Communication politique : Jean Castex et Olivier Veran, perdus pour la France<!-- --> | Atlantico.fr
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Olivier Véran Jean Castex
Olivier Véran Jean Castex
©LUDOVIC MARIN / AFP

Stratégie du gouvernement

Le Premier ministre, Jean Castex, et le ministre de la Santé, Olivier Véran, sont les deux principaux acteurs de la stratégie du gouvernement dans la lutte contre la pandémie de Covid-19. Comment sommes-nous arrivés à un tel naufrage en termes de communication politique pour Jean Castex et Olivier Véran lors de leurs conférences de presse sur la crise sanitaire ?

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Benoît de Valicourt

Benoît de Valicourt s’inscrit dans la tradition du verbe et de l'image. Il travaille sur le sens des mots et y associe l'image réelle ou virtuelle qui les illustre. Il accompagne les acteurs du monde économique et politique en travaillant leur stratégie et leur story-telling et en les invitant à engager leur probité et leurs valeurs sur tous les territoires. 
 
Observateur de la vie politique, non aligné et esprit libre, parfois provocateur mais profondément respectueux, il décrypte la singularité de la classe politique pour atlantico.fr et est éditorialiste à lyonmag.fr
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Atlantico.fr : Arrogance, refus de la critique, mépris à peine dissimulé pour les Français ou leurs représentants, comment sommes-nous arrivés à un tel naufrage en termes de communication politique pour Jean Castex et Olivier Véran ? Quels ont été les différents "couacs" à relever ? 

Benoît de Valicourt : Frédéric Mistral disait « Que ce soit avec les hommes, avec les rois, avec le peuple, qui veut régner doit plaire ! » et manifestement ce n’est pas donné à tout le monde. Plaire, ce n’est pas mentir, ce n’est pas dire ce que veut entendre le peuple. Plaire, c’est savoir faire passer un message, compréhensible et inspirant la confiance. L’exercice est d’autant plus difficile qu’en politique la concurrence est rude et le pouvoir transforme le sympathique voisin en pédant stéréotypé. Ni Castex, ni Véran ne peuvent l’ignorer mais ils sont pris dans la machine infernale de l’Etat qui broie toute sincérité et indépendance. Un seul message, une seule stratégie : la politique du Gouvernement est la bonne, circulez il n’y a rien à voir !

Lorsque Jean Castex arrive à Matignon, il est Monsieur « déconfinement » et avec son accent chantant, il bénéficie d’un capital sympathie. Mais déjà, dans le microcosme parisien, on rit sous cape comme si être Enarque ne suffisait plus, il faut aussi appartenir à la même caste, celle du parisianisme. Sur les réseaux sociaux, des photos montages peu amènes circulent ; entre neu-neu et plouc, les internautes hésitent.

Que reste-t-il à Castex pour résister à la dictature de l’image ? durcir le ton, montrer qui est le chef (ou du moins le sous-chef !), ne laisser aucune place à la critique, quitte à devenir arrogant et mépriser, du moins dans l’attitude, le peuple dont il est issu.

Quant à Olivier Véran, il suit le mouvement. Formé au PS, syndicaliste militant, il connait la doctrine du dogme !

Depuis son élection en tant que député en 2012, la communication d’Olivier Véran a-t-elle évolué avec l’exercice du pouvoir ? 

Le ministre des Solidarités et de la Santé avait tout pour réussir à ce poste ; médecin neurologue, syndicaliste hospitalier, socialiste converti au macronisme, il a même soutenu une thèse sur la Confusion d'origine épileptique au sein d'une population âgée.

Suppléant de Geneviève Foriaso, il défend une politique de gauche et quand il lui succède à l’Assemble Nationale comme titulaire, le jeune médecin à la houppette reste très ancré à gauche. Il devient la coqueluche des médias isérois. Jeune, souriant, svelte, l’homme plaît, il défend une ligne humaniste, droit-de-l’hommiste, tout ce qu’il faut pour être en odeur de sainteté.

Le 23 février 2020, 7 jours après sa nomination au ministère des Solidarités et de la Santé, il déclare que le masque ne sert à rien ! C’est le début d’un naufrage au pays du mensonge. Est-il responsable de cette déclaration ou a-t-il répété les éléments de langage que Matignon distribue, faute de stock des fameux masques ?

