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Comment le psychisme bloque les orientations thérapeutiques nécessaires à la guérison du cancer
©wikipédia

Bonnes feuilles

Comprendre le stress, savoir d'où il vient, comment il agit, comment le gérer au mieux par de saines habitudes alimentaires, une vie intellectuelle, affective et intérieure apaisée, voici ce que propose le professeur Joyeux, pour qui la lutte contre le stress est l'un des premiers remèdes contre le cancer.

Henri Joyeux

Henri Joyeux

Le Professeur Henri Joyeux est professeur de cancérologie et de chirurgie digestive à la Faculté de Médecine de Montpellier, et chirurgien des Hôpitaux et de l’Institut du Cancer de Montpellier. Il est également Président de “ Familles de France ”.

 

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Comment faire pour transformer les stress que nous subissons, de telle façon qu’ils ne perturbent pas trop notre santé ? Plus précisément, comment les orienter au service de notre santé ? Il est certain, nous l’avons vu, que les stress n’ont pas les mêmes conséquences biologiques, physiques, psychologiques chez les uns et les autres. Nous connaissons désormais parfaitement ces conséquences, ce qui autorise à trouver les moyens de réduire les plus négatives pour notre santé.

Des approches scientifiques nouvelles et d’avenir (2) : découvrir nos ressources méconnues

En 1965 a été inventée la psycho-neuro-immunologie, l’étude psychosomatique de la multiplicité des facteurs familiaux et sociaux responsables des maladies. Dès 1993, R. S. Lazarus (3) propose le coping (ou gestion) : il présente de nombreux paramètres, semblables à ceux d’un tableau de bord très sophistiqué. Les stratégies d’évitement des stress distinguent celles des hystériques, des obsessionnels, des anxieux, des adeptes du déni, des dépressifs, des phobiques, des états de stress post-traumatiques et les hypersensibles.

On peut ainsi distinguer les émotions positives des négatives, les pensées automatiques dans un sens ou dans l’autre, le coping efficace ou inefficace, etc. Cette théorie de Lazarus, présentée par Yvane Wiart, cite aussi l’échelle d’événements de vie de Holmes et Rahé qui affectent un coefficient à 43 situations classiques : le divorce porte le coefficient 50, la perte d’un conjoint 100, un déménagement 20, etc. Il faut avouer que ces coefficients sont fort suggestifs et peuvent varier d’une personne à l’autre, ce qui rend très discutable une telle comptabilité.

La somatopsychie est loin d’être la seule cause des cancers

Le cancer ne nous tombe pas dessus par hasard. Il est évident que les stress ou les émotions négatives sont en partie en cause. Les preuves des relations entre mental et état physique existent, c’est dans le jargon médical, la somatopsychie. En voici quelques dérives qui peuvent être délétères pour la santé, car le psychisme bloque les orientations thérapeutiques nécessaires à la guérison (nous les avons tous observées chez les adultes) :

– Les dérives sectaires dans le domaine de la santé orientent trop souvent les personnes atteintes et très stressées vers des gourous incompétents. Ceux-ci retardent l’efficacité de la médecine traditionnelle qui a fait ses preuves, pour le diagnostic et les traitements. Il n’y a pas de possibilité d’auto-guérison des malades avec des plantes ou des impositions de mains, fussent-elles les plus spirituelles. C’est du charlatanisme.

– Un stress ingérable qui fait que le patient refuse tout traitement tellement il est inquiet, obsédé par les complications thérapeutiques : perte des cheveux, amputation d’organe ou de fonction (sein, prostate, rectum-anus, vessie, membre, larynx, paralysie faciale et/ou oculaire).

– Une force intérieure qui fait croire au patient qu’il gérera tout seul sa maladie, en la rejetant « naturellement » de son corps, en utilisant le cosmos ou une force vitale extérieure…

– Le cancer du fumeur, c’est pour les autres !

– La punition divine : quand on ne veut pas entendre les causes parfaitement identifiées et qu’on s’enferme dans la culpabilité. Les cancers ne tombent pas du ciel. La science cerne de mieux en mieux les causes grâce à la génétique, aux études épidémiologiques, à l’informatisation des dossiers.

– Ceux qui ne croient que partiellement à l’efficacité thérapeutique et se résignent à leur sort. Ces personnes ont évidemment une durée de vie moindre.

– Ceux qui ont honte de leur maladie ou ne veulent pas affoler l’entourage.

– Le plongeon vers telle ou telle addiction : alcool, sucres, jeux de hasard qui ruinent le patrimoine personnel et familial. Les attitudes de défi ou l’orientation vers l’acharnement thérapeutique à un stade avancé de la maladie, dans une confiance aveugle en la science et les traitements, sont plus rares. Cette confiance excessive peut rendre agressif et désespéré quand les traitements successifs ne marchent pas.

Les liens entre personnalité et santé

Yvane Wiart détaille ces liens d’une manière originale. Voici plusieurs arguments qu’elle propose très justement :

– 47 à 63 % des dépressifs suivis médicalement ont une maladie chronique associée ;

– 40 % des patients suivis par les généralistes pour affection chronique, cancer compris, sont déprimés ;

– les relations psyché-soma sont plus présentes chez les patients des immunologues, endocrinologues, neurobiologistes, que chez les psychiatres et psychologues ;

– les traits de personnalité ne sont-ils la conséquence que des maladies ? Pourquoi pas l’inverse ?

– la détresse psychosomatique est une réalité de silence. De par nos expériences respectives nous pouvons ajouter :

– L’effet direct du psychisme sur le corps est indéniable pour des maladies bénignes : ulcérations digestives, souffrance de la peau, troubles du cycle féminin, hypertension artérielle, asthme, troubles musculo-tendineux, troubles vasculo-cardiaques, respiratoires… Et les cancers ? Lorsqu’un cancer apparaît, on a tendance à reporter la faute sur le patient lui-même, ce qui est très mauvais pour son avenir. Alors, sur qui reporter la responsabilité de cette maladie ? L’essentiel est d’utiliser ce que l’on sait des causes pour les réduire au maximum et limiter au mieux les risques de récidives.

– Nous savons que tout patient a non seulement besoin de comprendre la ou les causes de sa maladie mais qu’il cherche aussi souvent à lui donner un sens pour mieux la gérer. S’il considère que les stress qu’il a subis sont responsables de sa maladie, il est impératif d’en tenir compte pour éviter une récidive.

2. Cf. P. Loron, Rendez votre stress créatif, Le Sarment, 2000 ; C. Boukaram, Le pouvoir anticancer des émotions, L’Homme, 2011 ; Y. Wiart, Stress et Cancer : Quand notre attachement nous joue des tours, Boeck, 2014 (préfacé par Jacques Rouëssé, membre de l’Académie de médecine, ancien directeur du Centre René-Huguenin).

3. R. S. Lazarus, « From psychological stress to the emotions : A History of changing Outlooks », Annual Review of Psychology n° 44, 1993, p. 121.

Extrait de Lutter contre le stress, un remède anti-cancer, éditer aux éditions du Rocher

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