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Déficits publics : les mensonges du dernier programme de stabilité du quinquennat Hollande, les points forts et les points faibles de ceux qui veulent lui succéder
©LIONEL BONAVENTURE / POOL / AFP

Trou à combler

Le gouvernement a annoncé un déficit à 3% en 2017 auquel personne ne croit. Mais faut-il attendre quelque chose des candidats à cette élection présidentielle ? Pas de tous en tout cas.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : François Hollande a présenté devant le Conseil des ministres mercredi 12 avril son programme de stabilité pour l'année 2017, document qui sera envoyé à la Commission européenne. Pour l'année en cours, le gouvernement table sur un déficit sous la barre des 3%, après 3,4% en 2016. Si cette projection est globalement interprétée comme irréaliste, les principaux candidats à l'élection présidentiels apparaissent-ils en mesure de mieux gérer les déficits publics que François Hollande ?

Philippe Crevel : La France figure parmi les plus mauvais élèves de l’Europe avec un budget en déficit pour la 43e année consécutive. Le Président de la République a beau indiqué que cette année, le solde public pourrait, pour la première fois depuis 2007, redescendre en-dessous de 3 % du PIB, et personne n’y croit vraiment. Le taux de croissance retenu pour calculer le budget apparaît surestimé, 1,5 % quand les conjoncturistes attendent 1,1 %. Par ailleurs, de nombreuses dépenses cachées pourraient refaire surface après l’élection présidentielle quand certaines recettes pourraient s’évanouir dans la nature. Le Haut Conseil des Finances Publiques sur un ton tout technocratique doute de la réalité de l’assainissement structurel des comptes publics. Le pouvoir en place a néanmoins dans le cadre du programme de stabilité qui doit être adressé prochainement à la Commission de Bruxelles dégradé sa prévision de déficit à 2,8 contre 2,7 % initialement.

Pour l’année en cours, aucun candidat ne s’engage à respecter la feuille de route de François Hollande prouvant qu’elle ressemble aux villages de Potemkine chère à Catherine II de Russie. Emmanuel Macron qui entend défendre l’héritage du Gouvernement en matière de finances publiques admet que son arrivée au pouvoir serait marquée d’une dérive qu’il évalue à 0,2 point et que les spécialistes estiment à 0,5 point. François Fillon de son côté a dès les primaires annoncé que pour 2018 il fallait le deuil des 3 % pour mieux assainir les comptes sur la durée. S’il devient Président de la République, le déficit pourrait être de 3,8 %. Avec Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon, la France s’enfoncerait dès la première année dans les abysses des déficits. Le solde public serait négatif de plus de 4 points. Ces deux candidats entendent s’affranchir, du moins pensent-ils, des règles de bonne gestion publique. Sur la durée du quinquennat, deux candidats, François Fillon et Emmanuel Macron, se démarquent en réduisant le déficit public. Il est à souligner que François Fillon est grâce à son programme d’économies mettre un terme à la litanie des déficits, un excédent de 0,7 % du PIB étant attendu en 2022 soit le niveau atteint par l’Allemagne ces dernières années. François Fillon prévoit 100 milliards d’euros d’économies que l’Institut Montaigne a révisées à la baisse à 66 milliards d’euros. Les dépenses nouvelles sont inférieures à 12 milliards d’euros. Grâce aux économies, le candidat LR peut diminuer les prélèvements obligatoires d’une quarantaine de milliards d’euros. Emmanuel Macron est un peu moins rigoureux et un peu moins précis sur les économies. Il prévoit 16 milliards d’euros de dépenses nouvelles auxquelles il faut ajouter son plan de relance de 50 milliards d’euros. Il annonce 60 milliards d’euros réévaluées à 35 milliards d’euros par l’Institut Montaigne. Il attend 17 milliards d’euros d’économie de l’assurance-maladie ce qui n’est pas crédible compte tenu de la croissance de ces dépenses. De même, dans un premier temps, la création de l’assurance-chômage universel et du régime de retraite unique génèreront des coûts (coûts informatique, indemnisation des perdants du changement de système, extension des droits pour les indépendants, etc.). Les dépenses publiques devraient baisser en cas d’application stricte du programme d’Emmanuel Macron à 53 % du PIB contre 56 % aujourd’hui mais de manière moins net que pour François Fillon (51,5 % du PIB).Benoît Hamon laisserait le déficit autour de 3 % du PIB sous son mandat quand Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen pourrait l’amener au-delà de 7 % du PIB.

Dans quelle mesure le niveau de déficits public peut-il influencer les politiques décidées au cours d'un quinquennat ? Certains programmes apparaissent-ils comme moins réalistes que d'autres ?

Avec une dette publique de plus de 96 % du PIB, avec un déficit qui est de plus de 3 % en 2016, la France se rapproche de jour en jour de la zone rouge. Pour le moment les faibles taux d’intérêt que la Banque centrale européenne impose la protègent. Mais que ces derniers viennent à gagner plusieurs points, le service de la dette exploserait mettant en danger la solvabilité de notre Etat. Un point de taux d’intérêt en plus, c’est sous 3 ans, 10 milliards d’euros de service de la dette en plus. Une politique budgétaire expansionniste qui est le souhait d’une très grande partie des candidats donnerait lieu à des tensions au sein de l’Union et à l’aggravation de l’écart des taux avec l’Allemagne. Si les taux augmentent, c’est l’immobilier qui plonge ainsi que l’investissement. L’application des programmes de Marine Le Pen et de Jean-Luc Mélenchon entraîne la sortie de l’Union européenne et l’abandon de la monnaie unique. Mais, cela signifie aussi l’explosion du marché unique et le problème d’accès aux devises pour régler nos dépenses publiques et nos importations. C’est à plus ou moins brève échéance la banqueroute avec à la clef une mise sous tutelle du FMI. Ainsi, en voulant se libérer de l’Europe, la France se placerait de fait sous le contrôle du FMI. Jean-Luc Mélenchon ne pourra guère demander de l’aide à Cuba ou la Bolivie tout comme Marine Le Pen ne pourra guère compter sur l’appui financier de la Russie. Il est à signaler que ces deux derniers ainsi que Benoît Hamon  n’excluent pas l’idée d’un dépôt de bilan total ou partiel de la France. Nul n’évoque les conséquences d’une telle décision. La France, les entreprises, l’Etat, les particuliers ne pourraient plus recourir aux marchés pour emprunter. La planche à billets serait le salut du pays avec en ricochet une forte appréciation et la dépréciation du franc nouveau. De tels scénarii apparaissent peu probables du fait qu’il faudrait que les candidats qui défendent l’idée du saut de l’ange aient une majorité parlementaire prête à l’effectuer également.

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