l'Union européenne l'année prochaine en pleine campagne présidentielle. Une chance qu’il ne manquera pas de saisir, d’autant que l’Allemagne va se retrouver en position de faiblesse.

Trois : le pari d’une inflation contrôlée mais c’est une grosse inconnue. L’inflation remonte partout en Europe. Alors, c’est plutôt une bonne chose parce que ça permet de revaloriser les salaires, ce qui calme le jeu social.  On a besoin d’inflation, mais pas trop, sinon les taux d’intérêt remontent et si les taux d’intérêt remontent, la dette coute plus cher alors qu’actuellement, la dette ne coute pas cher et rapporte même de l’argent. 

Pour répondre très cash à la question : qui va payer l’addition ? On ne parlera pas d’impôts  nouveaux. Pas avant l’élection présidentielle. 

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