Dettes et déficit : le FMI voit rouge écarlate en regardant la France<!-- --> | Atlantico.fr
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Le siège du FMI à Washington
Le siège du FMI à Washington
©Olivier DOULIERY / AFP

Alerte

Pour l'opinion publique, le FMI se résume trop souvent à une personnalisation. On méconnaît trop souvent ses fonctions profondes mais on garde en mémoire ses dirigeants : ici DSK, là Christine Lagarde, désormais à la tête de la BCE. Le FMI vient pourtant d'émettre une analyse inquiétante quant à l'état de notre économie et singulièrement de ses Finances publiques.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Dans un rapport publié il y a exactement une semaine, le FMI recommande à la France de lancer un train de réformes structurelles dans le but de contenir, puis de réduire les dépenses de fonctionnement de la sphère publique.

Les chiffres sont connus via le vote du PLF : plus de 155 Mds de déficit public nominal pour un total de dépenses de plus de 500 Mds ce qui est une photographie que la réalité fera jaunir du fait des nouveaux volets des boucliers anti-inflation ou anti-hausse de l'énergie.

Certains experts envisagent une dégradation de 30 Mds additionnels ce qui démontre que la situation se détériore. Le " quoi qu'il en coûte " s'apparente, en macronie, à une vis sans fin.

Si 200 milliards d'euros est un horizon désormais plausible, on comprend pourquoi l'institution de Washington lance une alerte. Pour le FMI, le diagnostic est rouge écarlate. Nos marges de manœuvre sont réduites et nos possibilités d'endettement se contractent au fur et à mesure que la hausse des taux d'intérêt se manifeste. Songeons en effet que la charge de la dette dépassera 50 Mds l'an prochain alors même que l'Agence France Trésor aura pour mission de lever près de 280 Mds sur les marchés.

La France devient chaque semestre davantage l'homme malade de la zone €uro. Et on ne voit guère de sursaut présidentiel face à cette situation. Ce mutisme du président Macron dispersé sur des sujets qualifiables d'annexes est désolant. Par sa formation, ce dirigeant sait que nous frôlons le ravin et pourtant le compteur des dépenses continue de s'affoler.

En cas de crise financière comme celle qu'a récemment traversée la Grande-Bretagne, si le pays ne peut seul parer le coût, alors le FMI peut être appelé pour éviter un défaut. Autrement dit, en cas d'incapacité ponctuelle ou durable pour un pays de rembourser ses échéances, sa dette exigible.

Le FMI exige alors une politique de conditionnalité : donc conditionne ses prêts à la mise en œuvre de réformes structurelles. Que son récent rapport traite desdites réformes structurelles à l'intention de la France démontre que notre pays et ses contribuables sont d'ores et déjà situés dans l'antichambre d'un plan probable de restructuration.

S'agissant de la France, le FMI s'émeut du caractère indiscriminé des aides en matière énergétique. La meilleure preuve de l'inanité de cette décision qui favorise autant l'automobiliste rural en Renault Clio que le possédant d'un imposant SUV est inscrite dans le futur proche. L'État a en effet annoncé qu'il allait, selon le slogan du ministre Gabriel Attal, favoriser les " gros rouleurs et les gros bosseurs " ( sic ! ). Mieux vaut tard que jamais ! Il reste que la politique floue de lutte contre l'énergie chère aura coûté un " pognon de dingue " aux Finances publiques.

D'origine néo-classique, le FMI se méfie de l'indexation des salaires sans bien comprendre la dureté de la vie quotidienne de millions de françaises et de français. On ne peut que déplorer une approche aussi statique de la sphère économique et sociale s'agissant d'un pays en ébullition sociétale.

Pour la croissance 2023, le FMI envisage le chiffre de 0,7% par opposition au 1% du Gouvernement. Dans ces colonnes, j'ai eu l'occasion de démontrer que la récession était clairement envisageable et si l'on songe aux nombreuses entreprises qui stoppent leurs activités du fait de la hausse faramineuse des coûts de leurs approvisionnements énergétiques ( acier, verreries, etc ) et de la question masquée des entreprises zombies, il est hautement probable que des recettes fiscales manqueront à l'appel tandis que des charges additionnelles ( chômage total partiel ) se feront hélas jour.

Ainsi, le chiffre de 5,4% de déficit du PIB envisagé par le FMI pourrait être dépassé tandis que la dette publique franchira les 3.000 Mds pour sa partie explicite et plus de 4.100 Mds pour les engagements hors-bilan.

Face à ces risques, le FMI sort une calculette éculée qui vise les retraites et l'assurance-chômage là où des ministres engagent des dépenses par milliards. La fin imminente du vote du PLF 2023 permettra de mieux fixer l'état de l'art mais pour conclure, il est intéressant de se reporter à la note de Standard & Poor du 4 Juillet dernier.

" Le ralentissement économique, associé aux mesures gouvernementales visant à amortir l'impact de l'inflation sur les entreprises et les ménages, pèsera sur la situation budgétaire. Cependant, le retrait des programmes de soutien liés à la COVID-19 compensera le coût de ces mesures supplémentaires, et l'inflation élevée a stimulé les recettes fiscales. Le resserrement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) rendra les conditions de financement moins favorables, mais nous prévoyons une diminution progressive des besoins d'emprunt. "

Cette baisse des besoins d'emprunt a été vigoureusement démentie depuis le mois de Juillet. Le deuxième semestre a été un calvaire pour nos Finances publiques. Rien de moins !

 Il suffit de lire l'ex-ministre des Finances du Luxembourg, Pierre Gramegna, récemment nommé Directeur général du Mécanisme Européen de Stabilité, dont la vocation est d'assurer la stabilité de la zone €uro.

Peu de économistes ont le courage de révéler la gravité de la situation. Ainsi, on revient à la sempiternelle question de la loyauté à la nation du discours économique et financier, à l’exception notable depersonnalités comme Denis Ferrand (Rexecode) ou Jean-Marc Daniel qui ont – eux -  le cran d'assumer.

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