Crise agricole : l’Europe est-elle devenue un système anti-démocratique… à son corps défendant ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Des agriculteurs de la FDSEA lors d'une manifestation devant le Parlement européen.
Des agriculteurs de la FDSEA lors d'une manifestation devant le Parlement européen.
©FRÉDÉRIK FLORIN / AFP

Politique européenne

La crise agricole montre que nombre de décisions ont été prises loin des débats publics nationaux. Pas la faute de l’Europe en soi, personne n’empêche les Français de s’intéresser à ce qui se décide à la Commission ou au Parlement européen. Il n’en demeure pas moins que la citoyenneté européenne reste une chimère politique qui finit par menacer la vitalité démocratique européenne et l’adhésion à l’Europe comme parfois au principe démocratique même.

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud

Christophe Bouillaud est professeur de sciences politiques à l’Institut d’études politiques de Grenoble depuis 1999. Il est spécialiste à la fois de la vie politique italienne, et de la vie politique européenne, en particulier sous l’angle des partis.

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Marcel Kuntz

Marcel Kuntz

Marcel Kuntz est biologiste, directeur de recherche au CNRS dans le laboratoire de Physiologie Cellulaire Végétale. Il est Médaille d'Or 2017 de l'Académie d'Agriculture de France

Il est également enseignant à l’Université Joseph Fourier, Grenoble.

Il tient quotidiennement le blog OGM : environnement, santé et politique et il est l'auteur de Les OGM, l'environnement et la santé (Ellipses Marketing, 2006). Il a publié en février 2014 OGM, la question politique (PUG).

Marcel Kuntz n'a pas de revenu lié à la commercialisation d'un quelconque produit. Il parle en son nom, ses propos n'engageant pas son employeur.

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Atlantico : La crise agricole montre que nombre de décisions européennes ont été prises loin des débats publics nationaux. Comment en est-on arrivé à cette forme de déni de démocratie ou a minima d’appauvrissement de la démocratie ?

Marcel Kuntz : L'écologie politique a compris qu'elle ne peut obtenir le pouvoir suprême au niveau des nations. Elle se contente d'un lobbying forcené. C'est au niveau européen qu'il est le plus porteur. Au Parlement, à la Commission et aussi, cela est méconnu, en amont de la constitution des Directives, règlements et normes, en ayant investi des commissions, des groupes de travail, par exemple dans le cadre de conventions internationales, signées bien légèrement par la France. J'ai pu l'observer dans le cadre de conventions sur les biotechnologies, qui concernent aussi l'agriculture. Les agriculteurs, souvent n'y sont pas représentés, les représentants des Etats sont souvent faibles voire complaisants. Ce sont des terrains de jeu des écologistes politiques. Ils exercent ainsi une influence bien supérieure à leur poids électoral.

Christophe Bouillaud : Pour répondre à cette question, il faudrait refaire toute l’histoire de l’intégration européenne depuis les années 1950. Sur le plan le plus général, il faut rappeler que l’échec, dès 1950, de toute perspective de construction d’un Etat fédéral européen à court terme, sur le modèle des Etats-Unis ou de la Suisse, a amené à une intégration européenne uniquement par les marchés. Cette intégration économique s’est faite à travers une lourde discussion interétatique – des traités - aboutissant à des institutions – la Commission européenne et la Cour de justice de l’Union européenne-  devant créer et réguler le « marché commun ». Cette intégration, secteur par secteur économique, s’est révélée particulièrement difficile dès le début de l’aventure européenne dans le secteur agricole. La Politique agricole commune a été la solution pour avoir une ouverture des marchés agricoles sans trop de casse sociale. Or l’histoire de l’intégration européenne est jalonnée de crises agricoles, car, fondamentalement, dans un régime de libre marché des produits agricoles, des produits éminemment substituables entre eux, avec des coûts de transports bas, la concurrence est féroce, et elle se fait brutalement par les prix, avec mise à mort économique rapide du perdant. 

