Comment l'application WhatsApp a révolutionné la diplomatie internationale <!-- --> | Atlantico.fr
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WhatsApp s'est fait aimer des diplomates en cryptant intégralement les messages postés sur sa plateforme. Un atout de taille à l'heure où certaines informations confidentielles pourraient tomber aux mains des gouvernements via le piratage informatique.
WhatsApp s'est fait aimer des diplomates en cryptant intégralement les messages postés sur sa plateforme. Un atout de taille à l'heure où certaines informations confidentielles pourraient tomber aux mains des gouvernements via le piratage informatique.
©Reuters

Diplomatie 2.0

L'application de messagerie instantanée WhatsApp est devenue incontournable sur les bancs des institutions internationales. Tous les diplomates ou presque l'utilisent, pour mener des conversations à l'abri des regards en marge des réunions. Une plateforme où s'opère dorénavant une majorité du travail souterrain et des manœuvres stratégiques.

WhatsApp est une application pour smartphone qui compte plus d'un milliard d'utilisateurs dans le monde. À condition d'avoir un accès à Internet, celle-ci permet de communiquer par message ou de passer des appels à n'importe qui et sur n'importe quel continent, sans devoir s'acquitter des surtaxes des opérateurs télécoms classiques. Et parmi ses plus fidèles utilisateurs, on trouverait notamment de nombreux diplomates. C'est simple : une grande part des négociations diplomatiques et arrangements stratégiques qui entrent en jeu sur la scène géopolitique mondiale se dérouleraient sur cette plateforme, qui donne en outre aux internautes la possibilité de faire des groupes de discussions privés. Mais que peut-il bien s'y dire ? Le média britannique The Guardian a tenté d'en savoir davantage.

Alliances et groupes privés

En diplomatie internationale, mieux vaut pouvoir compter sur ses alliés. À l'Onu comme dans les plus hautes sphères de l'institution européenne, les pressions, coups en douce et manœuvres politiques font partie du quotidien. Toutefois, difficile de se coordonner lorsque on est entouré de dizaines d'autres diplomates, épiant le moindre de ses faits et gestes. Impossible d'aller discuter avec l'ambassadeur d'un pays sans que cette entrevue n'ait pas trouvé écho dans l'assemblée. Aussi, la discrétion est de mise, et WhatsApp est devenu l'outil de prédilection de bon nombre de diplomates. Là où les épais murs des bâtiments où ils se réunissent empêchent tout réseau mobile, le réseau WiFi prend le relais et permet ces conciliabules aussi capitaux que risibles, transformant ces éminents diplomates en adolescents voûtés sur leurs écrans.

Il faut dire que les fonctionnalités de l'application se prêtent bien au jeu stratégique. "Vous pouvez former de petits groupes de discussions avec vos alliés, transmettre des photos de documents importants ou encore demander leur avis sur un sujet débattu sans que toute l'assemblée soit mise au courant", énumère un anonyme diplomate occidental interrogé par The Guardian. D'autant plus pratique lorsqu'un groupe d'alliés sont explosés aux quatre coins d'un hémicycle. Mais davantage que cela, les groupes de discussion privés dans lesquels se retrouvent ces diplomates ont l'avantage de ne pas offenser ceux laissés de côté, inconscients de l'existence d'un tel groupe.

Discrétion assurée

La discrétion est le principal avantage de ces groupes privés, où l'on est invité ou hôte. Le diplomate peut bien siéger à l'Onu et discuter dans le même temps d'une tout autre affaire avec un représentant situé à des milliers de kilomètres de là. "Vous n'avez pas besoin de quitter la salle pour avoir une conversation 'extérieure'. Cela peut être pratique si vous ne voulez pas vous montrer en compagnie de certaines personnes", confie anonymement un consultant présent au dernier sommet à Kigali, au Rwanda, où a été formulé un programme sur l'élimination des hydrofluorocarbures, ces gaz extrêmement nocifs pour le climat utilisés notamment dans les réfrigérateurs.

Aussi, WhatsApp s'est fait aimer davantage des diplomates en cryptant intégralement les messages postés sur sa plateforme. Un atout de taille à l'heure où certaines informations confidentielles pourraient tomber aux mains des gouvernements par le biais du piratage informatique. "Maintenant, WhatsApp est même davantage sécurisé que nos propres systèmes de messagerie gouvernementaux", analyse Jon Alterman, vice-président du Center for Strategic and International Studies, dans les colonnes du Guardian. Un rapport interne du ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni avait fait pareil constat, en révélant que les diplomates britanniques avaient échangé sur le conflit en Syrie via le réseau social en question.

Arme de diplomatie

La diplomatie est par essence une science de communication. Ces discussions entre alliés et représentants existaient déjà autrefois. Ces conversations sur Internet ne sont que leur prolongement. "Aujourd'hui, tout cela est court-circuité par ces messages textuels, confirme l'auteur du rapport cité plus haut et ambassadeur du Royaume-Uni au Liban, Tom Fletcher. Bien évidemment, cela ne se substitue pas à au rapport de confiance que l'on construit par le biais de rencontres en face à face. Mais une énorme part du travail diplomatique peut maintenant se décliner de cette nouvelle manière, et l'ambassadeur qui ne se sait pas se servir de WhatsApp risque de tomber. Et de conclure : Le smartphone fait maintenant partie de l'arsenal dont un diplomate moderne doit être pourvu, à l'image du courage, de la patience et d'un estomac bien accroché".

Pour anecdote, on retiendra que ces conversations entre diplomates, que l'on peut imaginer d'une froideur formelle et cordiale, sont en fait parsemées d'émojis, ces petits personnages décrivant tour à tour les émotions des personnes qui les postent. Et certains seraient même attribués à des hommes politiques, pour ne pas les nommer. Ainsi, Vladimir Poutine serait représenté par… l'extraterrestre gris que l'on peut retrouver dans nos smartphones.

L'application avait également été usitée lors de l'attentat de Bruxelles afin de partager les informations le plus rapidement possible entre les ambassadeurs de 28 États membres de l'Union européenne.

Les putschistes turcs, dont le coup d'État porté en juillet 2016 avait été maté par la population, s'étaient également coordonnés sur la célèbre application. On pouvait voir, à travers ces messages, l'enthousiasme des premières heures céder à la résignation, minute par minute. Les rebelles avaient, malheureusement pour eux, oublié de supprimer la conversation

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