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Débat sur les réfugiés à l'Assemblée : comment Hollande espère piéger la droite
©Reuters

Coup fourré

Le chef de l’Etat a annoncé lundi 7 septembre qu’un débat sur les réfugiés aurait lieu le 16 janvier à l’Assemblée. L’opposition, très divisée sur la question, va avoir du mal à parler d’une seule voix. D’autant que l'approche des élections régionales a tendance à durcir les prises de position.

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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Si seulement les électeurs n’étaient pas là, tapis dans l’ombre, prêt à brandir leur bulletin de vote. Si seulement le spectre des élections ne se profilait pas à l’horizon.  Si seulement le FN ne menaçait pas de voler encore quelques points supplémentaires aux Républicains. Si seulement. En proposant, lundi, lors de sa conférence de presse de rentrée, la tenue d’un débat à l’Assemblée Nationale sur la question des réfugiés, François Hollande a tendu un joli piège politique à l’opposition. Ce débat, sans vote a-t-il été précisé aux différents groupes parlementaires, qui aura lieu le 16 septembre à l’issue des questions d’actualité, n’avait aucun caractère obligatoire. Celui de la veille qui portera sur une éventuelle intervention en Syrie est une nécessité inscrite dans l’article 35 de la constitution, en revanche, la France peut décider, sans consulter le Parlement, d’accueillir en France les 24 000 nouveaux réfugiés annoncés lundi par le locataire de l’Elysée.

C’est, en réalité, un joli coup politique que vient de jouer là le président de la République. Alors que la majorité est, pour une fois, plutôt unie sur le sujet, l’opposition  elle, risque de devoir étaler au grand jour ses divisions. En effet, quoi de commun entre une Nadine Morano qui twittait, le 3 septembre dernier : "Quotas obligatoires, la France et l'Allemagne vont-elles assurer aussi les transports pour venir en Europe ?" et renchérissait, le lendemain sur RMC, "Les quotas vont  inciter les migrants à traverser encore plus [nombreux] au péril de leur vie". Un Alain Juppé qui juge le chiffre de 24 000 réfugiés annoncé par François Hollande "modéré et acceptable" et annonçait lundi que la métropole bordelaise allait d’engager pour accueillir sa part de familles. En passant par François Baroin et Xavier Bertrand qui refusent d’accueillir le moindre réfugié dans leurs villes ou Nicolas Sarkozy qui comparait le 18 juin l'afflux de migrants en Europe à une grosse fuite d'eau avant de modérer son discours, à La Baule où il rappelait : "le statut de réfugié politique fait partie de l’identité nationale française". Les Républicains s’en vont, sur cette question, en ordre divisé. Qu’ils se situent au centre ou à droite de l’échiquier, qu’ils soient élu local ou national, implanté dans le sud-est  et le nord-est de la France ou dans le grand ouest, leur discours varie du plus ferme au plus ouvert.

En effet, la campagne des régionales, qui commence à battre son plein, change la donne. La partition qu’il siérait de jouer à Paris n’est plus audible localement. Même depuis la publication de la photo du jeune Aylan, une majorité de Français (55%) estiment encore que la France ne doit pas imiter l’Allemagne en assouplissant les conditions d’octroi du statut de réfugié aux migrants, selon un sondage Odoxa pour Le Parisien-Aujourd’hui en France paru dimanche. "Les candidats vont vraisemblablement avoir des positions plus radicales que les autres", explique-t-on à l’Assemblée. Sur la question des réfugiés, le fossé qui existe entre les élites et ce que Jean-Pierre Raffarin nommait la France d’en bas, semble plus large que jamais.  C’est d’ailleurs sans doute l’une des raisons qui a poussé François Hollande à refuser, dans un premier temps, les quotas proposés par la commission européenne. L’émoi médiatique provoqué par la parution de la photo du jeune garçon a eu raison de ses réticences. Aspirés par la vague, les représentants des Républicains ont suivi le même chemin, d’Alain Juppé à Nicolas Sarkozy, tous ont assoupli leur discours. Seul Bruno Le Maire se démarque. Tout en ne remettant pas en cause le droit d'asile, il préfére "inciter les migrants à trouver d'autres solution que l'exil" et insiste sur la nécessité d’une intervention au sol. Il espère, sans doute, ainsi de ne pas se couper de cet électorat populaire qu’il tente de séduire. Les candidats aux élections régionales risquent d’être dans la même logique, au premier rang desquels Laurent Wauquiez qui, ce mercredi matin sur France Info, s'est prononcé pour un accueil momentané des réfugiés.

"La réunion de groupe du 15 risque d’être mouvementée, reconnait un  pilier du groupe Les Républicains à l’Assemblée Nationale. Elle sera entièrement consacrée au sujet, c’est certain. Il va s’agir de déterminer la position majoritaire. Nicolas Sarkozy sera surement là car c’est la première réunion de groupe depuis la rentrée mais sa parole n’est pas prépondérante. Les députés sont très attachés à leur souveraineté". Les députés candidats aux régionales vont faire valoir leur point de vue, les candidats à la primaire aussi. En règle générale, lorsqu’il y a autant de points de vue différents au sein du groupe, Christian Jacob, le président, se charge de faire la synthèse. "Il a l’autorité pour le faire et il n’est pas sulfureux, il n’a pas de position radicale", ajoute un proche. "Quel que soit notre porte-parole, il devra être consensuel", ajoute un autre. Un exercice d’équilibriste car il s’agira, en outre, de ne pas donner l’impression de soutenir l’initiative de François Hollande. Si personne, chez les Républicains, n’imagine que le Président de la République ait organisé ce débat pour piéger l’opposition, "il s’agissait surtout de redonner du poids au Palais Bourbon", explique un vieux routard de l’Assemblée, tous reconnaissent que la division du groupe peut être un bénéfice secondaire pour l’Elysée qui ne devrait pas bouder son plaisir. 

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