A compter des années 1980-1990, à cet objectif d’intégration européenne, s’est clairement ajouté un objectif de re-globalisation des marchés, à l’image de ce qui avait existé avant 1914. Rappelons qu’à cette époque, le GATT créé en 1947 devient l’OMC (Organisation mondiale du commerce). Pour l’agriculture européenne, s’est ainsi ajoutée à la concurrence déjà difficile à réguler entre agriculteurs européens, une concurrence avec les producteurs agricoles ailleurs dans le monde. Cette évolution a été validée par les gouvernements démocratiquement élus des pays européens, parce que, dans leur immense majorité, les gouvernants de cette époque croyaient aux vertus de la globalisation de tous les marchés pour assurer la croissance économique de leurs économies nationales. 

Nous en arrivons à une phase nouvelle en cette première partie de la décennie 2020 où la majorité des gouvernants européens veut concilier deux choses : d’une part, ils veulent, toujours au nom de la croissance de leurs économies respectives, préserver le rôle de l’Union européenne comme puissance commerçante à l’échelle mondiale en multipliant les accords de libre-échange avec des pays (Nouvelle-Zélande, Canada, etc.) ou des autres intégrations régionales (Mercosur) pour pallier au fait que l’OMC s’est avérée incapable de promouvoir plus avant l’ouverture commerciale du monde ; d’autre part, conformément à leur acceptation des constats du GIEC en matière de climat et de l’IPBES en matière de biodiversité, et plus généralement de la recherche scientifique, conformément au fait que les pays de l’Union européenne sont tous signataires des Accords de Paris (2015), ils veulent réorienter toute l’économie européenne en tenant compte de ces constats sans appel sur le risque existentiel que court l’humanité. 

Or les deux aspects sont fondamentalement contradictoires. Certes, les dirigeants européens pensent avoir trouvé la solution de leur dilemme dans leur inventivité technocratique, par exemple l’imposition d’une taxe carbone à la frontière, ou bien de clauses-miroirs en matière d’agriculture. Or, en réalité, il est illusoire de croire que l’on peut contrôler à distance ce qui se passe chez autrui. Aurait-on exactement les mêmes normes environnementales entre les pays de l’Union européenne et ses partenaires commerciaux, qu’il y aurait de toute façon un doute. Déjà, à l’intérieur même de l’Union européenne, tous les agriculteurs de tous les pays, pas seulement les agriculteurs français, croient sincèrement que, chez le voisin, les normes sont moins rigoureuses et appliquées avec bien moins de zèle. C’est le défaut majeur dans la cuirasse : chaque pays européen est chargé en pratique d’appliquer la norme décidée en commun, mais chaque pays est attaché à ses petits secrets pour rester plus compétitif que le voisin. Par exemple, c’est un secret de Polichinelle que l’agriculture bretonne continue à polluer, malgré les condamnations de la France devant la Cour européenne sur ce point, bien plus qu’elle ne devrait les eaux, d’où les désormais célèbres « algues vertes » bretonnes. Il faut ajouter qu’en l’absence d’un vrai SMIC européen, et plus encore d’un SMIC mondial, le coût du travail est fondamentalement différent entre pays européens, et plus encore entre pays européens et pays hors Union européenne à bas salaires. 

Au total, la racine de cette situation tient au fait qu’il n’existe pas une fédération européenne qui aurait la légitimité, et aussi l’administration de terrain, pour faire respecter exactement les mêmes règles partout. De ce fait, chaque agriculture nationale attend de son Ministère de l’agriculture, ou de son Etat national en général, qu’il fasse en sorte de l’exempter en pratique de la règle européenne commune.  Dans l’Union européenne, il y a juste des juges qui disent que tel ou tel acteur économique ou Etat ne respecte pas les règles édictées en commun, mais c’est à l’Etat national concerné de bien vouloir exécuter la décision.  

Qui bénéficie le plus de cette séparation entre les lieux de la décision et ceux du contrôle démocratique - au sens de ce qui se joue vraiment sous les yeux des électeurs ?

Marcel Kuntz : Les décisionnaires ne sont pas des dictateurs, au sens qu'une seule personne décide de tout. L'idéologie qu'il représente a un certain soutien sociologique, principalement urbain, qui profite du "système" tel qu'il est. Qui aime lui aussi afficher des "vertus", qui baignent dans l'idée de la culpabilité en tout de la civilisation européenne héritée du passé. Il représente une base électorale conséquente. Qui vote pour les partis qui acceptent cet éloignement des lieux de décision, et même un projet fédéraliste européen qui n'a plus rien à voir avec l'Europe des nations qui a pu avoir un large soutien populaire.