Toujours est-il que l’homme est médecin et on ne peut s’empêcher de croire que le nouveau locataire de l’avenue de Ségur ne sera pas à la hauteur.

Et tout s’enchaine, l’homme du déni adopte le ton jupitérien, son cheveux sur la langue renforce ses assertions comme paroles divines.

Jean Castex, élu d’une commune rurale depuis de nombreuses années, montre-t-il vraiment son attachement aux diversités du territoire dans ses discours ?

C’est là le grand paradoxe de l’élu de Prades. Attaché aux territoires, revendiquant fièrement la double origine territoriale de ses filles, gasconne et catalane. Elu locale, Jean Castex s’est engagé pour sa région mais arrivé à Matignon, il devient le chef d’une administration jacobine. Au moment où on commémore le 25ème anniversaire de la disparition de François Mitterrand, on se demande ce qu’il reste des lois de décentralisation de 1982.

Les présidents de Région, de Départements, les maires ne cessent de demander d’être associés à la gestion de la crise sanitaire en lien avec les préfets parce que chaque territoire est différent et l’épidémie n’est pas uniforme. Face à cela le Gouvernement répond par sa toute puissance, les décisions sont prises à Paris et doivent s’appliquer dans chaque région, département et commune de la même façon. Au lieu de choisir la décentralisation, le Gouvernement préfère le modèle de la déconcentration, la République est une et indivisible !

Comment le gouvernement essaye-t-il de sauver la mise ? Les tentatives de se rendre sympathiques aux yeux des Français (Jean Castex et sa femme à la une de Paris Match) sont-elles vaines ?

Sauver la mise est sans doute un bien grand mot. L’opération séduction dans Paris Match est un flop total, tout le monde s’en fiche mais pire, le microcosme politique a raillé la photo de la une avec l’épagneul, le blouson de la 3ème mi-temps de rugby et les tennis sorties tout droit de OVNI(s), la nouvelle série de Canal +.

La France n’attend plus une opération séduction, la France attend une opération vérité. Comment comprendre que dans un village de 1 000 habitants où aux heures de pointe on croise trois personnes sur la place de la mairie, il faille porter le masque et que dans une école parisienne, trente gamins déjeunent dans une même salle de classe.

La situation est ubuesque, les Français se taisent, ils mettent le masque dans la rue pour ne pas payer 135 €, ils trichent, ils boivent, ils s’évadent avec Netflix et attendent.

Jean Castex vient d’annoncer l’instauration pour tout le territoire d’un couvre-feu à 18 h. La pédagogie nécessaire a-t-elle été présente pour faire passer une mesure si lourde psychologiquement ? Qu’est ce que l’on peut retenir de cette annonce ?

Voilà un bel exemple du jacobinisme français ! le couvre-feu à 18 h pour tous, pas de jaloux. Des Champs-Elysées au plateau du Larzac, nous sommes tous priés de rentrer dans nos pénates ouvrir une bouteille de vin un peu plus tôt que d’habitude ! Jean Castex et 6 ministres nous ont expliqués que c’était pour notre bien et que vraiment la seule solution est de réduire au maximum les interactions entre les citoyens le temps de vacciner le plus grand nombre. Si les Français étaient il y a encore quelques jours défavorables au vaccin, la menace de reconfiner totalement le pays porte ses fruits puisque nous sommes passés de 60% de Français contre à 56% de favorables !

Et dans quelques jours, on nous expliquera que les lenteurs de la vaccination il y a 15 jours étaient dues à un manque d’approbation des Français pour le vaccin !

Mais faut-il reprocher aux Français de ne pas avoir voulu se faire vacciner ? peut-être pas, non pas que le vaccin n’est pas efficace, mais ils doutent. Depuis le début, la communication est catastrophique, de tout à son contraire, le Gouvernement n’a pas su tenir un discours de transparence. Hier soir, même Roselyne Bachelot ne croyait pas ce qu’elle lisait. Ces derniers temps, les ministres se défaussent, ils bottent en touche à chaque question sur la Covid-19 en expliquant qu’ils ne sont pas en charge de la santé.

Cependant, la grande force du pouvoir est sa politique d’aide financière. Les entreprises sont accompagnées comme jamais elles ne l’ont été. L’Etat providence est de retour et cela a évité de nombreux drames.

Panem et Circenses, du pain et des jeux disaient les Romains ; nous n’avons rien inventé de mieux.

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