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Coronavirus : l’étrange sérénité des marchés financiers
©KAZUHIRO NOGI / AFP

Marchés zens ?

Évidemment, sous l’effet négatif des chiffres du chômage et des enquêtes, les marchés ont dévissé. Mais aujourd'hui, ils attendent les dates de déconfinement comme un retour graduel à la normale, tout en faisant des hypothèses et des calculs, pour perdre le moins et se refaire.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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1er mai ? Fin mai ? Quand le déconfinement sera-t-il donc annoncé aux États-Unis, sachant qu’il s’approche en Italie et en Espagne ? Mais nous avons encore en Italie 4000 cas par jour contre 6 000 au « pic » et 2 600 contre 7 500 en Espagne au plus haut, quand même. L’aplatissement de la courbe semble se mettre en place, mais lentement et nul ne connaît les risques de résurgence avec le déconfinement, en fonction de ses modalités… partout différentes ! Aux États-Unis aussi, une sorte de ralentissement se dessine, mais avec plus de 26 000 nouveaux cas par jour contre un maximum de 34 000, sachant qu’ils sont devenus l’épicentre de la maladie : 560 000 cas sur 1 900 000 dans le monde (officiellement).

Les médecins demandent d’attendre, les entreprises et les marchés d’ouvrir, les politiques sont pris au milieu. Les médecins veulent sauver des vies, les entreprises se sauver, emplois et profits avec, et les marchés comprennent. Les politiques vacillent : les illibéraux le sont davantage, les libéraux sont critiqués de toute part. Dans ce contexte, les marchés financiers réfléchissent… comme des miroirs…grossissants. D’un côté, ils regardent les chiffres sur la vitesse de propagation du virus qui semble ralentir et d’un autre côté regardent les PIB perdus, les secteurs et les entreprises menacés, cherchent les gagnants.

Les marchés boursiers se redressent

Ils ont évidemment dévissé, sous l’effet négatif des chiffres du chômage et des enquêtes, malgré les soutiens budgétaires et monétaires, aux États-Unis surtout. Le point bas semble derrière, puisque les marchés disent que l’on comprend mieux, sait mieux et réagit mieux, sans que pour autant le risque sanitaire soit évacué. Dans ce contexte, ils attendent les dates de sortie du déconfinement comme un retour graduel à la normale, tout en faisant des hypothèses et des calculs, pour perdre le moins et se refaire.

Pandémie : quels chiffres ? 

Évidemment, les chiffres de cas continuent de monter. Les modèles mathématiques se mettent alors en branle pour déterminer les pics de malades et de décès et les dates possibles de déconfinement. Les chiffres varient selon les modèles et les données, demandant aux politiques de peser un déconfinement plus ou moins proche, avec un PIB et des emplois « sauvés », contre des morts !

On mesure les tensions partout, surtout aux États-Unis où le Docteur Fauci est là pour défendre un déconfinement tardif contre certains représentants du business et responsables Républicains. Donald Trump vient ainsi de retweeter un message d’un activiste Républicain : Time to Fire Fauci » : c’est le moment de virer Fauci !

Pétrole : quel accord ?

Pas assez de baisse de la production ! Les marchés veulent que les prix du pétrole remontent plus vite et que cesse « la crise dans la crise » pétrolière. Ils voulaient une baisse de la production de pétrole conséquente, entre Arabie Saoudite et Russie, pour arrêter la guerre « fratricide » de surproduction. Elle faisait plonger les prix du pétrole et les économies pétrolières avec, en sus, la baisse de demande liée à la pandémie. Donald Trump avait parlé de 10 millions de barils par jour (mb/j). C’est magiquement le chiffre atteint, les  deux belligérants annonçant une baisse de 2,5 mb/j chacun et les États-Unis les rejoignant pour apporter 2 à 3 millions de baisse de leur côté, une première ! Mais il semble que les marchés se sont ravisés, demandant plus. Peu probable qu’ils soient entendus : les prix actuels vont fermer les puits américains de pétrole de schiste et freiner les investissements. La hausse des prix devrait suivre.

En revanche l’or monte encore, un peu parce que la situation n’est pas éclaircie, un peu parce qu’emprunter pour en acheter ne coûte rien, un peu parce que nombre de mines sont fermées et un peu plus parce que la Fed vient de dire qu’elle allait acheter des ETF adossés à l’or (23 milliards de dollars d’achats au premier trimestre, record historique) ! 

Bons du Trésor : quelles lectures après l’accord européen et les programmes américains de dépenses ?

Les bons du Trésor américain attirent de plus en plus, même si Donald Trump creuse le déficit budgétaire à coups de trillions ! Les États-Unis sont supposés gagner cette épreuve, les marchés regardant certes « la reprise » de l’offre chinoise, mais sachant qu’elle dépend largement de la reprise de la demande américaine. 

Quant à la zone euro, les marchés financiers voulaient 1 000 milliards d’euros, dont 500 d’Eurobonds. Mais on peut dire que les Pays- Bas et l’Allemagne n’ont pas cédé, mais aussi que les 540 milliards décidés (100 pour les chômeurs à temps partiel, 200 pour les PME grâce à la BEI et 240 pour aider l’Italie et l’Espagne par utilisation du fonds d’aide, mais sans condition) sont aussi des financements mutualisés ! Au fond, c’est déjà la moitié. L’effondrement de la zone euro est remis à plus tard. En revanche, il faudra bien débattre du financement de la reprise. Pas facile, indispensable.

Le dollar toujours superstar

Ainsi, même si l’évolution de la pandémie inquiète le plus aux États-Unis, avec les divergences au sommet : médecins contre business, Dr. Fauci contre P. Navarro (Assistant de D.Trump pour l’économie) plus avec les divergences entre États pour déterminer les conditions de déconfinement, ce qui est un risque supplémentaire, les milliards de dollars du Trésor et de la Fed font la différence.

Bien sûr, nous ne savons pas à quel point les États fragiles ont été atteints : le FMI devra faire des crédits, mais il est essentiel de « tenir » le centre du système. Tel est actuellement le cas, dans une situation périlleuse où l’on ouvre les porte, ne sachant pas encore tuer le virus. On peut attendre un peu, mais pas beaucoup.

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