Christophe Bouillaud : Je ne suis pas sûr que l’on puisse vraiment parler de séparation entre les lieux de décision et ceux du contrôle démocratique en matière européenne. Toutes les décisions de l’Union européenne, en particulier les règlements et les directives, sont approuvées à la fois par une majorité dans le Parlement élu et par une majorité dans le Conseil de l’Union européenne. Les députés européens sont élus directement tous les cinq ans, et les ministres qui siègent au Conseil sont tous membres de gouvernements issus de majorités parlementaires, elles-mêmes venues d’un vote populaire national. Il y a donc formellement un contrôle démocratique, si l’on entend par contrôle démocratique, un contrôle d’une décision par des représentants élus. Par ailleurs, du point de vue du fonctionnement de l’Union européenne, il est assez facile de savoir qui veut quoi et pourquoi, qui vote quoi. Les sites de l’Union européenne sont désormais remarquablement bien faits.

Par contre, ce qui manque désespérément, ce sont des médias transeuropéens qui fassent leur travail de veille pour le grand public et qui parlent jour après jour aux Européens de ce qui se passe à Bruxelles. Du fait de l’affaiblissement de la presse écrite depuis des décennies maintenant, ce travail de veille est déjà fait très médiocrement au niveau national. Il est fait de manière encore plus médiocre au niveau européen en direction du grand public. Il existe certes une presse spécialisée, chère d’accès, souvent en anglais, sur la « bulle bruxelloise », mais les grands médias nationaux ne font pas relais. 

Du coup, effectivement, cela permet à des acteurs nationaux de faire quelque chose à Bruxelles et de nier l’avoir fait lorsqu’ils sont interrogés par leurs médias nationaux, ou bien l’inverse. Ces derniers jours, sous la pression de la mobilisation des agriculteurs, le gouvernement français va ainsi clamer à Paris qu’il fera obstacle aux négociations avec le Mercosur, mais, à Bruxelles, en coulisse, on saura qu’il n’en est rien. Ce double jeu ne vaut pas que pour le gouvernement, certains acteurs politiques d’opposition sont aussi adeptes de ce parler-faux. Et de nos jours, être pris en flagrant délit de mensonge par quelque fact-checker, n’a aucun effet sur votre carrière politique. Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose ! 

Y a-t-il des partis ou des groupes d’intérêt qui profitent particulièrement de ces décisions prises loin de l’attention médiatique pour peser plus que leurs poids politique réel ?

Marcel Kuntz : Il y a bien sûr des intérêts économiques en jeu. Qui ont bien intégré l'idéologie de la culpabilité occidentale. Il suffit de voir certaines publicités qui intègrent les codes imposés par l'écologie politique et plus largement l'idéologie postmoderne. Tout se passe comme s'il ne s'agissait pas uniquement de vendre des produits mais aussi de rééduquer les récalcitrants. Un paradoxe est que l'écologie politique, située plutôt très à gauche, s'allie aisément à des entreprises "capitalistes" quand cela sert leurs intérêts de pouvoir. 

Christophe Bouillaud : Du point de vue des partis, autant qu’on puisse en juger, leur poids dans la décision européenne est strictement proportionnel à leur force au Parlement européen ou à leur contrôle d’exécutifs nationaux. Les travaux sur le Parlement européen révèlent seulement que les partis d’extrême-droite, ceux du groupe ID (Identité et démocratie), dont le Rassemblement national est le principal pilier, comptent très peu dans la décision. Ils sont maintenus à la marge d’un Parlement dominé par la grande coalition PPE-PSE-Renew. 

Du point de vue des groupes d’intérêt, ce sont les groupes les plus armés techniquement et les plus aisés qui l’emportent. En matière agricole, ce n’est pas un scoop : les représentants des grandes cultures exportatrices, l’agro-industrie et la chimie dominent le jeu européen depuis longtemps. Est-ce que leur omniprésence bruxelloise dépasse leur poids politique réel ? J’aurais tendance à dire qu’ils sont des poids lourds dans certaines économies nationales et qu’ils le sont aussi à Bruxelles.

Que révèle plus spécifiquement l’exemple de la politique de la ferme à la fourchette sur la manière dont ces décisions sont prises ?

Marcel Kuntz : L'idéologie postmoderne a aussi le pouvoir à Bruxelles. Elle est aussi convaincue qu'il faut "déconstruire" le vieux monde Westphalien, fait d'Etat nation, au profit d'une structure supranationale, supposée vertueuse. Plus de guerre entre ces États, les technocrates vont faire le bonheur des peuples, y compris malgré eux. Plus de pollution non plus : la vertu environnementale doit régner. C'est une priorité. Même au détriment de la production agricole. C'est la folie idéologique du Green Deal. L'affichage de vertu uber alles.... L'écologie politique est donc forcément en terrain conquis !

En fait, si l'environnement (vu par ces idéologues...) est une priorité, les consommateurs en sont la seconde. Du moins là aussi sous le prisme idéologique selon lequel tirer les prix vers le bas ne peut être que bénéfique pour le consommateur, quitte à ouvrir les marchés sans réelle réciprocité, ni concurrence non faussée (en fait faussée par des normes que nous nous imposons par l'idéologie de la vertu environnementale uber alles....). 

Christophe Bouillaud : La stratégie « Farm-to-fork » (F2F), « de la ferme à la fourchette », fait partie du « Green Deal », le « Pacte vert » européen. Il s’agit d’une stratégie tous azimuts visant à construire une agriculture durable à tous points de vue en Europe. L’aspect le plus simple à comprendre est la volonté de se passer progressivement de pesticides, ayant des effets nuisibles sur la biodiversité et sur la santé humaine. 

Cette stratégie est clairement appuyée sur des conclusions scientifiques en matière de lutte contre le changement climatique, de préservation de la biodiversité en Europe, et de protection de la santé des populations, aussi bien à travers la qualité nutritive de ce que les Européens vont manger que de leur protection contre la pollution chimique liée aux pesticides. 

Cependant, vu ces multiples objectifs, elle est horriblement complexe dans sa conception, puisqu’elle revient à réviser de très nombreuses normes en vigueur ou à en créer de nouvelles. On sent bien que les technocrates de la Commission se perdent eux-mêmes dans les méandres de ce qu’il y aurait à faire. Par ailleurs, tous ceux qui se sentent visés par cette nouvelle vision de l’agriculture et de l’alimentation ne sont pas privés de la délégitimer en mettant en cause sa validité scientifique, et surtout en intervenant fortement à grand renfort de lobbying pour la rendre la plus indolore possible pour eux. 

Elle passe au final d’autant moins auprès de certains agriculteurs de base, comme le montre le mouvement en cours des agriculteurs français, qu’au sein des choix politiques faits au niveau de l’Union européenne, elle ne domine pas le choix structurel fait pour le libre-échange et pour des prix bas de l’alimentation pour le consommateur européen. En somme, la stratégie F2F vise sur le papier à organiser une montée en gamme de l’agriculture européenne, qui serait à la fois moins polluante, plus respectueuse des grands équilibres naturels et délivrant de meilleurs nutriments aux Européens, mais elle ignore complètement que les agriculteurs européens ne peuvent pas augmenter leurs prix, sauf à être éliminé du marché par leurs concurrents extra-européens, puisqu’il n’est pas prévu que le consommateur européen doive payer plus cher son alimentation. 

C’est là le défaut évident de toute cette politique : des consommateurs européens sous contrainte budgétaire. Il faut bien dire qu’il n’est vraiment pas facile de faire remonter une dépense dans le budget des ménages, sans que la plupart d’entre eux comprennent bien pourquoi ils devraient le faire. 

Les gouvernements nationaux eux-mêmes jouent-ils de cet éloignement pour faire passer des politiques qu’ils peineraient à assumer ouvertement au niveau national ?

Marcel Kuntz : Je crois que nos gouvernants sont surtout faibles. Ils agissent ou pas en fonction de la plus grande facilité. La plupart n'ont pas de vision à long terme. Ils sont souvent soumis à l'idéologie dominante, donc aujourd'hui de la "déconstruction"...

Christophe Bouillaud : J’aurais tendance à dire l’inverse : il est difficile dans le cadre d’une discussion ouverte et internationalisée sur un sujet de dire vraiment n’importe quoi. Pour prendre un exemple, les conclusions du GIEC établissent qu’il existe sans l’ombre d’un doute scientifique un réchauffement climatique d’origine anthropique. Même l’Arabie saoudite, qui aurait tous les intérêts du monde à prétendre le contraire, a accepté cette conclusion. Elle ne l’aurait pas fait, elle serait apparue comme un Etat éloigné de la science telle que conçue par le reste de l’humanité. Les conclusions scientifiques sont universellement valables. Au niveau national, c’est déjà plus facile de raconter des stupidités, comme le font les climato-négationnistes aux Etats-Unis. 

Du coup, le défaut, si l’on veut appeler cela un défaut, de l’Union européenne et de ses Etat membres est de valider généralement les acquis de la science. Avec 27 pays, c’est assez difficile de faire du « lyssenkisme » sur un sujet, même si, parfois, cela réussit comme sur certains produits chimiques réputés par les autorités européennes sans aucun danger, alors qu’une instance liée à l’OMS dit le contraire. 

Pour revenir au cas de l’agriculture, c’est parce que les autorités de l’UE  croient aux conclusions du GIEC et de l’IPBES qu’elles ont fait leur « Green deal ». Malheureusement, au niveau national, tous ceux qui ont intérêt à ne pas y croire pour des raisons bien compréhensibles de gains économiques, se révoltent facilement contre les mesures prises au nom de cette rationalité internationalisée, car elle n’est nullement partagée par l’ensemble des populations. Si ces dernières avaient bien compris le consensus scientifique international, dans tout ce qu’il a d’inquiétant, elles appuieraient fermement les réformes en cours.  

Donc ce n’est pas tant que les gouvernants usent de cet éloignement pour faire passer des politiques qu’ils n’arrivent pas à assumer, que, plutôt, les gouvernants sont contraints par la discussion internationalisée à prendre des décisions appuyées sur la meilleure science disponible suite à discussion ouverte, qu’ils ont ensuite le plus grand mal à mettre en œuvre au niveau national.

Vous avez publié un nouveau livre, "De la déconstruction au wokisme" où vous analysez l'idéologie postmoderne. Y a-t-il un lien avec la situation actuelle de l'agriculture ?

Marcel Kuntz : Absolument. Cette idéologie veut "déconstruire" la civilisation occidentale issue des Lumières. D'autres auteurs l'ont aussi analysée. Mais je pense être le seul à avoir montré que cette "déconstruction" vise aussi, et peut être d'abord les technologies modernes. Et donc l'agriculture moderne, utilisatrice de technologies. L'écologie politique ne veut pas détruire ces technologies par hasard. Elle est l'un des piliers (pseudo scientifiques) de l'idéologie postmoderne.

Les catégories économiques et sociales moins organisées ne savent pas se faire entendre et sont souvent mal représentées. Une vraie citoyenneté européenne ou un meilleur contrôle démocratique au niveau européen pourraient-ils permettre de retrouver un équilibre et d’apporter des solutions concrètes à des enjeux fondamentaux pour les citoyens européens, notamment sur la crise agricole ?

Marcel Kuntz : La citoyenneté européenne est un mythe qu'entretiennent les tenants de l'idéologie postmoderne (le Président Macron en est l'illustration). La citoyenneté est liée à un État nation. Ce que n'est pas l'UE. C'est pourquoi le projet postmoderne est de faire disparaître les Nations européennes au profit d'une Europe fédérale, où règneront toutes les vertus fantasmées de l'utopie postmoderne. Évidemment, cela suppose de passer outre les désirs des peuples. Ce que j'appelle dans mon livre le "Dispositif médiatico-politique" dominant, auquel il faut ajouter des intérêts économiques, se chargera de duper les peuples. Mais quelques fois une partie du peuple se révolte. Comme aujourd'hui les agriculteurs. Le "Dispositif" va tenter de les mater dès qu'il le pourra...

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